Le Judiciaire mauricien plébiscité à l’international

La Cour suprême de Maurice est à l’honneur en cette fin de semaine au niveau international après le jugement historique rendu par les juges Karuna Guness-Balaghee et David Chen Kan Cheong déclarant anticonstitutionnel l’article 250 du Code pénal, décriminalisant ainsi l’acte de sodomie. Ce jugement a été repris par les agences de presse internationales ainsi que par des médias ayant une diffusion mondiale, dont la BBC, en Grande-Bretagne, RFI, en France, ou les journaux ayant une réputation internationale comme Le Monde. La décision a aussi été saluée par les mouvements des droits humains ainsi que par l’Onusida, l’agence des Nations Unies chargée de la lutte contre le VIH/sida. Dans pratiquement tous les cas, la République de Maurice est citée en exemple, d’autant que dans plusieurs pays africains, une vague de répression s’abat contre les homosexuels, le tout encouragé par les extrémistes religieux.

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En Ouganda, une loi anti-homosexualité a été promulguée en mai, prévoyant de lourdes peines pour les personnes ayant des relations homosexuelles et/ou faisant la « promotion » de l’homosexualité. Cette loi répressive a été condamnée par les Nations Unies, des groupes de défense des droits humains et de nombreux pays occidentaux.

À Maurice, l’abrogation de l’article 250 du Code pénal était devenue depuis longtemps le cheval de bataille des diplomates européens. L’Union européenne ainsi que les chancelleries française, britannique, australienne ainsi que des États-Unis n’ont eu de cesse de faire pression sur le gouvernement. Cette question figurait en priorité dans les dialogues politiques avec le gouvernement et les représentants de ces pays. De plus, des ateliers de travail et des déclarations réclamant la dépénalisation de la sodomie se sont succédé.

La lutte contre la sodomie a commencé le 6 septembre 2019 lorsque Ridwan Ah Seek avait introduit une affaire en Cour suprême. Il avait par la suite été suivi par quatre autres jeunes de la communauté LGBTQIA+, à savoir Najeeb Ahmad Fokeerbux, Vipine Aubeeluck, Imesh Fallee et Jürgen Soocramanien Lasavanne. Pour eux, il s’agissait d’un héritage du passé qu’il fallait combattre avec acharnement. Ils avaient de fait demandé à la cour de faire une déclaration selon laquelle la section 250 du Code pénal de 1838 violait leurs droits et libertés fondamentaux et était inconstitutionnelle.

Il a fallu quatre ans de combat, soutenu par une équipe d’avocats de Dentons, menée par Me Pricilla Balgobin-Bhoyrul, d’une part, et par Me Gavin Glover d’autre part, pour déboucher sur le jugement de cette semaine. Les deux juges sont ainsi arrivés à la conclusion que l’article 250 (1) du Code pénal était discriminatoire envers les plaignants. « Nous constatons que l’article 250(1) du Code criminel, bien qu’ostensiblement neutre, est discriminatoire “dans son effet” à son encontre en raison de son orientation sexuelle, violant ainsi l’article 16 de la Constitution. Même si l’article 250 (1) s’applique à tous les hommes, il nie de facto au plaignant, en tant qu’homosexuel, le droit à l’expression sexuelle et à la satisfaction sexuelle de la seule manière qui lui soit accessible, c’est-à-dire par les rapports sexuels anaux, tandis que les hétérosexuels ont le droit à l’expression sexuelle de manière naturelle pour eux, c’est-à-dire par les rapports vaginaux », ont-ils observé.

Les juges ont ajouté que cet article du Code pénal « n’a pas été introduit à Maurice pour refléter les valeurs mauriciennes, mais est l’héritage de notre histoire coloniale avec la Grande-Bretagne ». Les militants des droits de l’homme considèrent que l’article 250 du Code pénal n’avait pas raison d’être dans une île Maurice moderne et démocratique. Ils soulignent que les LGBTQIA+ sont des citoyens comme les autres et doivent avoir le droit fondamental de choisir leur sexualité.

Comme l’affirme si bien Me Balgobin-Bhoyrul, « Maurice ne peut prétendre être une nation arc-en-ciel si elle n’est pas prête à accueillir toutes les différences qui composent le peuple mauricien ». Cela s’applique également pour les opinions et les prises de position d’ordre politique à l’approche des prochaines élections générales.

 

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