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ASSEMBLÉE NATIONALE: Paul Bérenger établit les dix scandales de l’heure

Pour la Private Notice Question de la reprise des travaux de l’Assemblée nationale en fin de matinée, le leader de l’opposition, Paul Bérenger, a établi une liste des dix scandales du moment, même si la liste de tous les scandales qui ont éclaté aurait pu couvrir pas moins de trois pages pour le libellé de l’interpellation. Néanmoins, les informations ou détails, en particulier les conclusions des enquêtes ou encore les mesures ou sanctions, n’ont pas été forthcoming dans la mesure où ces dossiers font l’objet d’enquête à l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) ou encore à la police. De ce fait, le Premier ministre, Navin Ramgoolam, a trouvé qu’il serait inapproprié de sa part de commenter ces affaires. Il a saisi cette occasion pour revenir à la thèse qu’il faut laisser les institutions, plus particulièrement l’ICAC, travailler en toute indépendance et sans pression.
Pour cette PNQ de la rentrée, c’est cependant le Speakership de l’Assemblée nationale qui s’est retrouvé littéralement in the line of fire. Nombreuses ont été interventions du Speaker, Kailash Purryag, suite aux interpellations parlementaires pour rappeler que la teneur ne relève pas des responsabilités du Premier ministre mais bien d’un autre ministre. Devant ces prises de position multiples du président de l’Assemblée nationale, Paul Bérenger devait lâcher sur un ton mi-figue mi-raisin : « Mo ti bizin poz mo PNQ au Speaker. Ti a pli fasil ! »
Pour cette première partie des travaux parlementaires, le mood était relativement “bon garçon” avec de multiples pointes de l’opposition à l’adresse de cibles privilégiées, dont Nita Deerpalsing. Celle-ci a été proposée par le Leader of the House pour accéder aux fonctions de Deputy Chairman of Committees, suite au remaniement au sein du gouvernement pendant les vacances parlementaires. L’une des principales remarques adressées par l’opposition à l’encontre de Nita Deerpalsing concernait le rôle de son frère dans l’affaire de la conversation avec le Dr Zouberr Joomaye dans le parking d’un bloc d’appartements.
« Tel frer, tel ser ! » devait lancer le leader de l’Opposition au moment où le Speaker annonçait l’élection de Nita Deerpalsing. Cette dernière a également été taquinée pour n’avoir pas été choisie par le Premier ministre pour faire partie de l’équipe ministérielle. Comme pour bien confirmer sa bonhomie, Paul Bérenger n’a pas manqué de se rappeler aux bons souvenirs de Kalyanee Juggoo, qui s’était retrouvée au centre d’une controverse politique, en regrettant qu’avec les nouvelles dispositions pour les seating arrangements, elle se retrouve éloignée des travées réservées au MMM.
Force est de constater qu’avec la nouvelle majorité réduite du gouvernement, la rangée de la majorité du Speaker au sein de l’hémicycle est pratiquement vide avec seulement trois parlementaires, le Dr Rihun Hawaldar, Chief Whip, Nita Deerpalsing et Stéphanie Anquetil. Les autres blocs de strapontins sont occupés et pleins comme un oeuf.
Bérenger : Le Premier ministre peut-il obtenir du commissaire de police et du directeur général de l’ICAC les conclusions d’enquêtes sur les scandales suivants : MedPoint Infinity BPO, des pratiques de maladministration à la State Trading Corporation, l’affaire du morcellement de Rose Garden Project sur la propriété sucrière de Rose-Belle, l’appel d’offres de la Banque de Maurice pour se doter d’un Cheque Truncation System, les récents Tenders lancés par le Central Electricity Board (CEB), le contrat pour la fourniture de chlore à la Central Water Authority (CWA), les récents exercices de recrutement au Mauritius Institute of Training and Development (MITD), le recrutement d’un Liaison Officer à la Small and Medium Enterprise Development Authority (SMEDA) et les récentes déclarations du Parliamentary Private Secretary Dhiraj Khamajeet sur le recrutement dans la fonction publique ?
Bancs du gouvernement : Scandale bois de rose koté ! Li pa dans la liste ?
Ramgoolam : C’est du domaine public que l’ICAC a déjà initié des enquêtes en vue de faire la lumière sur les différents cas mentionnés par le leader de l’Opposition dans sa PNQ. L’ICAC est une institution indépendante et est régie par les dispositions de la Prevention of Corruption Act 2002. Un comité parlementaire a été institué sous cette loi. Seule cette instance a le pouvoir de soumettre un rapport pour attirer l’attention sur des lacunes. D’autre part, tous les membres du personnel de l’ICAC sont tenus d’observer scrupuleusement la confidentialité quant aux informations en leur possession dans l’exercice de leurs fonctions. La section 81 (4) autorise le directeur général de l’ICAC à révéler des informations sur le déroulement des enquêtes.
