Economie bleue : L’impact du changement climatique sur les activités de pêche au thon disséqué

Fabrice David : « La pêche est importante pour des raisons sociales et économiques, et nous devons aussi préserver le stock de thon » 

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Joanna Bérenger : « Pour les États côtiers comme le nôtre, l’économie bleue est un pilier de notre identité et de notre prospérité nationale »

Le thème principal de la conférence annuelle de la Sustainable Tuna Association (STA) se déroulant actuellement est consacré aux impacts du changement climatique dans le Sud-Ouest de l’océan Indien, et surtout sur les activités de l’industrie de la pêche au thon. Toutefois, le phénomène de transition climatique se fait également sentir dans tous les secteurs économiques, y compris l’agriculture, les loisirs et le tourisme.

Ainsi, le Junior Minister à l’Agro-industrie, Fabrice David, soutient que le thon est directement affecté par le changement climatique. Il intervenait à l’ouverture du séminaire Climate Change and Socio-economic Impacts on the Tuna Industry of the Indian Ocean. « Nous avons reçu il y a quelques jours la délégation européenne pour faire le suivi des différents projets qui sont financés par l’Union Européenne dans le cadre de cet accord de pêche. Celui-ci arrive à terme, selon le dernier protocole, en 2026, et j’ai exprimé à nos amis européens que je souhaite, avec les différents acteurs, entamer des négociations suffisamment tôt, parce qu’il y a certains aspects que nous souhaiterions revoir, améliorer, pour les deux parties, mais sur une logique de durabilité et de rentabilité », dit-il en évitant d’entrer dans les détails de ces consultations.

Abordant le thème du séminaire, Fabrice David maintient qu’il faut pouvoir, encore une fois, se baser sur des données scientifiques sur cette espèce migratoire qui est le thon. « C’est une espèce qui est difficile à suivre, pas souvent facile à analyser. Malheureusement, c’est une espèce qui est directement affectée par le changement climatique. C’est un poisson qui navigue dans des eaux, plutôt des eaux fraîches, et l’océan se réchauffe. Le thon recherche donc d’autres zones et d’autres routes de migrations. Nous devons analyser tout cela avec nos amis de la région océan Indien, car la pêche est importante pour des raisons sociales et économiques, et nous devons aussi préserver le stock de thon. Donc, dans le secteur de la pêche, nous avons besoin d’une collaboration régionale et internationale », ajoute-t-il.

D’autre part, il est revenu sur le fait que la pêche et l’économie bleue occuperont une place importante dans le budget national, qui sera présenté par le Premier ministre et ministre des Finances, Navin Ramgoolam.  « Les consultations ont déjà démarré et l’analyse des différents secteurs a déjà commencé. Le secteur de la pêche et de l’économie bleue, qui est appelé à devenir un nouveau pilier économique, a retenu toute l’attention technique et administrative dans le cadre de la préparation du nouveau budget du nouveau gouvernement. Nous travaillons avec tous les Stakeholders, tous les acteurs économiques, associatifs, scientifiques. Je vous rappelle que nous sommes un ministère technique, l’agro-industrie d’un côté, l’économie bleue de l’autre. Je crois fermement que le Policy Making doit se reposer sur des données scientifiques », ajoute-t-il.

Pour sa part, la Junior Minister à l’Environnement, Joanna Bérenger, a déclaré que les océans sont le cœur des écosystèmes mondiaux, régulateurs essentiels du climat, et représentent également un pilier économique important.

« Pour les États côtiers comme le nôtre, l’économie bleue est un pilier de notre identité et de notre prospérité nationale. Notre zone économique exclusive (ZEE) s’étend sur plus de deux millions de kilomètres carrés, et plus de 60 % de notre population dépendent directement ou indirectement des secteurs marins, notamment la pêche, le tourisme côtier et le transport maritime. L’industrie de la valorisation du thon représente à elle seule un peu plus de 10,5 % de notre PIB annuel, soulignant ainsi l’importance de cette activité pour notre pays », a-t-elle mis en exergue.

