— Tu as vu ça toi : l’ex-ministre des Finances est au cachot ! Comme l’a dit un journal, il a commencé son parcours à la Sorbonne pour le terminer en prison !
— Mais d’après ce que j’ai entendu, il n’y a pas seulement lui qu’on a arrêté : il y a également l’ex-gouverneur de la Banque de Maurice et l’ex CEO de la MIC. Trois grands responsables des finances à Maurice.
— Mais pour quelle raison est-ce qu’on a arrêté l’ex-Grand Argentier et les autres ?
— C’est dans le cadre de l’enquête sur l’achat de l’hôtel Apavou par la MIC.
— Qu’est-ce qui s’est passé au cours de cette vente ?
— Ne me dis pas que tu n’es pas au courant : c’est dans tous les journaux, sur tous les réseaux sociaux et les radios, même la MBC en a parlé !
— Tu sais bien que je ne suis pas, comme toi, branchée sur internet matin, midi et soir !
— Je ne suis pas branchée tout le temps sur internet, mais je suis ce qui se passe dans l’actualité. Je me tiens au courant.
— Puisque tu es au courant, alors, explique-moi cette histoire de vente-là.
— La MIC, la Mauritius Investment Corporation, a été crée par le ministère des Finances, avec l’argent de la Banque de Maurice pour venir en aide aux entreprises en difficulté à cause du Covid.
— Et alors ?
— Et alors la MIC a racheté l’hôtel Apavou
— Si l’hôtel était en difficulté, la MIC n’a fait que son travail. Où est le problème ?
— Le problème, c’est qu’il y a eu une différence entre la somme votée pour l’achat et la somme qui a été payée.
— C’est une grosse différence ?
— Un peu : elle est de trois cents mille…
—… trois cents mille roupies ? Tu sais dans ce genre de transactions ça ne représente pas grand-chose…
—… mais laisse-moi finir ma phrase avant de faire des commentaires, foutour va ! La différence n’est pas de trois cents mille roupies…
—… elle est de combien alors ?
—… arrête de me couper, foutour va ! Écoute-moi bien : la différence entre le prix de vente accepté par le board de la MIC et le prix payé est de trois cents millions de roupies !
— Combien tu viens de dire ?!
— Trois cents millions de roupies !
— Trois cents millions ! Hey toi la ! Mais dis-moi un coup : quand est-ce qu’on a découvert cette « différence » de trois cents millions là ?
— Il y a quelques jours dans la cadre de l’enquête que la Financial Crime Commission a ouverte sur cette vente.
— Et la vente et le paiement avec la « différence », ils ont eu lieu quand ?
— L’année dernière, bien avant les élections.
— Si j’ai bien compris, si c’est l’ancien gouvernement qui avait remporté les élections, il n’y aurait pas eu d’enquête sur cette vente d’hôtel.
— Tu as tout compris.
— Très bien, mais il y a a une affaire que je ne comprends pas. Quand est-ce qu’on a découvert la « différence » entre le prix accepté et le prix payé ?
— Je te l’ai dit : dans le courant de l’enquête. Quand un ancien membre du board a dit qu’il pensait qu’on avait falsifié les procès-verbaux du board de la MIC.
— Ah bon ?! Et c’est en 2025 qu’il se rend compte de ça, alors que la vente a eu lieu en 2024 ? Est-ce que les membres des boards ne sont pas supposés lire les procès-verbaux de leurs réunions et décisions avant de les approuver ?
— Franchement te dire moi aussi je me pose cette question. Espérons que l’enquête en cours va expliquer tout ça.
— Pourquoi est-ce qu’on a arrêté et mis en prison l’ex-Grand Argentier ? Qu’est-ce qu’il a affaire avec la vente de l’hôtel ?
— Depuis le début de l’enquête, il y a des rumeurs selon lesquels les instructions pour faire passer les trois cents millions de plus de la vente venaient d’en haut. De très haut même.
— Comme tu le sais aussi bien que moi : Maurice est l’île des rumeurs…
— Mais on dirait que les enquêteurs ont eu des preuves solides pour arrêter et emprisonner l’ex-Grand Argentier, accusé d’avoir utilisé sa position pour faire une fraude.
— Quelle preuves solides ?
— Il paraît que l’ex-gouverneur de la Banque de Maurice aurait déclaré que Savate Dodo lui aurait donné des instructions « pou faire travay-la » à propos des trois cents millions de roupies de différence !
— Ayo Mama ! Un ex-gouverneur de la Banque de Maurice qui affirme que l’ex-ministre des Finances lui a donné des instructions pour commettre une fraude ! Quand les investisseurs étrangers vont apprendre ça, ils vont bourrer en désordre !
— Ça, c’était avant. C’était l’ancien gouvernement. C’est maintenant qu’on est en train d’ouvrir les dossiers et les enquêtes. C’est ça la différence avec le nouveau gouvernement !
— Espérons qu’il ne va pas avoir la tentation de faire pareil qu’avant ! Tu vois, c’est maintenant que je comprends une affaire !
— Quelle affaire ?
— Maintenant je comprends pourquoi Maurice avait été mise sur la liste grise des paradis fiscaux sous le règne du précédent gouvernement !
J.-C.A.