Ainsi donc, ce serait à l’insu de son propre gré que trois valises ont quitté le domicile de Pravind Jugnauth, à Angus Road, Vacoas, pour se retrouver dans le bureau de Josian Deelawon, un petit entrepreneur basé à Pointe aux Canonniers. Un petit entrepreneur qui semble avoir bénéficié d’une série de bons karma – le mot à la mode ces jours-ci – puisque tout semblait lui réussir dans la vie.
Il était l’ami intime du beau-frère du Premier ministre, a participé à ses « White Parties » à l’hôtel Maradiva et avait eu l’occasion de manger avec le chef du gouvernement, bien que ce dernier ait affirmé ne pas le connaître, alors que les photographies des deux hommes prouvaient le contraire.
C’est ce que le Josian en question a déclaré en sortant du siège de la Financial Crimes Commission, où il avait été longuement interrogé. Josian Deelawon a déclaré aux enquêteurs que les valises lui auraient été remises à la demande de Pravind Jugnauth, pour être gardées en lieu sûr, par l’adjointe au maire MSM de Vacoas Phoenix que l’on surnomme “marchand culotte”. Non, ce n’est pas un joke de mauvais goût. C’est en effet le surnom de cette élue municipale du MSM qui vendait des culottes à la criée à la foire de Vacoas. Il semblerait d’ailleurs que c’est un commerce qui rapporte gros, très gros même, puisque Madame Culotte serait propriétaire de deux berlines ! Juste après avoir été libérée après avoir payé des cautions dans l’affaire des valises qui n’appartiennent pas à Pravind Jugnauth, Mme Culotte est devenue maire de Vacoas-Phoenix en remplacement du titulaire en voyage à l’étranger.
Oui, car Mme Culotte était également adjointe au maire MSM de Vacoas-Phoenix. Ce qui signifie que plus de cent jours après les 60/0 des municipalités seraient encore « gérées » par le MSM ou ce qui en reste !
Mais revenons aux valises qui sont sorties en catimini de la résidence de Pravind Jugnauth et ont été remises à Josian par Mme Culotte, à l’insu du propre gré du propriétaire des lieux.
De toute façon, on le sait désormais : quoi qu’il puisse faire et dire, Pravind Jugnauth ne faute jamais. Une de ces valises était équipée d’un tracker, une petite puce électronique qui permet à celui qui l’a placé de localiser son emplacement.
Ce qui veut dire que celui – ou celle – qui remplit la valise de montres de luxe, de devises étrangères pour une valeur de Rs 114 millions et de documents appartenant au couple Jugnauth pouvait savoir où elle se trouvait. La surveillait donc sans doute en attendant le moment de la récupérer. On laisse entendre dans les milieux bien informés que les valises gardées à Pointe aux Canonniers n’étaient pas l’exception à la règle, mais une pratique très utilisée qui met à l’abri de toute fouille policière en ayant défalqué, au préalable, les objets ou les liasses de billets dont on ne peut pas justifier la provenance, ailleurs.
Il semblerait que depuis les élections, plusieurs valises bien remplies auraient été ainsi cachées, ce qui explique que même avec des renseignements sûrs, la police ne trouve rien lors de certaines perquisitions/fouilles. À moins que ce qui reste de la cinquième colonne du MSM dans la police prévienne d’avance les concernés des opérations de la police. Certains pourraient penser qu’il s’agit de paranoïa, mais il ne faut pas oublier qu’au cours des dix dernières années, le MSM a placé ses hommes et ses femmes à divers niveaux de l’appareil d’État et qu’il serait étonnant que ceux qui ont été récompensés pour services politiques rendus par des nominations ne soient pas restés fidèles au parti du soleil, dont ils espèrent la résurrection.
Mais il semblerait que les valises n’aient pas été déplacées que sur l’ensemble du territoire mauricien. Certains prétendent que ce n’est pas seulement pour aller acheter des gadgets électroniques à une FNAC de Paris que la famille Jugnauth s’est rendue en Europe pour les fêtes de Noël. On affirme aussi que beaucoup de proches du MSM ont joué aux porte-valises à l’étranger, après les élections, en bénéficiant de solides complicités à Air Mauritius.
Il y a dix ans, on se scandalisait du nombre de valises de Lady Cotomili quittant le pays après les élections. Il paraît qu’il y en aurait eu beaucoup plus, et plus bourrées, qui ont quitté Maurice ces temps derniers. La question est de savoir si elles étaient toutes équipées d’Air Tracker et surtout de savoir qui détient le contrôle des déplacements de ces valises ?
Jean-Claude Antoine