Malheureusement, le dérèglement climatique s’amplifie à un rythme alarmant avec des conséquences dévastatrices sur les océans du monde. La hausse des températures, l’acidification des océans et les changements dans la circulation océanique sont quelques effets du dérèglement climatique qui impactent de plein fouet le secteur de la pêche.

La durabilité de ce secteur est un sujet d’importance capitale aujourd’hui. C’est pourquoi elle salue les initiatives prises par différentes entreprises locales pour réduire leur empreinte carbone. Ces efforts de mitigation sont importants pour atténuer l’impact de nos activités économiques sur l’écosystème marin.

« Néanmoins, nous ne pouvons pas faire abstraction des autres menaces qui guettent l’industrie de la pêche. La surpêche des stocks de thon, encouragée par l’utilisation excessive et controversée des dispositifs de concentration de poissons (FAD), a également des effets dévastateurs. Les dispositifs de concentration de poissons encouragent non seulement la surpêche, mais posent également un autre problème environnemental : 40 % de ces dispositifs de concentration de poissons ne sont jamais récupérés. Ils finissent par s’échouer sur les littoraux, abîment les coraux, polluent nos eaux et sont des dangers mortels pour des espèces non ciblées par la pêche au thon.  Nous ne pouvons faire abstraction également du problème de la pêche illicite, qui, avec la surpêche, représente des facteurs aggravants du dérèglement climatique. Sur ce dernier point, nous espérons d’ailleurs pouvoir compter sur l’aide de nos pays amis, comme l’Inde, pour pouvoir mieux assurer la surveillance de notre zone économique exclusive », s’appesantit Joanna Bérenger.

« Il nous reste donc des conversations difficiles à avoir, notamment avec nos partenaires de l’Union européenne, et des décisions courageuses à prendre au niveau régional afin de relever pleinement les défis qui nous sont présentés. Les discussions au niveau de la CTOI se heurtent souvent à des divergences entre les États membres, notamment sur la répartition des quotas entre les États côtiers en développement et les nations industrialisées. Ces divergences d’opinions surviennent lorsque ces questions délicates sont abordées avec la vision de faire prévaloir les intérêts nationaux sur ceux du collectif, compromettant ainsi fortement la durabilité de l’industrie de la pêche », maintient-elle.

Par ailleurs, la Junior Minister indique que « nous poursuivrons nos efforts diplomatiques et notre coopération avec nos partenaires régionaux afin de renforcer les initiatives existantes et d’en développer de nouvelles. La résilience de l’industrie du thon dans l’océan Indien repose sur notre capacité à innover, à collaborer et à agir avec détermination. » 

De son côté, le président de la STA, Cougen Purseramen, a déclaré que les deux dernières années ont été particulièrement difficiles, avec un dispositif dans l’océan Indien entraînant de faibles prises de thon et des conditions océaniques imprévisibles qui ont plongé notre industrie dans l’incertitude. « Il ne s’agit pas seulement de comprendre, mais d’agir. Il s’agit d’une question environnementale, mais aussi d’une question commerciale et de continuité de l’industrie au sens large. Nous entendrons des experts qui partageront leurs connaissances sur la façon dont le climat affecte notre écosystème marin, mais ces connaissances ne sont pas seulement destinées à l’industrie du thon, elles doivent atteindre les gouvernements, les décideurs politiques, les scientifiques et les partenaires régionaux afin que nous puissions collaborer à la recherche de solutions », a ajouté Cougen Purseramen.

La haute commissaire de l’Australie, Kate Chamley, a fait un plaidoyer pour une collaboration élargie en vue de protéger la biodiversité marine. Le séminaire a aussi été marqué par des interventions de Giuseppe Mastrolia, Chief Executive Officer de New Princess Group, Gina Bonne, chargée de mission auprès de l’Indian Ocean Commission, Jose Maria Troncoso, chargé d’affaires et Head of Cooperation, European Union, et Kristin Tillet, Australia’s ambassador for climate change.

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