Jean Marc Poché
Les consommateurs en général et les automobilistes en particulier sont sur le qui-vive cette semaine en attendant la réunion du Petroleum Pricing Committee, qui devrait normalement se rencontrer dans le courant de la semaine. À quelle sauce les consommateurs seront-ils cuits? Au niveau des autorités, tous les regards sont tournés sur la situation internationale. L’entrée en vigueur des sanctions contre l’Iran le 4 novembre prochain, décidées par le président des Etats-Unis, donne lieu en ce moment à toutes sortes de spéculations. Aux dernières nouvelles, dans la journée d’hier, le baril tournait autour de USD 84,88, ce qui, selon les traders, est le prix le plus élevé enregistré depuis 2014.
On observe d’autre part que l’Inde, qui détient pour le moment le monopole de la fourniture en produits pétroliers pour Maurice, avait intensifié sensiblement son approvisionnement de l’Iran avant l’entrée en vigueur des sanctions, qui pourrait forcer ses raffineries à s’approvisionner ailleurs, y compris des producteurs américains qui, en passant, bénéficient également d’une hausse des prix. Sans compter l’annonce de l’Arabie Saoudite et de la Russie à l’effet qu’ils augmenteraient leur production afin d’amortir le manque à gagner que pourraient entraîner les sanctions contre l’Iran, qui est le troisième plus grand producteur de l’OPEC.
Dans la situation actuelle, à moins qu’il y ait un changement majeur dans les relations entre les Etats-Unis et l’Iran concernant le dossier nucléaire, certains traders prévoit que le prix du baril pourrait atteindre USD 100 dans les prochaines semaines. Le montant de USD 150 est même mentionné dans certains cas.
À Maurice, le ministre du Commerce, Ashit Gungah, a subtilement tiré la sonnette d’alarme ces dernières semaines en suggérant qu’une hausse des prix des produits pétroliers pourrait être inévitable. En plus des prix sur le marché international, on évoque actuellement aussi la révision de la marge de profit des revendeurs de produits pétroliers depuis la fin septembre. Le ministre se trouve de toute évidence sur la corde raide en ce moment. Le prix de l’essence, pour ne prendre qu’un exemple, qui était passé à un certain moment à Rs 52 afin de stabiliser le fonds de compensation, avait été ramené à Rs 49,65 depuis la présentation du budget. La question qui est posée actuellement est donc de savoir si les prix enregistreront une nouvelle hausse.
L’association des consommateurs, menée par Jayen Chellum, ne l’entend pas de cette oreille. « Il est inacceptable que la taxe sur le prix de l’essence soit de 135% », lance-t-il, en réclamant une baisse des prix des produits pétroliers. Il rappelle que la ponction de 4% sur le prix des produits pétroliers destinés à Build Mauritius a été transférée dans le budget du gouvernement. Ce qui fait que l’excise duty sur les produits pétroliers a enregistré une hausse de 4%, ce qui est considéré comme « exagéré ». Une manifestation est prévue demain matin pour marquer le mécontentement des consommateurs. À cela s’ajoute le fait que les derniers chiffres officiels déposés au Parlement indiquent que les taxes sur les produits pétroliers ont rapporté Rs 9 915 649 395 à l’État entre avril 2017 et mai 2018.
L’opposition s’est également mise de la partie. Le MMM a dénoncé avec force la semaine dernière le fardeau fiscal imposé sur les consommateurs, considéré comme « beaucoup trop lourd ». On sait que toute hausse de prix des carburants a un effet boomerang sur celui des autres produits ménagers. Beaucoup de commerçants, sous le prétexte d’une augmentation du fret, en profitent en effet pour augmenter leurs prix. La vigilance est donc de mise. La prochaine réunion du PPC sera de fait suivie avec beaucoup d’intérêt par la population, qui est, avec raison, insensible aux comparaisons concernant les prix pratiqués dans certains pays africains ou asiatiques, d’autant que nous ne disposons d’aucune donnée concernant la politique économique et le coût de la vie pratiqués dans ces pays. Il ne semble pas qu’une hausse des prix soit justifiable à ce stade.