Par ailleurs, les conclusions des Further Investigations sont soumises au Directeur des Poursuites publiques (DPP). Toutes les charges logées contre des prévenus peuvent être consultées sur le site web de l’ICAC. Mon respect absolu pour les institutions fait qu’il ne serait pas approprié de ma part de faire des commentaires en général.
Pour ce qui est de la police, la loi ne m’autorise pas à m’ingérer dans les affaires de celle-ci. J’apprécie les efforts du leader de l’Opposition dans la lutte contre la fraude et la corruption. Mais je pense que nous devrions agir de manière responsable et de façon équitable. Il nous faut laisser les institutions, dont l’ICAC, travailler en toute indépendance et sans pression aucune.
Bérenger : Je n’ai pas demandé au Premier ministre de révéler les détails des enquêtes. Je ne lui ai nullement demandé de s’ingérer dans le travail de l’ICAC. Dans la série de scandales que j’ai énoncés, je voulais seulement savoir si des enquêtes ont été initiées et s’il y a des conclusions qui sont disponibles déjà ? Prenons le cas de MedPoint où le gouvernement a dépensé une somme de Rs 145 millions. Je veux tout simplement savoir si le chèque émis à cette occasion a été encaissé ? Si l’ICAC ou la State Investment Corporation, l’un des principaux actionnaires de MedPoint, se sont opposées au décaissement de cette somme ?
Ramgoolam : Malheureusement, mes démarches m’ont fait comprendre que la responsabilité d’une telle initiative revient à l’ICAC et à personne d’autre.
Bérenger : SIC has stepped in. C’est ce que révèlent mes informations. La SIC est intervenue pour empêcher que le chèque ne soit pas encaissé.
Ramgoolam : On m’a fait comprendre que cette responsabilité relève de l’ICAC. Je ne peux dire si tel a été le cas.
Bérenger : J’ai appris que la SIC est intervenue pour geler le paiement du chèque. La SIC est un des actionnaires majoritaires de MedPoint. Je voudrais confirmer si la SIC est intervenue, et si elle ne l’a pas fait encore, pourquoi ?
Ramgoolam : Cette démarche découle des seules responsabilités de l’ICAC.
Bérenger : Lors d’un récent point de presse, le Premier ministre a affirmé qu’il serait l’homme le plus heureux au monde si des documents du conseil des ministres relatifs à l’affaire MedPoint étaient rendus publics. Peut-il s’assurer que le Cabinet Memorandum piloté par l’ancien ministre de la Santé, Rajesh Jeetah…
Jeetah : Pena sa !
Bérenger :… Aussi bien que les délibérations du conseil des ministres soient rendus publics ?
Ramgoolam : I said what I said. I meant what I meant. L’affaire a été logée devant la Cour suprême. Le secrétaire au Cabinet, responsable du dossier, ira en Cour pour faire le nécessaire.
Bérenger : Cela fera bientôt un an que l’ICAC enquête sur le scandale MedPoint. Peut-il révéler à la Chambre le délai dans lequel cet exercice de l’ICAC sera complété ?
Ramgoolam : Je ne peux donner aucune indication à cet effet.
Bérenger : Manrakhan pa ine dire kan. Venons-en à Infinity BPO, où le principal concerné était un ancien Senior Adviser du Premier ministre en matière de technologie informatique. Le ministre des Finances avait confirmé que l’ICAC avait ouvert une enquête à ce sujet. Le Premier ministre peut-il confirmer si oui ou non Jean Suzanne a été entendu par l’ICAC et sinon quand ce sera fait ?
Première intervention du Speaker, dont la teneur des explications est couverte par le brouhaha au sein de l’hémicycle. Le leader de l’opposition change de scandale et passe au volet consacré à la State Trading Corporation.
Bérenger : En ce qui concerne la STC, le Premier ministre a dû prendre connaissance des détails dans le rapport du Forensic Auditor, Roshi Bhadain. Il y a de nombreux cas qui auraient dû faire l’objet d’enquêtes criminelles soit à la police soit à l’ICAC. Peut-on savoir ce qu’il en est exactement ?
Ramgoolam : Je dois faire ressortir que la décision de commanditer cette enquête relève du gouvernement ou encore du ministre concerné et également du Management en vue de faire la lumière sur certaines pratiques. Je crois comprendre que des enquêtes sont en cours.
