Dès le 5 septembre, Konekte twa ! proposera d’accompagner Bruno Raya et ses caméras dans l’intimité des artistes mauriciens qui ouvrent leurs portes et leurs cœurs à travers cette nouvelle émission visible sur le net. Du coup, le présentateur et chanteur se prête au même exercice pour parler de ce projet, de son actualité, des Otentikk Street Brothers, de sa nouvelle coupe de cheveux, entre autres.
Qu’est-ce qu’est Konekte twa ?
Il s’agit d’une émission musicale à travers notre Web TV. Elle aura pour vocation de connecter le public à l’artiste et inversement à travers différentes plateformes. Nous espérons aussi que d’autres partenariats nous permettront de la diffuser à la télé.
Quelle forme prendra ce projet ?
Cette fois, je vais à la rencontre de l’artiste dan so baz. Soit chez lui ou dans un endroit qu’il voudra nous faire découvrir. Il nous expliquera ce choix et nous parlera de lui. J’ai derrière moi dix ans de télé ; cinq ans avec Live & Direk et cinq autres avec Bonnto Klip. Je suis l’un des artistes présentateurs à avoir reçu presque tous les artistes de Maurice. Je n’irai donc pas à la rencontre de mon invité pour qu’il se présente. Ce sera à moi de faire la présentation et ensuite de parler de différents thèmes : son actualité, l’avenir, la situation du pays, etc.
Pourquoi une telle émission ?
Cela fait trois ans que je ne suis pas à la télé. Je suis davantage à la radio. J’avais toujours eu en tête de développer un nouveau projet. L’arrivée du site de Raya Cosmétiques, qui appartient à ma cousine Dominique Raya, nous a offert une plateforme pour développer une Web TV. L’idée vient d’elle et est le prolongement de son magazine en ligne Mieux Être. Puisque son domaine est suffisamment grand pour nous abriter, nous avons décidé d’aller de l’avant. La première émission sera visible dès le 5 septembre. Dans un premier temps, nous aurons un nouvel invité chaque quinzaine. Nous n’irons pas très vite au départ afin de nous adapter aux attentes et pour nous améliorer jusqu’à atteindre une vitesse de croisière.
Donc trois ans après vous vous remettez devant les caméras, mais cette fois sans dreads. Parlons de choses indiscrètes ; pourquoi cette nouvelle coiffure ?
Je te fais remarquer qu’en ce moment, c’est aussi ma première interview et ma première couverture sans rasta (Rires !) après 20 ans. En fait, j’étais ce qu’on appelle un dreadlocks, je n’étais pas rastafarien, ce n’était pas ma religion. Je voulais montrer que ce n’est pas ta chevelure qui t’empêchera de faire que ce que tu dois faire. Il y avait tellement de préjugés attachés aux dreads que j’ai voulu dire que même avec une telle coiffure tu as les mêmes capacités que les autres.
Depuis les coups de ciseaux, qu’est-ce qui a changé ?
Je ne peux pas parler de changement. Disons plutôt que certaines choses ont pris une autre dimension. Les gens n’avaient jamais été habitués à me voir la boule à zéro. Quotidiennement, depuis novembre, on m’arrête pour me questionner. Mais, philosophiquement, cela ne représente aucun changement. Mes engagements sont les mêmes avec ou sans dreads. Ma musique continue comme avant, mes projets aussi, d’ailleurs avec OSB je suis monté sur la scène ainsi. Disons qu’à un moment j’ai senti qu’il était temps. Pour mes enfants aussi ; sinon ils ne m’auraient jamais vu sans dreads. J’ai toujours milité pour une île Maurice meilleure. Sans dreads, je continue, en souhaitant que mon pays avance dans la dignité et le respect du peuple.
Entre cet adolescent à la tête carrée et le père de famille que vous êtes aujourd’hui, qu’est-ce qui a changé fondamentalement dans cette progression vécue sous le regard du public ?
