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ATELIER DU SAVOIR: La langue maternelle insuffle un nouvel espoir

À l’Atelier du Savoir (SAV) de Terre de Paix, la langue maternelle est utilisée comme médium d’instruction et d’expression. Ici, les garçons et les filles confiés à l’ONG ou ayant des difficultés d’adaptation dans le mainstream, réapprennent les bases de l’apprentissage dans la langue qu’ils maîtrisent le mieux. Outre le fait que cette approche leur donne un outil pour être autonome dans la vie, ils développent également un esprit créatif. Dans cette optique, les enfants ont réalisé leurs propres livres d’histoire. Une expérience qui a donné des résultats surprenants, quand on sait que certains, à leur arrivée à SAV, n’arrivaient même pas à écrire une phrase.
Juldi soular, Samdi soy, Zistwar Pous… Ce sont quelques-uns des titres qu’on peut lire sur la couverture des livres exposés sur une table à l’Atelier du Savoir de Terre de Paix. Les auteurs ont entre 14 et 16 ans et c’est la première fois qu’ils sont amenés à écrire une histoire. Une expérience enrichissante et difficile à la fois, car il fallait faire appel à son imagination et sa créativité. Chose à laquelle ils n’ont pas été habitués dans leurs anciennes écoles.
Gabriel Labêche, 14 ans, a pris quatre semaines pour écrire son histoire. Il n’a pas eu de problème à chercher un sujet car il s’est inspiré de la vie d’une personne de son environnement pour écrire Juldi Soular. « Se enn misye ki mo kone. Li abitye bwar e so fami inn rezet li. Lerla mo inn anvi ekrir enn zistwar lor li. »
Comme Gabriel, plusieurs élèves ont écrit sur le thème de l’alcool. Un choix qui n’étonne guère leur animateur, Georges Legallant. « Ces enfants se sont inspirés de ce qu’ils voient autour d’eux. L’abus d’alcool est malheureusement une réalité dans leur milieu. »
Faire appel à la créativité
Jean-Dany Claire, 14 ans, aborde le sujet différemment. Il raconte l’histoire de deux amis, Meryon ek Silves, où il démontre comment parfois on peut se laisser influencer par d’autres. Il y parle également des relations familiales rendues difficiles par l’abus d’alcool. « Meryon so frer Donovan dir li aret bwar a sak fwa, me li pa ekoute. Lerla so frer aret koz ar li. » Dhiraj Goondran, lui, a choisi de s’imaginer comme un personnage de l’histoire, lorsqu’il raconte les aventures de Youyou, l’ivrogne du village dont tout le monde se moque. « Mo inn panse ki mo ti pou resanti si mo granper ti dan so plas. »
Georges Legallant intervient pour faire remarquer que les enfants ont tous trouvé des noms très créatifs pour leur personnage. Outre Juldi et Meryon, on découvre aussi Pous, Tol, Youyou… L’animateur ajoute que les garçons se sont montrés plus persévérants que les filles dans cette activité d’écriture.
Certains enfants sont allés beaucoup plus loin que leur environnement immédiat pour trouver leur sujet. À l’exemple d’Elvison Gentil, 15 ans, qui a écrit Samdi Soy. « Se zistwar enn tsunami. Ti ena enn garson ki ti res pre ek lamer. Enn zour meteo donn alerte tsunami lerla li ek so fami bizin al kasyet lor montayn… Me alert la ti fos ! »
Dan Zistwar Alan, Jonathan Clément, 15 ans, parle d’un garçon issu d’une famille riche. « Li pa ti kontan al lekol parski so fami ti donn li tou seki li oule. » Alex Lisette, 16 ans, raconte l’histoire de Tol, un personnage recherché par la police pour le braquage d’une banque. « An realite li pa ti al laba pou kokin. Li ti vinn tir kas, me kan li arive li trouv tou so kas inn disparet. Lerla li an koler. » Avec cette histoire, le jeune Alex va même plus loin et aborde la question de la brutalité policière.
Michaël Menes, 15 ans, a choisi, lui, de raconter l’histoire d’un mauvais voisin. « Li pa kontan zanfan ditou. Sak fwa zanfan zwe boul lor sime li zour zot… »
Redonner confiance
Toutes ces histoires sont loin d’être anodines, précise Georges Legallant. Les enfants écrivent sur ce qui les marque. Ce qui vient confirmer la pertinence de cette activité, car l’écriture les libère en même temps. D’autre part, le fait d’écrire dans une langue qu’ils maîtrisent redonne confiance à ces jeunes qui ont expérimenté l’échec dans le mainstream. « Ils redécouvrent le plaisir de la lecture et de l’écriture. »
Mais cela ne se fait pas aussi facilement, précise Georges Legallant. Lorsqu’ils arrivent à SAV, les enfants ont souvent des réticences à apprendre en kreol. Les préjugés existant dans la société ne les aident pas non plus. C’est avec le temps qu’ils découvrent toute l’importance de la langue maternelle.
La réalisation de ces livrets vise à permettre aux jeunes de développer leur créativité. Non seulement au niveau de l’écriture, mais aussi au niveau des dessins. Car les livres sont illustrés par les enfants eux-mêmes.
L’année dernière, les jeunes devaient conceptualiser une affiche, comme travail de créativité. Cette année, l’accent a été mis sur les histoires, car pour Georges Legallant, « il n’y a pas suffisamment de livres écrits par les enfants pour les enfants. »
Ces livrets seront gardés dans la collection de SAV. Georges Legallant souhaite qu’un jour ils puissent être publiés. « Il ne faut pas oublier que l’histoire c’est notre patrimoine », dit-il.
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Extraits
Zistwar Pous

Ti ena enn fwa, enn soular ki ti apel Pous
Pous ti kontan bwar
Pa ti kontan travay
Pous touletan kontan demande
Enn zour Pous pe asiz lor sime
Pous kriye : Misye donn mwa 10 roupi ar ou
Misye la reponn : Ou kone ena enn zafer ki appel travay ?
(Kevin Levaillant)

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