La campagne contre l’accord de pêche avec l’Union européenne (UE) prend de l’ampleur avec l’arrivée du SY Rainbow Warrior de Greenpeace cette semaine. La coalition regroupant Rezistans ek Alternativ, le Syndicat des Pêcheurs, entre autres, veut profiter de la présence des militants écologistes à Maurice pour connaître l’état des ressources marines dans notre Zone économique exclusive (ZEE). Dans la foulée, le gel de l’accord avec l’UE et la mise en place d’un Maritime Audit Committee sont réclamés.
« Le secteur de la pêche passe par une crise sérieuse et au lieu de trouver des solutions, le gouvernement signe un accord avec l’UE pour exploiter nos ressources. » C’est en ces termes qu’Ashok Subron décrit ce qu’il considère comme une « aberration ». Chiffres de Statistics Mauritius à l’appui, il démontre que le stock de poisson dans notre ZEE a considérablement diminué ces dernières années. Ce qu’il considère comme une « terrible dégradation ». Selon ces mêmes chiffres, en 2002, la production de poissons hors lagon, principalement le thon, était de 7 021 tonnes. En 2010, elle est passée à 2 822 tonnes.
D’autre part, la production totale de poissons pour les premiers six mois de 2012 par rapport à la même période l’année dernière démontre une baisse de 28,8 %. La pêche côtière en particulier a, elle, connu une baisse de 15,7 %. « En parallèle, il y a eu une augmentation drastique du prix du poisson sur le marché local. »
Le porte-parole de la coalition se demande comment dans une telle conjoncture, le pays peut signer un accord pour autoriser l’UE à pêcher 5 500 tonnes dans nos mers. En se basant sur les frais de 2 millions d’euros par an que paiera l’UE pour cette exploitation, Ashok Subron vient à la conclusion que « Maurice est en train de vendre le thon à Rs 2,28 le demi-kilo à l’UE, alors que le consommateur mauricien en achète à Rs 100 le demi-kilo au supermarché. Cela équivaut à une braderie de nos ressources ».
La coalition demande ainsi le gel de l’accord de pêche avec l’UE. Elle réitère également sa requête pour la mise sur pied d’une Maritime Audit Committee d’urgence, afin de faire un assessment de nos ressources marines. « Ce n’est qu’à partir de cet exercice qu’on pourra mettre en place une vraie économie bleue. Tel qu’on le conçoit aujourd’hui, cela ne rapporte rien au pays ni au peuple. »
Il se demande de quelle économie bleue on parle quand « les marins et les pêcheurs n’ont pas de travail, le peuple achète le poisson plus cher et que la main-d’oeuvre se paie à Rs 4 400 dans le seafood hub ».
La coalition est d’avis que l’État devrait allouer les finances nécessaires pour une flotte de bateaux de pêche mauriciens dans laquelle les pêcheurs et d’autres citoyens participeraient activement. « Ce sera alors à nous de décider quel type de pêche nous pratiquerons pour préserver nos ressources. » Ashok Subron estime qu’un pays comptant une ZEE de 2,3 millions de km2 devrait être pleinement autosuffisant en poissons, au lieu d’avoir à en importer. Il souhaite que le prochain budget prévoit une National Fishing Line.
Le mouvement aura l’occasion de discuter de tous ces points avec les militants de Greenpeace qui seront à Maurice ce week-end. Ces derniers ont réalisé une étude sur l’impact des thoniers senneurs dans l’océan Indien. Par ailleurs, une campagne de sensibilisation d’envergure sera aussi menée afin que les citoyens soient au courant de la situation.
Un atelier de travail regroupant les organisations de pêcheurs, les mouvements écologistes, les associations de consommateurs et les syndicats, entre autres se tiendra le 24 octobre à la Maritime Academy à Pointe-aux-Sables. La marche à suivre sera décidée à partir de cette rencontre. Une grande manifestation n’est pas à exclure.
PÊCHE: La résistance contre l’accord avec l’UE s’intensifie
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