- Première réunion du comité ministériel, présidé par le Minister Mentor, SAJ, mercredi dernier, après l’unique séance de travail du 11 septembre pour toute l’année 2017
- Un Parlement à 80 députés avec 62 élus au suffrage universel dans les 21 circonscriptions, complété avec la nomination de 18 parlementaires par l’Electoral Supervisory Commission après le scrutin
- Proposition sur la table de discussions : la répartition de ces 18 membres nommés ne devrait en aucune manière modifier le rapport des forces issu des urnes
- Redécoupage électoral: Public Hearing à la Commission électorale, hier, en vue du rapport de l’Electoral Boundaries Commission du mois d’août
A vingt mois de l’échéance du mandat du présent gouvernement, le projet de réforme électorale, l’un des dossiers constitutionnels les plus délicats de ces 50 ans d’indépendance, avance à pas de tortue. C’est du moins l’impression qui se dégage avec la confirmation officielle qu’en 2017, le comité ministériel, présidé par le Minister Mentor, Sir Anerood Jugnauth, ne s’est réuni qu’une seule fois. Pourtant, l’urgence se fait sentir dans la mesure où le Constitutional Case logé en Cour suprême par Rezistans & Alternativ contre la déclaration d’appartenance ethnique des candidats à des élections générales attend les propositions élaborées par le gouvernement. Les indications recueillies de sources autorisées, après la réunion ministérielle de mercredi dernier, laissent comprendre que la proposition sur la table de discussions est encore très loin de faire l’unanimité. Pour ce qui est du volet de la réforme portant sur le financement des partis politiques, le gouvernement prévoit dans le meilleur des scénarios que des consultations sur le texte de loi pourraient avoir lieu cette année. De son côté, la Commission électorale a procédé, hier, à des séances d’audition publique dans le cadre des préparatifs en vue de soumettre vers août prochain le rapport de l’Electoral Boundaries Commission sur le redécoupage des circonscriptions.
La réforme du système électorale avec principalement l’élimination du Best Loser System et de son remplacement dans un Best Case Scenario par une dose de proportionnelle comme c’est le cas pour le scrutin de l’Assemblée régionale de Rodfrigues, semble marquer le pas. Ainsi, pour l’année 2017, le comité sur la réforme électorale, confiée à sir Anerood Jugnauth, ne s’est rencontré qu’une seule fois, soit le 11 septembre de l’année dernière, même si les membres ont eu des consultations informelles. Compte tenu du calendrier politique, une séance de travail a été convoquée mercredi dernier avec une autre annoncée pour le mois prochain.
Le principal item inscrit à l’agenda demeure la formule de remplacement du système électoral, constituant un quasi-acte de décès du Best Loser System. Avec le Ruling du Comité des Droits de l’Homme des Nations unies en faveur de Rezistans & Alternativ et l’engagement pris par le gouvernement pour éliminer la déclaration d’appartenance ethnique lors du Nomination Day des élections générales, des amendements à la Constitution s’imposent avant les prochaines électorales.
A l’Assemblée nationale, mardi dernier, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a “morde sufle” à ce sujet. Suite à une interpellation supplémentaire du député travailliste Arvind Boolell, il a déclaré : “I am not boasting that we will come before this House with such and such Bill. But we will see, so be patient. We are working. It is a complex issue. The electoral reform! The Honourable Member is talking about the case of Rezistans ek Alternativ, we all know that. We all know what the difficulty that the former Government had in order to come forward with an amendment and what were the objections to the amendment. So, I won’t go into that. So, let us work and try to see whether we can come to a conclusion. I will leave the Committee to keep on its work, and it will come to Cabinet and eventually, obviously, we will decide on this.”
Risque d’échec politique
Concrètement la réponse fournie par le Premier ministre par rapport à des amendements constitutionnels peut difficilement satisfaire l’attente sur le plan politique. Toutefois, des recoupements d’informations effectués par Week-End dans des cercles autorisés à l’Hôtel du gouvernement indiquent que les propositions abordées jusqu’ici lors des délibérations du comité ministériel pourront difficilement faire l’unanimité entre les partis politiques, représentés à l’Assemblée nationale pour déboucher sur cette majorité des trois quarts incontournable pour faire adopter la réforme du système électoral dans la sérénité avant le prochain scrutin.
Week-End a appris que le gouvernement pourrait opter pour une Assemblée nationale à 80 membres. Attention, à partir de là, le risque d’échec politique que comporte cette démarche va crescendo. Ainsi, le nombre de circonscriptions devrait rester le même, soit 20 à Maurice et Rodrigues, avec trois députés élus par circonscription à Maurice et deux à Rodrigues, comme c’est le cas actuellement, donnant 62 pour le premier Limb de First Past the Post.
