- Le secteur privé évalue comme étant « très minime » l’impact du passage de Berguitta sur la croissance
- Avec la flambée des prix des légumes sur le marché, des craintes exprimées de manière unanime sur un « dérapage » de l’inflation au cours des deux prochains mois
- À l’aéroport : reprise intense des opérations, Air Mauritius assurant au cours des prochaines 48 heures 45 vols (aller/retour) intercontinentaux et 48 dessertes interîles entre Maurice et Rodrigues
Depuis ce matin, Maurice, en particulier les principaux secteurs économiques du pays, est en mode de rattrapage avec les 48 heures d’interruption du passage de la tempête tropicale Berguitta. Si au sein du monde des affaires, l’on semble prendre avec philosophie les conséquences de cette interruption dans les activités de cette semaine, l’hôtel du gouvernement ne cache pas ses appréhensions devant le fait que depuis le début de l’année, le démarrage n’a pas été comme on le souhaitait en raison du temps inclément qui prévaut depuis le 2 janvier. Ainsi, avec une nouvelle Special Cabinet annoncée pour lundi, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, veut prendre la mesure de la situation et décider d’un plan d’action en vue de rattraper tout délai accumulé avec les grands chantiers envisagés.
D’un point de vue général, le secteur privé se garde d’être alarmiste sur les conséquences économiques de Berguitta. « L’on parle de deux jours d’activités économiques perdus avec cette tempête tropicale. Mais il y a l’option de rattrapage. D’ailleurs du côté de la Mauritius Export Association, l’on se penche sur un plan pour recouvrer le manque à gagner », rassure-t-on dans les rangs de Business Mauritius, qui s’est engagée dans un exercice de bilan depuis la levée de tout avertissement cyclonique.
« Selon nos prévisions, l’impact de Berguitta sur le produit intérieur brut (PIB) devrait être minime cette année. Et cela que ce soit pour le tourisme où des dispositions ont été prises, la canne à sucre où la pousse de la canne est encore jeune et susceptible de profiter de la prochaine période d’ensoleillement. Mais ce qu’il faut craindre le plus reste l’inflation, qui sera alimentée par une flambée des prix des légumes. Cela devrait durer au cours des deux prochains mois avec une stabilisation subséquente de cet indicateur économique. Les cultures vivrières ont pris un sacré coup avec le temps qu’il a fait depuis le début de l’année », souligne Raj Makoond, jusqu’à la fin de l’année dernière Executive Director de Business Mauritius et observateur attitré de l’économie à Maurice (voir détails du constat dans les principaux secteurs économiques plus loin).
D’autre part, dès la fin de toute alerte cyclonique, hier après-midi, le Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport a repris ses activités dès 18 h 30. Ainsi, la compagnie aérienne nationale, Air Mauritius, a opéré un premier vol à 23 h 30 à destination de Bangalore et Chennai. Le choix de cette desserte s’explique sur un plan humanitaire vu qu’il y avait une urgence médicale avec un bébé de trois semaines, admis en clinique, devant faire le déplacement en Inde pour des soins médicaux.
À ce matin, sauf les avions immobilisés à Mumbai et à Kuala Lumpur, devant atterrir aujourd’hui, les vols ont atterri au Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport. Avec la reprogrammation des vols, Air Mauritius prévoit d’opérer dans les prochaines 48 heures 45 vols internationaux (aller/retour) et 45 vols (aller/retour) entre Maurice et Rodrigues pour rattraper le Backlog de passagers bloqués avec la tempête Berguitta. Pour la seule desserte interîles Rodrigues/Maurice il faut compter entre 1 400 et 1 500 passagers.
La reprise des vols avec La Réunion devra intervenir dès cet après-midi avec la réouverture de l’espace aérien de ce département français. Emirates Airlines assurera trois vols aujourd’hui et trois autres vols d’Airbus A-380 pour ne pas pénaliser davantage ses passagers. Les opérations seront soutenues à l’aéroport SSR, avec Airports of Mauritius prenant des dispositions spéciales, dont des restrictions aux nonpassagers, pour faciliter les mouvements dans l’aérogare.
