Champ-de-Mars : divorce dans le couple COIREC/PTP avec une injonction contre la société du magnat des paris
Jusqu’aux premières journées de la présente saison Jean Michel Lee Shim était toujours toléré dans les arcanes du pouvoir, surtout son soutien financier, quoique son aura d’homme d’affaires à succès connaissait des ratés. Mais des incidents notoires, dont l’annexion du Port Louis Tennis Club, l’agression d’un haut gradé de la People’s Turf PLC (PTP) et des accusations d’exploitation de travailleurs étrangers ont porté un rude coup à son image alors que parallèlement il se montrait moins généreux avec ses parrains du pouvoir. Ainsi, le 12 juillet dernier, une mise en demeure a été servie à la PTP, par la Côte D’Or International Racecourse and Entertainment Complex Ltd (COIREC) qui exige que la PTP cesse toute exploitation commerciale du Champ-de-Mars jusqu’à ce qu’un accord au sujet des termes et conditions soit signé. Cette démarche met en lumière un conflit croissant entre les deux organismes, révélant des tensions sous-jacentes dans le monde des courses hippiques locales et les autorités d’autant plus que les contacts répétés et suivis de l’Hôtel du Gouvernement avec le MTC visent à sauver la mise politique en vue des prochaines élections législatives.
La COIREC, investie du contrôle et de la maintenance du Champ-de-Mars par le ministère du Logement et de l’aménagement du Territoire, réitère à la PTP qu’elle lui sous-loue les deux pistes pour les besoins de son activité d’organisateur de courses de chevaux et pour l’exploitation commerciale du Champ-de-Mars, conformément à un contrat de location daté du 14 novembre 2023. Avant la signature de ce contrat, la COIREC avait déjà informé la PTP que les modalités de l’exploitation commerciale allaient être communiquées ultérieurement.
Cependant, la COIREC affirme que malgré plusieurs tentatives de communication, notamment par courriels et lettres officielles, la PTP n’a pas répondu favorablement à ses demandes. Lors d’une réunion du Board de la COIREC le 20 février 2024, Khulwant Kumar Ubheeram, Chief Executive Officer de la PTP, aurait déclaré que la PTP n’était pas d’accord pour partager les revenus de l’exploitation commerciale du Champ-de-Mars avec la COIREC, rendant la situation non-négociable.
Réaction et conséquences
Face à ce refus, la COIREC a émis une mise en demeure, exigeant que la PTP cesse toute exploitation commerciale du Champ de Mars et arrête toute gestion des parkings du site. La PTP avait un délai de 48 heures pour se conformer aux conditions, sans quoi des poursuites civiles seraient engagées.
La réponse de la PTP a été immédiate dans ses organes de presse et audio et un communiqué sur les réseaux sociaux, tout en envoyant des représentants pour riposter publiquement aux demandes de la COIREC. La PTP affirme que cette initiative de la COIREC, un organisme créé par le Premier ministre, relève de la pire provocation.
Entre-temps, l’éviction de Sooroojdev Phokeer du poste de Speaker et la reprise des rênes de l’hippisme par le MTC sont présentées comme deux des conditions préalables posées en vue d’une alliance du PMSD avec le MSM. Dans cette perspective, du côté de l’Hôtel du Gouvernement les contacts avec le MTC se multiplient en vue de camoufler l’échec flagrant de la réforme annoncée des courses hippiques, un des chevaux de bataille politique du Premier ministre.
L’accélération de ce processus est porteuse d’objectifs politiques clairs. D’abord, favoriser dans les meilleurs délais un accord électoral potentiel avec le PMSD, comme l’illustre la mise à l’écart de Phokeer au profit d’Adrien Duval. Ensuite, rassurer l’électorat turfiste en reconnaissant que la confiance aveugle placée en Lee Shim et Beekharry était une erreur monumentale. La frustration des turfistes face à une organisation jugée malsaine doit être apaisée en vue des prochaines élections générales.
Les tractations entre le Premier ministre et le président du MTC ont pris une importance accrue dès la mi-mai. Le gouvernement a envoyé des émissaires pour sonder le terrain auprès du MTC, marquant le début de nouvelles négociations. Le MTC a exigé que tout contact devait se faire directement entre le Premier ministre et le président, Gavin Glover.
Rencontres stratégiques
À la fin de mai, une première rencontre s’est déroulée entre Pravind Jugnauth et Gavin Glover, en présence d’un conseiller du bureau du Premier ministre et d’un avocat proche de Glover. Cette réunion a été précipitée par des engagements fermes pris par le PTr lors de son meeting du 1er mai pour réinstaurer le MTC dans ses droits. Le 24 mai, le MTC a publié un communiqué reconnaissant les pourparlers en cours avec le gouvernement, sans toutefois en révéler les détails.
La détérioration des relations entre le gouvernement et la People’s Turf Plc (PTP) de Jean-Michel Lee Shim a également joué un rôle crucial. Avec le soutien du PMSD, le gouvernement envisage d’expulser la PTP de l’organisation des courses en faveur du MTC. Gavin Glover a posé plusieurs conditions, notamment l’exclusion de Dev Beekharry et de Jean-Michel Lee Shim de tout comité ou organisme de décision, ainsi que la responsabilité de l’octroi des licences de gestion personnelle confiée au MTC.
Réactions internes et externes
Par contre, des membres en vue du MTC ont exprimé des opinions partagées au sujet de ces discussions, certains craignant un piège de la part du gouvernement. Cependant, Gavin Glover a défendu sa position en soulignant la nécessité d’écouter le Premier ministre. Ainsi, une fois le Blueprint finalisé, le MTC l’a soumis au gouvernement.
Les choses se sont accélérées avec l’installation aux forceps d’Adrien Duval au poste de Speaker, remplaçant Phokeer. Le jour même de cette nomination, Pravind Jugnauth a rencontré Gavin Glover pour discuter du Blueprint. Dans une tentative de dissiper des doutes au sein du MTC, le Premier ministre a annoncé la création d’un High Powered Committee pour faciliter le retour effectif du MTC au Champ-de-Mars.
La relance des courses hippiques sous l’égide du MTC est considérée comme un argument politique majeur au même titre que l’élimination de Sooroojdev Phokeer de l’hémicycle. La mise sur pied de ce High Powered Committee s’avère déterminante dans la conjoncture. En attendant, le MTC continue de réclamer des garanties solides pour éviter de répéter les erreurs du passé et assurer un avenir prometteur pour les courses hippiques à Maurice.
Les paris sont ouverts sur le départ de Lee Shim et le retour du PMSD au gouvernement…