À une semaine de la rentrée parlementaire, prévue pour le 29 mars, les membres du Public Accounts Committee (PAC), présidé par Reza Uteem, ont projeté une image positive et réconfortante des membres du Parlement. Dans l’imagination populaire, les parlementaires de la majorité et de l’opposition se regardent en chiens de faïence et se livrent à une guerre sans merci en se lançant des invectives dans l’hémicycle dans le cadre des travaux parlementaires. Cette perception s’est accentuée avec la diffusion en direct des travaux parlementaires, caractérisés parfois par l’agressivité des échanges entre certains parlementaires. La façon dont le Speaker dirige les débats et gère les tensions qui pourraient surgir parfois n’a pas contribué à améliorer cette perception.
La conférence de presse commune de jeudi dernier a démontré que les parlementaires des différents partis politiques de la majorité et de l’opposition pouvaient mettre de côté leurs différences politiques pour se pencher sur des questions d’intérêt national. « Nous avons travaillé comme une équipe », soulignent aussi bien Reza Uteem que Naveena Ramyad. « Nous avons travaillé dans l’intérêt du pays, de la bonne gouvernance et de la gestion des affaires du pays. Notre but est de vérifier les informations contenues dans le rapport du directeur de l’audit et de trouver des solutions pour améliorer les finances nationales », soulignent-ils.
Naveena Ramyad, qui rappelle que les trois pôles séparés du pouvoir sont le législatif, l’exécutif et le judiciaire, expliquait ainsi : « Le législatif vote les dotations allouées aux différents ministères et il nous revient, en tant que parlementaires, d’éplucher les remarques du directeur de l’audit sur les failles constatées lors des dépenses effectuées. » Comme définit le rapport, le rôle du PAC consiste à « examine and report on efficiency, effectiveness and economy with which ministries, government departments and other bodies had used resources put at their disposal ».
Le comité examine également la conformité aux principes de bonne gouvernance et fait un rapport « as whether value for money has been obtained when spending taxpayer’s rupee ». Sur la base de ces attributions, les membres du comité ont fait un constat accablant et sans complaisance des dépenses effectuées en lien avec le Covid-19. Les décideurs du ministère de la Santé et ceux de l’Industrie et du Commerce en prennent ainsi pour leur grade, même s’ils insistent avoir reçu des instructions de la part de leur ministre respectif. « C’est un wake up call pour les fonctionnaires », dit le Chief whip, qui souligne qu’il n’est pas dans l’intention du PAC de pratiquer un “blame game”. D’autant que ce n’est pas une instance d’investigation. Les membres du PAC ont accompli leur mission.
Mais au final, ce serait un gaspillage d’énergie si leurs constats et recommandations, et pas des moindres, devaient se terminer dans un tiroir. Nous retenons la nécessité de « enhance, clarify and codify the powers of the committee so as to increase futher its effectiveness »; que ceux qui se voient confier des fonds publics devraient être responsables de leurs actions ou inactions afin d’améliorer la gestion des finances publiques; que des modifications législatives appropriées soient apportées pour sanctionner les agents publics qui abusent ou facilitent l’utilisation abusive des fonds publics.
Plusieurs questions se posent déjà dans le public. Est-ce que les pratiques dénoncées devraient poursuivre comme si de rien n’était ? Quelles mesures prendre contre les Accounting Officers, qui disposent de tous les pouvoirs pour mener à bien les projets et décisions du gouvernement, mais qui ne respectent pas les procédures établies ? Faudrait-il prendre des sanctions ? Qui profite de ces vices de procédure ?
L’opposition politique s’est déjà saisie de toute l’affaire et demande maintenant que les ministres dont les ministères sont concernés rendent des comptes. Plus concrètement, le Ptr réclame la démission pure et simple du ministre de la Santé. « D’autres ont démissionné pour moins que ça », observe Arvin Boolell.
La balle est désormais dans le camp de l’exécutif. Le rapport du PAC constitue un vrai “wake-up call” pour tous. Il y aura du pain sur la planche pour la session parlementaire de 2022.