Le mauvais « goal keeper » du MSM

Le Speaker s’est senti offensé parce que le député Rajesh Bhagwan l’a traité, lors d’une conférence de presse tenue hors du Parlement, d’agent politique du MSM agissant sur les ordres de Pravind Jugnuath. Pour avoir offensé le Speaker, le député mauve a été « named » et suspendu du Parlement pour cinq séances.

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La déclaration qui a offensé le Speaker a été faite lors d’une conférence de presse de l’opposition pour dénoncer le même Speaker qui avait rejeté la PNQ de son leader posée au Premier ministre. Arvind Boolell voulait savoir le nombre de parcelles de terres de l’État vendues ou louées à l’entrepreneur Vinash Gopee, le nombre de ses immeubles loués par des institutions étatiques, ainsi que les contrats du gouvernement dont lui ou ses sociétés ont bénéficié. Cette PNQ d’intérêt public – puisque s’agissant de terres, de locations ou de contrats de l’État – a été tout simplement rejetée par le Speaker. Dans les milieux des affaires et de la politique, l’entrepreneur en question est surnommé le « blue eye boy du MSM ». Par conséquent, le fait que le Speaker interdise la PNQ, dont la réponse ne pouvait qu’embarrasser le Premier ministre et leader du MSM, peut être objectivement interprété comme une tentative de protéger le parti du soleil. C’est ce que fait, d’ailleurs, le Speaker à chaque séance de l’Assemblée législative et que ceux qui suivent les émissions de la chaîne parlementaire constatent chaque semaine. Cette attitude partisane du Speaker lui a d’ailleurs valu le surnom, tout à fait approprié, de « goal keeper du gouvernement ». Finalement, Rajesh Bhagwan n’a fait que dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas.

Le problème des agents politiques en général – et du goal keeper du MSM, en particulier –, c’est que pour essayer de protéger leurs dirigeants, ils en font trop. L’interdiction de la PNQ d’Arvind Boolell a donné l’occasion à l’opposition de tenir une conférence de presse, avec des détails qu’elle n’aurait pas pu donner au Parlement. L’interdiction de la PNQ et la conférence de presse ont permis d’attirer l’attention sur le « blue eye boy du MSM » dont la réussite a été, pour dire le moins, fulgurante dans ce pays où les entrepreneurs se plaignent du red tape et des lenteurs administratives pour obtenir les permis nécessaires.

On a appris, par exemple, qu’alors que ses concurrents ont de la peine à louer leurs immeubles, lui a réussi l’exploit de louer cinq étages d’un de ses bâtiments à Ébène, à l’Economic Development Board (EDB), pour dix ans, à Rs 4,1 M par mois. Selon le leader de l’Opposition, « le contrat entre l’EDB et Gopee a été signé bien avant la construction du bâtiment. » Mais ce n’est pas tout, « le bue eye boy » a loué plusieurs autres étages du même bâtiment à la Financial Services Commission (FSC) qui paie déjà la location à Rs 4,6 M mensuellement depuis janvier, sans occuper le bâtiment ! Ce n’est pas fini : d’autres étages du même bâtiment ont été vendus à la State Bank of Mauritius (SBM) pour la somme de Rs 600 millions avant même le début de travaux de construction ! Et ce, alors que la SBM possède déjà un terrain d’un arpent à Ébène ! Il est à souligner que ces trois acheteurs ou locataires du « bleu eye boy » sont des institutions dans lesquelles l’État est représenté dans les conseils d’administration. Mais l’opposition n’a pas parlé que du bâtiment d’Ébène lors de sa conférence de presse, elle a aussi souligné certains autres projets ou réalisations du « blue eye boy du MSM ». Par exemple, l’hôpital-hôtel-bloc d’appartements Royal Green dont le permis a été donné par la Tourism Authority, présidé par M. Gopee. Une réalisation qui a des projets d’expansion avec le terrain destiné au Centre culturel tamoul, que le gouvernement vient de reprendre. Il y a aussi, dans le portefeuille de cet entrepreneur à nul autre pareil, les 60 bungalows du projet Asmara Beachfront Residences dans l’Ouest. Selon l’opposition, la loi a même été amendée pour permettre au promoteur de vendre à des étrangers des bungalows construits sur des terres de l’État.

C’est, sans doute, pour éviter que le détail des projets /réalisations du « blue eye boy du MSM », et des appuis dont il a bénéficiés pour les concrétiser, qui a poussé le goal keeper orange à interdire la PNQ. Mais ce faisant, il a obtenu le contraire de ce qu’il souhaitait. Au lieu du silence sur le catalogue du « blue eye boy du MSM », il n’a fait que braquer le projecteur sur lui. La preuve : depuis l’interdiction de la question sur Avinash Gopee, on ne parle que de lui et de sa réussite phénoménale. Une réussite que l’on ne s’explique pas dans le milieu des affaires eu égard aux énormes investissements qu’elle a nécessités. Ce qui mène à la question suivante : est-ce que c’est « le blue eyed boy du MSM » que le goal keeper a essayé de protéger ou ses bailleurs de fonds secrets ? En attendant la réponse, on peut déjà dire, avec les réactions suscitées par l’interdiction de PNQ de mardi dernier, que le MSM a un bien mauvais goal keeper !

Jean-Claude Antoine

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