Un héritage indigne d’un parlement digne

The figures stare at you. Really. C’est la conclusion inéluctable de l’héritage indigne légué par le Speaker sortant de l’Assemblée nationale d’une démocratie digne de ce nom. Évidemment, une démocratie ne se mesure non pas en la régularité avec laquelle les élections sont organisées. Certes, ce facteur est incontournable.

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Mais plus important demeure l’espace démocratique, qui est dégagé entre deux scrutins pour permettre à la voix de minorité de s’exprimer et surtout de se faire entendre. Même si la possibilité de se faire écouter reste tributaire de la dictature du nombre.

C’est ainsi que le système parlementaire westminstérien se vante d’être articulé autour d’un personnage clé, pas le symbole du parti Travailliste, connu comme le Speaker. La première démarche d’un Speaker, élu par ses pairs, est de se libérer du joug de son parti. Le Party Line, voire même la discipline de parti, ne doit plus faire partie de son lexique politique.

Le Speaker se doit de veiller à ce que la démocratie s’épanouisse au sens le plus large du mot. Surtout que la voix de la minorité, donc du plus faible, ne soit pas étouffée par le sens unique de la majorité arithmétique. Mais au contraire que cette minorité soit protégée face à la majorité envers et contre tout par nul autre que le Speaker.

Est-ce un fruit du hasard que the two hallmarks d’un Speaker se résument à Authority and Impartiality ? Ou encore que tout parlementaire, fraîchement élu ou chevronné, sait qu’Erskine May affirme que « confidence in the impartiality of the Speaker is described as an indispensable condition of the successful working of procedure. » Et surtout qu’avec les conventions parlementaires en vigueur pour assurer cette Impartiality of the Chair, le Speaker ne participe jamais aux débats au sein de l’hémicycle et ne vote que « only in the event of a tie ».

Mais 44 mois après son élection à la présidence de l’Assemblée nationale, quel bilan peut prétendre présenter Sooroojdev Phokeer? Lui qui passait son temps, du haut de son arrogance, à dispenser des leçons magistrales. Deux mots se disputent la préséance : Loudspeaker ou Political Goalkeeper.

Mais les deux lui vont comme un gant. Surtout qu’il a systématiquement confondu exercice d’autorité avec surtout abus de cette même autorité.

Et pire. Ce bilan chiffré des suspensions et autres procédures de Naming, sans compter le refus systématique du Speaker d’entretenir des Points of Order de l’opposition, est sans appel. Pour les 168 séances de l’Assemblée nationale depuis le 21 novembre 2019, Sooroojdev Phokeer, suite aux motions du tandem Jugnauth/Obeegadoo, a obtenu 222 séances de suspension. En tout cas, Adrien Duval, en dépit de l’accueil hostile reçu lors de son élection, jeudi, peut difficilement aspirer à battre ce record car il ne reste qu’un minimum de trois séances avant la dissolution.

Une analyse de ce tableau s’avère encore plus édifiante. À l’exception de Vikash Nuckcheddy, aucun autre parlementaire de la majorité n’a écopé de sanction de Sooroojdev Phokeer. Deux suspensions sur trois ont été infligées en 2023 et 2024, soit 79 pour les 36 séances de l’année dernière et 60 pour les 21 de l’année en cours.

La moitié des suspensions ont été appliquées à l’encontre de trois membres du MMM, Rajesh Bhagwan (50) Joanna Bérenger (30) et Paul Bérenger (26). Trois autres parlementaires du parti Travailliste, Arvin Boolell, Shakeel Mohamed et Patrick Assirvaden se partagent 65 suspensions. Comment escamoter les accusations de l’opposition que Phokeer get enn sel kote ?

Ce tableau se singularise aussi par le fait que rares sont les noms des parlementaires du PMSD. Pour ne pas dire qu’ils sont inexistants. Et dire que c’est de ces mêmes rangs du PMSD que Lakwizinn du Prime Minister’s Office a cru bon puiser les arguments pour régler les comptes de celui qui fut un fidèle indéfectible de la majorité pour marginaliser l’opposition.

En tout cas lourd est le fardeau que portera Adrien Duval dans sa démarche visant à ramener la sérénité au sein de l’hémicycle et à restaurer cette « confidence in the impartiality of the Speaker ». Saura-t-il faire preuve de sagesse et d’expérience pour reléguer au second plan son aversion pour l’alliance électorale de l’opposition ?

One must call a spade a spade. Cette remarque de Rajesh Bhagwan, à l’effet qu’il est un agent du MSM, à l’encontre de Sooroojdev Phokeer lui a valu sa dernière suspension de six séances. Adrien Duval s’est vu allouer le poste de Speaker pour les raisons que même le gamin du coin de la rue n’ignore pas.

Et pour la confirmation de son entrée en fonctions, le Speaker fait face à une équation délicate. Pour les besoins du Decorum de la Chambre, comme l’autre aimait à répéter, sa première décision par rapport aux Seating Arrangements au sein de l’hémicycle revêt toute son importance dans la conjoncture politique.

Cette décision, qui revient à lui tout seul en son âme et conscience, sera un Defining Moment pour le Speaker, dont Xavier-Luc Duval dit n’avoir rien à faire avec la nomination.

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