Les Mauriciens de foi hindoue, qui célébreront avec ferveur aujourd’hui la fête du Maha Shivaratree, seront endeuillés par ce drame qui a bouleversé le pays tout entier jeudi après-midi, et qui a fait deux morts et une quinzaine de blessés. Il est heureux que la situation d’un troisième dévot gravement blessé, qui avait été admis dans les services d’urgence, se soit améliorée, aux dires du ministre de la Santé.
Personne n’est restée insensible à ce drame, qui a ébranlé subitement le pays. Sarita Boodhoo raconte dans une interview publiée dans l’édition du jour que tous ceux qui participaient à ce moment précis à une cérémonie organisée par la Human Trust Foundation à Grand-Bassin ont fondu en larmes en apprenant la nouvelle du décès des deux jeunes dévots. Il est évident que rien n’allait plus être pareil pour la suite des célébrations autour du lac sacré. Les parties culturelles des cérémonies ont été abrégées pour faire place à des prières pour les victimes et pour le rétablissement des blessés.
Tous les responsables religieux et politiques du pays ont réagi avec sobriété dans leurs témoignages dans le respect de ce moment solennel de deuil. Cela a été le cas pour le Premier ministre, Pravind Jugnauth, qui a préféré annuler son déplacement pour Addis-Abeba, où il devait participer à la session de la réunion des chefs d’Etat des pays membres de l’Union africaine. Des questions importantes concernant le continent africain, qui est courtisé par toutes les grandes puissances, et qui est considéré comme la dernière frontière de développement économique, devaient être débattues.
Les autres politiciens, que ce soit le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, ou les leaders des partis politiques ont tous réagi à l’unisson de manière responsable. Cela a également été le cas pour les responsables de toutes les religions ainsi que pour les groupes socioculturels. Le plus déchirant était le choc brutal ressenti par ce groupe de jeunes qui, quelques minutes auparavant, se réjouissaient d’avoir réussi la première partie de leur pèlerinage en se rendant au Ganga Talao. Ils étaient plein d’énergie et fiers de leur Kawal qui, visiblement, se démarquait des autres. Cette réjouissance s’est interrompue brutalement. Le jeune Rohan Doorjean (22 ans) et Parmeshwal Dhookeea (35 ans) y ont laissé leur vie.
Comme l’ont déjà souligné plusieurs dirigeants d’associations socio-culturelles, ce drame fatal interpelle puissamment les uns et les autres sur les dispositions à prendre concernant l’organisation du pèlerinage à l’avenir. Plusieurs sont d’avis qu’une réflexion sur la définition des normes des Kawals s’avère nécessaire. L’institution d’un comité ministériel pour se pencher sur cette question est bien entendue la bienvenue.
Il est un fait que la construction des kawals dans toutes les régions de Maurice est un moment fort pour les jeunes membres des sociétés sociales ou religieuses. C’est une occasion pour eux de se mobiliser et de mettre la tête ensemble pendant parfois plus d’un mois pour construire la plus belle structure possible. Cela se passe dans une ambiance amicale et pieuse à la fois. Les uns et les autres rivalisent pour mettre en valeur leurs talents. Leur imagination est sans limite. Il n’y a qu’à voir les différentes formes de kawals en circulations sur nos routes.
Cette ambiance ne sera nullement affectée s’ils pouvaient, dès le départ, disposer de normes bien définies et bien précises pour bâtir leurs structures. S’il le faut, des règlements doivent être promulgués officiellement par les autorités de manière à ce que toute infraction soit sanctionnée et que tout kawal ne respectant pas ces données soit interdit sur nos routes. Ces informations devront être diffusées longtemps en avance. Les membres du comité national responsable de l’organisation du Maha Shivaratree pourraient s’arranger pour que le message soit transmis efficacement aux quatre coins du pays. Cela éviterait bien des problèmes routiers et bien des drames humains. Souhaitons bonne fête du Maha Shivaratree à tous les Mauriciens.
Jean Marc Poché