Bérenger : Au chapitre de la Hedging Saga sur le prix du pétrole, les pertes se montent à au moins Rs 5 milliards. De ce qu’on apprend, l’ancien ministre Jeetah avait donné son accord verbal pour cette décision sur le Hedging alors que de l’avis de ses techniciens, le cours mondial du pétrole était sur une courbe descendante ?
Ramgoolam : This is not my understanding. Une enquête a été initiée.
Bhagwan : Ti bizin fini alle dan kaso tout sa !
À ce stade, alors que le leader de l’Opposition formule une interpellation parlementaire en utilisant le mot Unlawful, le Speaker intervient pour soutenir qu’il n’a pas le droit de demander au Premier ministre son opinion. Paul Bérenger maintient son approche au sujet des pratiques autour du scandale Rose Garden Residences à Rose-Belle.
Bérenger : What has taken place is illegal. Un permis de morcellement sur une superficie de terrain à la propriété sucrière de Rose-Belle en vue de lui permettre de financer le Voluntary Retirement Scheme des employés. C’était en 2004. Or, cette année, un promoteur privé prend avantage de ce permis pour un morcellement. C’est complètement illégal.
Le ministre de l’Agro-Industrie, Satish Faugoo, montre des signes d’impatience et tente de faire comprendre qu’il n’y a rien d’illégal dans cette démarche autorisée par la loi.
Ramgoolam : Action was initiated by the minister of Agro-Industry. ICAC is enquiring on that issue.
Bérenger : Le Premier ministre est-il au courant que le ministre de l’Agro-Industrie est intervenu à deux reprises dans ce dossier, soit au moment des démarches pour une EIA Licence et pour annuler une demande d’injonction en Cour suprême contre ce projet par le conseil d’administration ?
Des protestations montent du côté de la majorité gouvernementale alors que les parlementaires de l’opposition jubilent littéralement.
Faugoo : Ki to pe rakonté. Poz mwa PNQ la semenn prosenn. Vini la semenn prosenn…
Bérenger : Pour ce qui est de la Banque de Maurice, nous pensons que cette institution aurait dû donner le bon exemple. Or avec le Cheque Truncation System, tel n’est nullement le cas. Des appels d’offres sont lancés pour ce projet. Trois cotations sont reçues. L’exercice est annulé. Le contrat a été alloué à une firme qui n’avait pas participé à l’appel d’offres.
Speaker : Je dois attirer l’attention du leader de l’opposition sur le fait que même si le gouverneur de la Banque de Maurice est nommé par le Premier ministre, cette institution tombe sous la responsabilité du ministère des Finances. Ce n’est pas au Premier ministre de répondre à cette interpellation.
Bérenger : Mais la prérogative constitutionnelle de nommer le gouverneur de la Banque de Maurice revient au Premier ministre. Il serait bon pour lui de commenter le comportement de ses nominés ?
Speaker : La Constitution donne des pouvoirs au Premier ministre de procéder à une série de nominations. Mais la responsabilité relève d’autres ministres.
Bérenger : Mo ti bizin poz mo PNQ à Speaker ! Au CEB, nous avons assisté à une série de scandales par rapport à des contrats. Il y a eu l’affaire des ampoules économiques de la République populaire de Chine avec plus de Rs 25 millions, le projet de Rs 500 millions à BWSC. It’s a complete mess. Le Premier ministre a-t-il eu l’occasion de s’entretenir avec le ministre de tutelle de la situation au CEB ?
Ramgoolam : Les enquêtes ont démarré suite à des décisions du ministre concerné. L’ICAC se penche sur ces dossiers.
Bhagwan : Kan pou alle mette zotte dan kaso ?
Bérenger : Et la CWA ? Il y a eu le comité d’évaluation pour le contrat de fourniture de chlore. Il y a eu le feu vert du conseil d’administration. Le soumissionnaire le plus qualifié a été écarté et celui avec l’offre la plus élevée favorisé. Puis, il y a eu les commentaires de l’Independent Review Panel, qui a renversé cette décision. N’est-on pas en face d’un complot ?
Speaker : Le leader de l’opposition s’engage dans des commentaires. Il serait mieux pour lui de venir de l’avant avec sa question.
Bérenger : N’y a-t-il pas lieu d’une enquête au criminel sur cette éventualité de complot ?
Ramgoolam : Le conseil légal avait fait état de certaines irrégularités. L’ICAC enquête.
Bérenger : Pour les recrutements au MITD, en réponse à une interpellation en date du 21 juin, le ministre de l’Éducation a soutenu que les détails sur l’adresse des recrues seront déposés sur la table de l’Assemblée nationale dans les meilleurs délais. Or tel n’est pas le cas ?
Ramgoolam : Mes informations sont que les informations ont été déposées.
Bhagwan : Kan ?
