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Rita, une vie de souffrance entre les mains d’un bourreau

Enceinte à 12 ans, elle a été contrainte d’épouser son agresseur, un voisin qui avait abusé d’elle à plusieurs reprises. Aujourd’hui âgée de 63 ans, cette grand-mère garde de douloureux souvenirs de son passé. Elle a été contrainte d’accepter son bourreau dans sa vie et de prétendre que tout allait bien. Auprès de ses enfants et de son entourage, elle a gardé le silence sur ce terrible secret…

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“Mon voisin m’a menacé avec un couteau en me disant de ne jamais rien dire à personne. Il avait menacé de me tuer si je racontais cela à qui que ce soit. J’ai eu peur. Je l’ai laissé faire. Il m’a violée”, confie Rita. Les souvenirs d’une vie salie par son agresseur qui deviendra son mari la hantent toujours. Âgée aujourd’hui de soixante-trois ans, elle ne s’en est jamais remis. “Il n’a jamais arrêté. Plizir fwa li’nn viol mwa”, raconte-t-elle, les yeux en larmes. Victime d’abus sexuel, l’enfant qu’elle était ne comprenait rien de ce qui se passait. “Mo ti ankor pe zwa larou ek kanet. Je ne savais rien de la vie. Mes parents étaient sévères et je sais qu’ils ne m’auraient jamais crue. Je ne leur ai rien raconté.” La peur au ventre, Rita se tait. Elle cache la vérité à son entourage.

Six mois après son viol, Rita découvre avec stupeur qu’elle est enceinte. “J’étais encore une enfant. Je ne savais même pas ce que c’était d’être enceinte. Mo ti pe demande ki ete sa, ansint ? C’est ma sœur qui a compris que j’étais enceinte car je n’avais pas eu mes règles pendant deux mois.” Elle ne sait pas comment réagir et quoi dire à sa grande sœur, de peur que ses parents la frappent. Cette dernière raconte tout à sa mère. “Ma mère m’a emmenée à l’hôpital. Le médecin nous a révélé que j’étais enceinte de deux mois. Sa kalite bate mo’nn gagne la !”

“Kot li gagne li ti pe viol mwa”.
Rita révèle à ses parents que son voisin l’avait violé, mais ce dernier leur affirme qu’elle était consentante. “Mes parents et mes proches ont été catégoriques. Ils m’ont dit : to fer seki to kontan me to bizin marye ar sa boug-la !” Ses parents la forcent à se marier avec cet homme. Elle se marie à 19 ans. Six enfants naissent de cette union. “Même aujourd’hui, ma mère pense que c’était voulu.”

Tout commence quand Rita se retrouve seule quand sa mère la laisse à la maison. Après avoir quitté l’école comme toutes les filles de son âge, elle aide sa famille. Elle fait le ménage et s’occupe de son petit frère, entre autres. Bienveillante, elle donne un coup de main à la mère de son voisin. Âgé de 18 ans, ce dernier la surprend un jour : “Il a déchiré ma culotte et li’nn pran enn lorye pou bar mo labous pou pa tann mwa kriye.” Le jeune homme a attendu que sa mère ne soit pas à la maison et a abusé d’elle. “Innocemment, je suis partie chez lui. Je ne me doutais pas ce qu’il avait en tête. À chaque fois, il me regardait venir chez lui pour aider sa mère. Nous ne nous parlions que rarement”, raconte-elle en écrasant une larme. Son petit manège a duré six mois. “Il savait que j’étais seule à la maison et qu’il n’y avait personne chez moi. Kot li gagne li ti pe viol mwa. Ti koumadir lisien.”

“Il me frappait tous les jours”.
Après son mariage, son cauchemar ne prend pas fin. Pendant 40 ans, elle ne connaîtra pas de vie sereine avec cet homme. “Il n’a jamais été présent. Il m’utilisait uniquement pour assouvir ses besoins. Il me frappait tous les jours”, avoue-t-elle, les yeux baissés. Il ne faisait pas grand-chose et ne participait aux dépenses. “Je faisais tout pour que mes enfants aient quelque chose à manger. Je confectionnais des vêtements et mo ti pe vann zasar. Mo ti pe triyange. Sinon, j’allais demander aux voisins.” Ses enfants et elle sont contraints de demeurer sans électricité et sans fourniture d’eau. Ils vivent dans des conditions presque inhumaines.

Avec l’âge, elle prend conscience de l’ampleur des choses. “Mo ti koumadir enn femel lisien”, raconte celle qui depuis l’enfance a connu la misère. Son mari continue à la persécuter sexuellement. “Mon mari m’a sodomisée à plusieurs reprises. J’ai dû subir une intervention chirurgicale. Il m’attachait au lit et me frappait durant l’acte sexuel. Il m’obligeait à regarder du porno pou fer parey kouma dan fim. Tousala mo’nn traverse.”

Soulagement.
Son agression sexuelle a de lourdes conséquences. Elle souffre de troubles mentaux. “J’en avais tellement marre de cette vie que j’étais prête à tout quitter. Mais j’ai pensé à mes enfants puisqu’il ne s’occupait de rien”, dit celle qui a dû arrêter l’école à 11 ans, faute d’argent. Les parents de Rita avaient favorisé sa grande sœur. “Elle a été au collège. Mon père l’a toujours poussée à aller loin dans la vie, mais n’a pas pris la peine de savoir si ses autres enfants pouvaient réussir à l’école. Si j’avais continué l’école, j’aurais eu un destin différent.”

Après la mort de son mari, il y a quatre ans, Rita est soulagée. “C’est un soulagement pour moi maintenant qu’il n’est plus de ce monde. Je suis enfin libérée. Je peux enfin souffler. Mo lev mo lame set fwa o siel.” Elle affirme qu’elle n’éprouve aucun sentiment pour les hommes. “J’ai deux fils. Je les aime, mais sans plus. Je n’arrive pas à les aimer comme une mère”, dit-elle en éclatant en sanglots. “Qu’est-ce que j’ai bien pu faire pour mériter tout cela ? Je n’ai jamais été heureuse. Depuis l’enfance jusqu’à l’âge adulte, je n’ai connu que des souffrances. Lorsque je vois les jeunes filles s’amouracher des garçons, je me dis qu’à leur place, je n’aurais pas fait cela. Je ne me serais pas mariée.”

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