Stupeur le samedi 7 octobre 2023 lorsque nous apprenons les attaques et les infiltrations du Hamas en Israël. Lors de toutes attaques, guerres et explosions, comme c’est le cas en Ukraine et en Russie, et ailleurs aussi, le monde est ébranlé et choqué devant les dégâts causés et surtout les pertes humaines, quel que soit le pays concerné. Mais le sentiment d’horreur est d’autant plus fort lorsque les endroits évoqués sont familiers.
Ni Tel-Aviv ni la bande de Gaza ne faisaient partie des pèlerinages auxquels je me suis jointe, et c’est le coeur plein d’allégresse que j’ai foulé la Terre Sainte avec d’autres Mauriciens en octobre 2019 la première fois, puis fin avril-début mai 2023 la deuxième fois.
Ce sol, qui parle à tant d’âmes, qui secoue tout notre être et qui bouleverse nos certitudes, est vulnérable depuis si longtemps. Les tensions et les conflits datent de Mathusalem.
Israël est puissant, c’est vrai ; la Palestine est sous contrôle, cela aussi est vrai. La tension est palpable même si, en tant que pèlerins, nous nous sentions jusque-là en sécurité. Mais vivre dans des conditions de frictions et de malaise quotidiennement est comme vivre dans un tempo sans soupape : un jour ou l’autre, tout explose, tout vacille !
Bien qu’il faille comprendre l’origine du conflit persistant dans cette région du monde, il serait presque impossible de comprendre parfaitement le conflit israélo-palestinien, dont les peuples sont imbriqués dans une question complexe de territoires occupés. Ce carnet n’est le lieu ni de jugement ni de condamnation sur ce qui s’y passe. Mais ces deux pays laissent des traces en chaque personne qui les traverse, ce qui donne ces jours-ci à ceux qui y sont allés, une place à l’inquiétude et aux souvenirs des jours passés là-bas.
Outre de regarder et de lire les informations internationales pour savoir comment évolue la situation et ce qui s’y déroule quotidiennement, ce conflit interpelle de manière significative.
Car là-bas, ce qui émerveille, c’est le visage des religions monothéistes qui façonne cette Terre qui aujourd’hui pleure. Là-bas, c’est justement l’injustice des peuples en difficulté qui réveille le trop-plein. En cette terre, c’est injustement qu’on met dans le même panier tous les Juifs. À l’intérieur de ces populations, il ne faut pas loger tout le monde à la même enseigne. Des deux côtés, il y a des bons et des censés. Des deux côtés, la tristesse et le désespoir sont palpables depuis samedi.
C’est aussi là-bas qu’on entend résonner cloches d’églises, adhan des mosquées et shofar. C’est là-bas que beaucoup prient avec foi, ardeur et force, un seul Dieu, unique. C’est en cette Terre qui saigne qu’on espère le plus trouver paix, entente et entraide. Pourtant, le sang de martyres pénètre le sol tel des tentacules qui s’y infiltrent ; des taches rouges s’imprègnent dans la pierre ; les cris de douleur déchirent la nuit ; le silence pèse et les roquettes effraient. Ces dernières illuminent le ciel avant d’assombrir le sol sous des amas de débris. L’angoisse et la peur règnent. Les menaces perdurent.
C’est avec peine que nous regardons défiler les images dans les lieux ciblés. Les immeubles détruits, les prises d’otages, les gens qui se sauvent, qui se cachent, des corps qui reposent en plein air dans cette guerre, des victimes des deux côtés…
Dieu merci, en une semaine, je n’ai entendu personne dire : “Regarde où mène la religion.” Ceux qui ne ramenaient ce conflit qu’à une question de croyances ont enfin compris que le problème est bien plus complexe.
Et nous, Mauriciens, nous prierons pour que tous nos compatriotes qui étaient bloqués en cette terre, meurtrie ces jours-ci, reviennent sains et saufs.
Qu’adviendra-t-il de cette Terre de lait et de miel, lieu de rencontres de touristes et de nombreux pèlerins assoiffés de découvertes, d’aventures ou de spirituel ? Que deviendront ces peuples blessés, meurtris ? Quel avenir pour les innocents ? Quel désarroi pour les victimes et leurs familles ! Quelle profonde souffrance !
Une sale guerre (re)commence là-bas. La misère humaine habite les deux pays, des enfants pleurent, des femmes désespèrent, des jeunes sont au front et des personnes âgées sont démunies.
De loin, nous pouvons prier et espérer que la paix s’ancre en ce lieu.
Que ceux qui le peuvent pensent à protéger les plus faibles ; que ceux qui s’apprêtent à tuer regardent d’abord leurs parents, femmes et enfants ; que ceux qui projettent d’éliminer et de détruire pensent plutôt à construire qu’à faire disparaître ; que ceux qui sont profondément touchés pensent déjà à panser !
Ces pays, la Terre Sainte pour certains, pleurent et saignent. La violence de ce que les confinements dus au Covid nous ont fait subir n’a pas été suffisante pour comprendre ce qui est essentiel. Comme quoi, le temps passe, l’histoire s’écrit et l’homme reste un loup pour l’homme. Malgré l’horreur du sang qui coule et le désespoir que la violence cause, l’homme est encore capable de donner un coup de couteau dans le dos de son frère.
Le monde est ébranlé, le sol tremble sous les chocs, la terre pleure, le sang coule, des cœurs sont brisés.
Et la Terre saigne en pleine poitrine.