Bérenger : Je procède à des vérifications de manière régulière. Lors de mon dernier constat tel n’avait pas été le cas…
Speaker : C’est pourquoi je dis qu’il faut poser la question au ministre de l’Éducation… J’ai pris la décision que les pratiques adoptées dans le passé ne seraient plus de mise avec des ministres promettant de déposer les documents et ne le faisant pas…
Bérenger : Maybe I should put my PNQ to the Speaker…
Speaker : Order ! Order ! Order !
Bérenger : Dans le cas de la SMEDA, le Personnel Committee avait recommandé que tout recrutement se fasse par voie d’annonce. L’ancien responsable de la SMEDA, Vijay Ramgoolam, avait résisté à toute tentative de contourner cette directive. Il a été limogé. Un agent politique a été nommé en tant que Liaison Officer. Le Premier ministre a-t-il soulevé avec le ministre concerné….
Sik Yuen : L’ICAC pe fer lanket…
Cette remarque du ministre Michaël Sik Yuen soulève un véritable brouhaha dans l’hémicycle pendant quelques instants.
Bérenger : Venons-en au cas de l’honorable Dhirajsing Khamajeet. Lors de son point de presse, le Premier ministre a confirmé une enquête de l’ICAC. En même temps, il a blanchi le député. Comment explique-t-il cela ? N’est-ce pas une forme de pression ?
Bundhoo : Ashock Jugnauth !
Ramgoolam : Ce que j’ai dit effectivement est qu’il n’y a pas eu de lettre à la PSC. He did not send any letter to PSC. This is what I said.
À ce stade, le leader du MSM, Pravind Jugnauth, intervient pour prendre le relais du leader de l’opposition. Mais le brouhaha reprend de plus belle et l’intervenant est dans l’impossibilité de se faire entendre.
Speaker : I say order ! I can’t see anything funny…
Jugnauth : Le Premier ministre a déclaré par rapport à la Hedging Saga qu’une enquête est en cours. Cette affaire remonte à juillet 2008. Puis-je savoir sous quelle autorité se déroule cette enquête ?
Ramgoolam : J’avais demandé à Roshi Bhadain d’effectuer cette enquête. L’ICAC poursuit le travail.
Bhagwan : Dans le rapport du Forensic Auditor, le nom d’Ah Fat est mentionné. Ce même Ah Fat est le Special Adviser du Premier ministre…
Bérenger : …également le trésorier du Parti travailliste…
Ramgoolam : L’enquête est en cours…
Jhugroo : Le Premier ministre peut-il confirmer que le Premier ministre adjoint a participé à des délibérations d’une réunion…
Speaker : Je suis navré. Je ne veux pas permettre des questions au Premier ministre pour dévoiler les secrets du conseil des ministres…
Bérenger : Mo ti kwar akoz li (Rashid Beebeejaun) ine dimande pardon…
Jugnauth : L’honorable n’a fait que mentionner le mot réunion. Il n’a pas dit quelle réunion ou encore mentionné le conseil des ministres.
L’honorable Jhugroo est autorisé à aller de l’avant avec sa question. Mais le Premier ministre répondra qu’il est dans l’impossibilité d’apporter des éléments de réponse car la question est trop vague.
Les interpellations des députés Joe Lesjongard sur les interdictions des ingénieurs du CEB et de Maya Hanoomanjee sur la responsabilité du représentant du ministère de l’Agro-Industrie sur le Board de Rose-Belle ne devaient pas apporter de réponses détaillées.
De son côté, Pravind Jugnauth est revenu à la charge sur la publication des Cabinet Proceedings sur l’affaire MedPoint en soulignant que le Premier ministre détient les pouvoirs sous la Constitution pour ordonner au secrétaire au Cabinet de rendre publics les documents réclamés. Le Speaker devait tout simplement répondre que toute cette affaire est Sub Judice et qu’il faudra attendre la décision de la Cour.
Bhagwan : Le Premier ministre peut-il révéler quand il nommera le remplaçant d’un des membres de l’ICAC décédé ?
Speaker : This has nothing to do with the PNQ.
Bérenger : Ma PNQ a traité des 10 plus gros scandales de l’heure. Si je devais énumérer tous les scandales, ma PNQ serait sur trois pages. Le Premier ministre peut-il donner la garantie que ces cas font l’objet d’enquête et que si tel n’est pas le cas actuellement, ils le seront ?
Ramgoolam : De ce que j’ai pu comprendre, toutes ces affaires font l’objet d’enquêtes. Il y a encore d’autres High Profile Cases…
La fin de la PNQ est ponctuée par des applaudissements des bancs de la nouvelle opposition, avec des « fizette » venant des rangs du gouvernement.

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