Puis devra intervenir la répartition des 18 sièges restants pour compléter le Parlement new look. La position du Mentor Minister, qui est acquis à la cause du chef historique de l’Organisation du Peuple de Rodrigues (OPR), Serge Clair, contre la représentation proportionnelle, est des plus catégoriques. “Il s’appesantit sur le fait que s’il y a une différence de dix députés élus entre les blocs ou partis lors de la proclamation au suffrage universel, l’allocation des 18 sièges additionnels ne devra en aucune façon remettre en cause cet écart. “Aucunement”, font comprendre ceux qui sont privy à cette proposition, tout en concédant, en privé, que cette formule ne s’apparente en aucune façon à l’introduction d’une dose de représentation proportionnelle dans le système électoral.
Quelles sont les chances que la formule SAJ soit présentée et acceptée par une majorité constitutionnelle à l’Assemblée ? A cette question, des pundits politiques préfèrent éviter de répondre à des hypothèses politiques dans la conjoncture. Et cela même si, au fond, ils savent que des obstacles quasi-infranchissables se dressent toujours sur la voie de la réforme électorale, en citant l’exemple des Transitional Constitutional Provisions de 2014 pour ne pas enfreindre un engagement formel pris avec le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies. Du côté de Rezistans & Alternativ, l’on maintient que la bataille se joue devant la Cour suprême, même si le temps presse avec l’affaire sur la Cause List à la fin de mai. En marge de ce calendrier, Rezistans & Alternativ envisage de relancer le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies face aux manoeuvres politiques prévisibles, car “sans réforme, l’on ne devrait pas s’attendre à des Free and Fair Elections”.
Toutefois, en prélude à la présentation du nouveau système électoral, le gouvernement pourrait mettre à profit un dry run parlementaire d’ici la fin de l’année avec le Financing of Political Parties Bill. Suite au rapport soumis le 1er avril 2016 par le précédent comité, présidé par Xavier-Luc Duval sur “transparency, registration, state financing of political parties”, le gouvernement envisage d’engager des consultations entre les partis politiques sur le Draft Bill en voie d’être mis au point par les soins de l’Attorney General’s Office.
Des auditions publiques
Mais répondant à une interpellation parlementaire de Rajesh Bhagwan si “the draft Bill will be circulated, giving wide publicity, so that everybody can give their views, even those who are not in Parliament, political parties that are in Parliament, those which are outside”, le Premier ministre n’a pas été en mesure de confirmer la formule envisagée. “My personal opinion is that it should be so because it is a matter which is of great and fundamental importance, but obviously I will seek the guidance of Cabinet before proceeding with consultations”, a-t-il ajouté en indiquant que le projet de loi sur le financement des partis politiques pourrait être introduit à l’Assemblée nationale vers la fin de cette année.
D’autre part, la Commission électorale a tenu, hier, des auditions publiques sur le projet de redécoupage électoral. L’Electoral Boundaries Commision, présidée par Me Yusuf Aboobaker, Senior Counsel, en présence du Commissaire électoral, Irfan Rahman, a consigné les propositions de neuf intervenants. L’exposé de Sanjit Teelock, qui a une parfaite maîtrise en administration régionale, a retenu l’attention. Il a suggéré un redécoupage des 21 circonscriptions de la République de Maurice.
Il a soumis plusieurs représentations aux membres de la l’Electoral Boundaries Commission en ce qui concerne les changements préconisés, dont un merger des circonscriptions Nos 2 et 3 de la capitale. Il est d’avis que l’erreur d’inclure Agaléga dans la circonscription de Port-Louis Maritie/Port-Louis Est (No 3) demande à être corrigée. Il propose que Rodrigues et Agaléga constituent la 21e circonscription.
Sanjit Teelock, qui se dit en faveur du Best Loser System, a énoncé des changements majeurs dans plusieurs circonscriptions en tenant en compte de la topographie des régions concernées, mais aussi l’accès aux collectivités régionales appropriées. Plusieurs mouvements en termes des centres de vote ou encore de changement visant à basculer des régions comme bouger Richelieu du No 1 au No 20, ou encore rallier Pointe-aux-Piments et Pamplemousses et connecter Triolet à Grand-Baie, entre autres.
De son côté, le Legal Affairs Director de l’Université de Maurice, Sivaramen Subbarayan, s’est appesanti sur les disparités qui existent entre les circonscriptions : “Par exemple au No 3, les trois élus ont entre 5 000 à 6 000 mandants à gérer, représentant le nombre d’électeurs qui ont été aux urnes, alors que tel n’est pas le cas pour Savanne/Rivière Noire (No 14)”, a-t-il avancé.
L’Electoral Boundaries Commission a également pris note des suggestions sur le redécoupage électoral venant d’autres intervenants, dont Dushan Boodhena, Ramathan Venkatasawmy, Dhunvir Sadasing, D.Guddoye, Comarsamy Virasami, Vijay Chadreeka et Phalogoony Ramrekha.