Aujourd’hui je reviens à ma tête de départ, mais en cours de route j’ai été forgé. J’étais jeune, j’étais rempli d’énergie et j’avais des revendications plein la tête. Je viens de Plaisance, et le rap, le ragga, tout ce mouvement étaient venus nous aider à faire entendre la voix du peuple. En progressant, j’ai appris à canaliser mon énergie pour aller plus loin en disant les choses sans pratiquer la langue de bois. J’ai appris à devenir responsable et à me comporter autrement pour respecter les autres et me faire respecter.
Ça a été un gros combat ; je fus un des premiers dreadlocks à présenter une émission télé en prime time. Les barrières que je voulais affronter sont tombées au fil du temps. Le fait d’être père me procure aujourd’hui beaucoup de plaisirs. Je leur parle de mon parcours, de nos réalisations dont ils entendent souvent parler par les parents de leurs amis.
Vous avez incarné l’image d’une jeunesse mauricienne à un moment ; à 43 ans, quel exemple souhaitez-vous être ?
Dans le langage, dans l’habillement, dans la persévérance et la détermination, j’étais conscient d’être devenu l’image de cette autre jeunesse mauricienne qui émergeait des ghettos. Aujourd’hui, je viens surtout expliquer aux jeunes qu’ils doivent avoir la foi, l’amour, la détermination et la persévérance. Il faut rester un assoiffé dans ce que l’on fait et aller jusqu’au bout. Sinon, tous les succès seront éphémères. Li pu zis pase ale. On n’arrive jamais à 26 ans de carrière autrement. Je n’ai peut-être pas beaucoup d’albums, je ne suis pas un aussi grand chanteur que d’autres, mais j’ai eu une contribution qui garde mon nom vivant dans les mémoires. C’est parce que j’ai toujours voulu avancer et j’ai veillé à garder la porte ouverte pour permettre à d’autres jeunes d’entrer à leur tour. Je n’ai pas été de ceux à vouloir garder la gloire uniquement pour eux.
Plusieurs autres projets musicaux qui ont suivi portent ainsi l’empreinte des OSB. J’ai eu plusieurs collaborations, j’ai porté certains de l’avant et j’ai eu un parcours avec de nombreux chanteurs et groupes. Citons par exemple Otentik Groove, un de meilleurs live bands du pays. Je suis un peu leur parrain. Ensuite, j’ai toujours travaillé sur des projets qui avaient aussi pour but d’apporter quelque chose à la société. Certes, nous parlons de business et d’entertainment, c’est mon travail. Mais, j’ai voulu aller plus loin pour mettre en valeur la culture, les talents, les ouvertures internationales, tout en aidant à améliorer la situation et la qualité de vie. J’ai toujours préféré des projets qui apportent une contribution et non des projets jetables. C’est comme pour mes textes. Nous avons le choix de faire des textes qui restent et d’autres qui meurent juste après une période de succès rapide.
Quels sont vos combats désormais ?
Protéger la jeunesse. Ena tro boukou malang ; dans le cerveau des gens, dans la société, dans la politique. Tenez, quand on voit ce qui se passe au Parlement, on a de quoi se questionner face à certaines attitudes qui sont tristes et qui donnent le mauvais exemple. Des insultes personnelles, pa-mwa-sa-li-sa, etc., une attitude de cour de récréation. Il est primordial de protéger les jeunes de tout cela. En société, on note que les jeunes ont une autre ouverture et qu’ils sont exposés à plusieurs choses. Je reste convaincu que la base pour construire un jeune doit être la spiritualité. Si moi je n’avais pas eu cette base, j’aurais été mort aujourd’hui, parce que toutes les tentations sont là. Certains de mes amis sont morts, d’autres ne s’en sont pas sortis, plusieurs ont réussi parce qu’ils ont cru et avancé.
Quels sont les défis des jeunes des ghettos aujourd’hui ?
