La Cour d’Appel de Londres a rejeté la dernière démarche d’Olivier Bancoult au nom du Groupement de Réfugiés Chagos contre le secrétaire d’Etat britannique au Foreign and Commonwealth Office au sujet du projet de Marine Protected Area autour de l’archipel des Chagos en excluant la base américaine de Diego Garcia. Dans un jugement motivé et rendu, hier, à Londres, le Bench de cette instance judiciaire britannique, comprenant le Master of the Rolls, Lord Dyson, Lady Justice Gloster et Lord Justice Vos, n’a pas retenu les trois principaux arguments avancés par les Chagossiens pour justifier un renversement de cette décision du gouvernement britannique. Ce jugement soutient également que le Marine Protected Area des Chagos ne constitue nullement une violation de l’article 4 (3) du Traité de l’Union européenne. L’une des rares satisfactions dans ce jugement pour les Chagossiens porte sur l’admissibilité des documents diplomatiques confidentiels et secrets de Wikileaks dans une Cour de justice. A partir de cet élément, les Chagossiens étudient avec leurs conseils légaux la possibilité de revenir à la charge devant la Cour suprême britannique pour faire prévaloir leurs droits fondamentaux après le déracinement de leur archipel natal.
Dans les attendus du jugement, la Cour d’Appel de Londres a rejeté les trois « grounds of appeal », à savoir que la décision du Foreign and Commonwealth Office était « actuated by an improper motive, namely an intention to prevent the Chagossians and their descendants from resettling in the British Indian Ocean Territory », que le Consultation Paper des Britanniques était un attrape-nigauds dans la mesure où l’interdiction de la pêche n’y était pas mentionnée et que « it was in breach of the obligations imposed on the United Kingdom under article 4 (3) of the Treaty of the European Union ».
Au sujet de la motivation du gouvernement britannique de créer le Marine Protected Area aux Chagos, la Cour d’Appel de Londres prend fait et cause en faveur du jugement contesté en appel. « The challenge is based solely on the ground that the claimant was deprived of the opportunity of (i) adducing the cable in evidence as a near-contemporaneous authentic record of the meeting of 12 May 2009 ; (ii) inviting the court to accept the contents of the cable as evidence of the truth of what was said at the meeting ; (iii) inviting the court to prefer the cable to the evidence of Mr Roberts and Ms Yeadon ; and (iv) cross-examining Mr Roberts and Ms Yeadon on the basis that the cable should be treated as an authentic document. We have already sufficiently explained why in reality (iv) was not a lost opportunity. For similar reasons, we do not consider that there is any realistic possibility that, if Mr Pleming had been able to take any of the steps in (i) to (iii), the finding of the court would have been different », note le Bench de la Cour Appel en ajoutant que « we therefore conclude that, even if the cable had been admitted in evidence, the court would have decided that the MPA was not actuated by the improper motive of intending to create an effective long-term way to prevent Chagossians and their descendants from resettling in the BIOT. In other words, the court’s ruling that the cable was not admissible had no effect on the proceedings and is not, therefore, a ground for allowing the appeal. »
Activités de pêche
Les réserves exprimées par le Groupement des Réfugiés des Chagos par rapport au Consultation paper sur le MPA des Chagos ont été balayées d’un revers de la main par le Master of the Rolls et ses deux assesseurs. La Cour d’Appel rejette le blâme et la responsabilité sur les épaules des Chagossiens et autres autorités pour n’avoir pas attiré l’attention au sujet des contraintes majeures que représente le Marine Protected Area en termes d’activités de pêche dans la zone.
« The impact of the proposed imposition of the Marine Protected Area was clearly addressed. The reality was that the terms of the consultation paper offered a clear opportunity to the Chagossians, and indeed to anyone else, to canvass the alleged fishing rights of the Chagossians as traditionally enjoyed and their alleged entitlement to preserve their historic links with, and knowledge of, fishing in Chagos Islands waters and to raise concerns that the proposals might damage such links », affirment les Lords Britanniques.
« It would (or should) also have been obvious to anyone reading the paper that the proposals might affect both the continued ability of Mauritius (and indeed other flagged) vessels to fish in Chagos Islands waters under licence, and that, consequently, the livelihood of Chagossians employed on such vessels might be threatened », poursuivent-ils en faisant comprendre qu’il incombait aux Chagossiens de soulever les répercussions de l’interdiction totale de pêche dans la zone.
Toujours en termes de droits de pêche, le jugement de la Cour d’Appel de Londres fait ressortir que depuis 1973, les Chagossiens ont été tenus à l’écart et qu’il n’y a aucune preuve d’activités de pêche sur une base industrielle même avant 1973. « The reality is that, since 1973, the Chagossians had neither enjoyed, nor exercised, any rights in their capacity as Chagos Islanders to fish the BIOT waters. The evidence demonstrated that there was no history of commercial fishing in the BIOT by Chagossians, even before 1973 and certainly not after that date. Being employed as crew members on Mauritian (or other) flagged vessels, which had licences to fish the BIOT waters, cannot be equated with the exercise of “traditional fishing rights” by the Chagossians », écrivent les Lords britanniques.
Révélations ?de Wikileaks…
En ce qui concerne le troisième point d’appel, la Cour d’Appel s’est lancée dans une analyse en profondeur des dispositions du Traité de l’Union européenne notamment par rapport aux conséquences négatives du Marine Protected Area sur les « macro objectives of the promotion of economic, cultural and social development of the BIOT or the furtherance of the interests of the inhabitants of the BIOT ». « In truth the allegations are an artificial construct. The obligations in article 4 (3) of the TEU read together with articles 198 and 199 of the TFEU are looking at the big picture (…) To breach the treaty articles, the Member State would have to be shown to have done something significant to jeopardise the macro objectives of the promotion of economic, cultural and social development of the BIOT or the furtherance of the interests of the inhabitants of the BIOT. In truth, it is not the MPA that can be said to jeopardise those objectives, even if the prohibition on Chagossians living in BIOT could be said to do so. The findings made by the Divisional Court did not arguably amount to a breach of article 4 (3) of the TEU read together with articles 198 and 199 of the TFEU », conclut la Cour d’Appel.
La seule satisfaction des Chagossiens de ce jugement, qui se tient en 159 paragraphes, concerne l’admissibilité des échanges de correspondances diplomatiques entre Londres et Washington au sujet des Chagos et révélés par Wikileaks. « We would allow the appeal on the admissibility issue on the narrow basis that admitting the cable in evidence in the instant case did not violate the archive and documents of the US mission, since it had already been disclosed to the world by a third party », font-ils comprendre. Dans un premier commentaire suite à ce nouveau revers subi aux mains de la justice britannique, Olivier Bancoult, leader du Groupement des Réfugiés Chagos, a déclaré que « de concert avec nos conseils légaux, nous épluchons la teneur de ce jugement de la Cour d’Appel de Londres. Certes, le point sur les documents sur Wikileaks constitue une avancée considérable. A partir de là, nous allons évaluer la possibilité de saisir la Cour suprême. Notre seul recours reste la justice et nous allons continuer à nous battre sur ce terrain pour faire prévaloir et respecter nos droits fondamentaux ». Le Groupement des Réfugiés Chagos compte émettre ce week-end des commentaires élaborés sur ce dernier jugement.
DEVANT LA COUR D’APPEL DE LONDRES—CHAGOS: Londres obtient gain de cause sur le MPA
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