Business Mauritius : « Impact très minime sur le PIB »
Le passage du cyclone Berguitta, qui a provoqué deux jours entiers d’inactivité économique, aura très peu d’impact sur le Produit intérieur brut (PIB) du pays. C’est du moins ce que révèlent les premières évaluations de Business Mauritius, communiquées hier au ministère des Finances. « Nous pensons que l’impact de Berguitta sur le PIB sera très minime », a déclaré Raj Makoond, chief executive officer (CEO) de Business Mauritius, au Mauricien ce matin.
Raj Makoond indique que la direction de Business Mauritius a eu, dans la matinée d’hier, des consultations avec les dirigeants de l’Association des hôteliers et restaurateurs de l’île Maurice (AHRIM), de la Mauritius Export Association (MEXA) et de la Chambre d’agriculture, entre autres, pour un constat des dégâts qu’auraient pu causer Berguitta dans les principaux secteurs de production. Une évaluation de la situation dans le secteur sucrier fait ainsi voir que l’impact sur la production sera faible mais les observations faites par la Chambre d’agriculture sont que le secteur non-sucre a beaucoup souffert du passage du météore. « La culture vivrière a été fortement touchée », note Raj Makoond.
S’agissant du secteur manufacturier, les données recueillies par la MEXA auprès d’un certain nombre de membres indiquent que, pour les deux jours d’inactivité économique, les entreprises du secteur de l’habillement auraient dû produire environ 900 000 pièces, la valeur de la production étant estimée à environ Rs 235 millions. Au niveau des secteurs non-textile et du “seafood”, la production ratée sur les deux jours est évaluée à Rs 40 millions. « La valeur totale de la production non réalisée se chiffre à quelques Rs 275 millions. Ce ne sont pas des pertes ni un manque à gagner pour l’ensemble du secteur d’exportation car il y a possibilité de rattrapage de la production. Cependant, il y aura des coûts qui seront associés aux activités de rattrapage en termes d’heures supplémentaires et de transport, entre autres. Ces coûts pourraient, selon des calculs pointus réalisés en concertation avec le ministère des Finances, atteindre Rs 155 millions », a déclaré Lilowtee Rajmun, directrice de la MEXA. Cette dernière pense que l’organisation de la production au sein des entreprises devrait faciliter les activités de rattrapage d’ici la semaine prochaine.
Commentant la situation dans le secteur touristique, Raj Makoond fait comprendre que l’industrie a été surtout affectée par la reprogrammation des arrivées et départs des touristes, les dégâts matériels dans les établissements hôteliers n’étant pas conséquents. Dans le secteur des services, le passage de Berguitta, selon Business Mauritius, n’a pas eu de conséquences désastreuses.
Interrogé par Le Mauricien, le ministre des Services financiers et de la Bonne gouvernance, Sudhir Sesungkur, a laissé entendre qu’à première vue, le secteur du Global Business n’a pas été affecté outre mesure, bien qu’il reconnaisse que les deux jours de fermeture des bureaux ont eu une incidence sur la bonne marche de certains services administratifs. « Globalement, je dirai que le secteur se porte bien. Il s’agit d’effectuer un “finetuning” de notre stratégie », a ajouté par ailleurs Sudhir Sesungkur.
Dans les milieux de Business Mauritius, on est conscient que Berguitta a pu jouer de mauvais tours à nos infrastructures et à nos structures sociales. Raj Makoond abonde dans le même sens que le Premier ministre quant aux dégâts causés à la production vivrière et aux retombées sur l’inflation. « Nous pensons que l’impact sera temporaire et que cette production sera relancée d’ici un mois ou deux», a souligné le CEO de Business Mauritius. Ce dernier souhaite que la situation dans le pays en général retourne « très vite à la normale » et note à ce sujet « une volonté de faire les choses bouger rapidement ».
CHC Le port en attente que la mer se calme
Au niveau du port ce matin, on attendait que la mer, marquée par de grosses houles dans les environs des quais, se calme avant de reprendre les activités. « Il n’y a eu aucun dégât. Depuis ce matin, les équipements sont opérationnels. Nous procédons en ce moment à une nouvelle vérification des moteurs des portiques. Sinon, nous sommes prêts à reprendre nos activités. Nous n’attendons que la mer », a fait comprendre un cadre de la CHC ce matin. Au niveau du quai de conteneurs, deux navires qui avaient quitté les quais avant l’avertissement de classe 3 attendent le débarquement alors que d’autres navires arriveront à partir d’aujourd’hui.