À l’époque, je m’étais battu pour transformer mon ghetto en château. J’ai toujours été fier de mes origines, mais mon quartier ne pouvait rester le même. Il nous fallait évoluer et faire du quartier une fierté. À travers le monde j’ai fièrement revendiqué que je viens de Plaisance, parce que c’est Plaisance qui m’a construit pour me permettre d’avoir un statut. Plaisance a aidé les jeunes de ma génération à avoir des repères. Les jeunes d’aujourd’hui ont pour défi de faire plus que ça. La drogue synthétique est partout. Quoi faire ? Sauter dessus ? Ou piler dessus ? S’ils font le mauvais choix zot pou fer sato revinn geto. Ils doivent faire devenir le château encore plus rayonnant. La nouvelle génération doit définir ses objectifs, lever la tête des jeux vidéo et de Facebook et sortir voir dans la rue comment faire pour améliorer les choses dans le pays. Aujourd’hui, il y a encore plus de malpropreté que dans le passé. Mais hier, nous n’avions pas accès à l’information et à la prévention. Aujourd’hui, il est incompréhensible qu’un jeune puisse tomber dans la drogue synthétique.
Que pensez-vous de ce nouveau type de drogue ?
La drogue synthétique a provoqué une unité pour conduire vers l’enfer. Un produit sale inventé par l’homme qui n’a rien à voir avec le cannabis. Il complique la situation alors que d’autres se livrent à des expériences. Aussi dangereuse qu’elle soit, la drogue synthétique est plus accessible et coûte moins. Maurice doit repenser sa stratégie. La solution ne peut s’arrêter à l’arrestation des petits fumeurs. Nous avons fêté nos 50 ans, il faut se dire qu’un cycle est fini. Il est temps de voir les choses autrement et d’accompagner nos jeunes autrement en misant sur les valeurs qui tendent à disparaître. Hier, nous savions respecter les vieux, aujourd’hui on les attaque, on les tue pour les voler. Nos décideurs ont conduit notre société à être malade parce qu’ils n’ont pas agi.
Au matin du 26 août, qu’aurez-vous en tête en pensant aux 26 ans d’OSB ?
Je me verrai dans mon short à carreaux avec mes 14 amis avec lesquels nous dansions. Je rendrai grâce à Dieu pour OSB et pour ma carrière musicale puisque les deux vont de pair. Je prierai pour mes amis, mes fans.
À 26 ans, comment se porte OSB ?
OSB est toujours là. Mais il faut être honnête et se dire que les choses ne sont plus comme avant. Nous sommes mariés, pères de famille, chacun a ses responsabilités personnelles et nous habitons des régions différentes. Auparavant on se voyait toujours les jours. Désormais, c’est occasionnellement ou de manière plus régulière quand nous devons préparer un concert. Au-delà de ça, nous restons présents parce que nous avons derrière nous de grands souvenirs. Nous nous préparons pour le prochain Reggae Donn Sa et nous avons le désir commun de monter un nouveau projet.
Puisque ce désir reste présent, cela nous garde ensemble. Je ne sais pas s’il s’agira d’un dernier projet ou d’un premier projet d’une nouvelle ère, on verra quand on aura décidé. Ce dont je suis sûr, c’est qu’OSB, c’est pour la vie. Qu’il fonctionne ou pas, c’est pour la vie. Laissons faire la nature.
Votre mot de la fin ?
Il n’est jamais de trop d’essayer quand nous avons de bonnes idées. Je veux dire aux jeunes qu’il faut toujours tenter le coup pour avancer. Nous devons être conscients que les décisions de notre pays n’appartiennent pas qu’à une poignée de gens. Nous avons la capacité de réfléchir et la force pour combattre afin que cette réflexion prenne forme. C’est ce que nous avons fait, même s’ils prétendent être sourds. La détermination permet toujours aux choses de se concrétiser. Nous passerons toujours dans les vallées, ce ne sont que des épreuves vers la victoire. Il faut toujours garder la foi ; rien n’est impossible à celui qui croit.