La fibre patriotique vibre fièrement en chaque Mauricien. Mais à des degrés différents, c’est clair. Rarement a-t-on ressenti cependant une aussi ardente appartenance à notre mère patrie comme cela a été le cas ce 12 mars ! Et le besoin tout aussi pressant de l’exprimer. Soit en paroles, soit en étant présent au Champ-de-Mars, par exemple. Haut lieu symbolisant l’accession au statut d’État indépendant en mars 1968. Endroit qui a été salement défiguré par le passage d’une bande d’opportunistes à la solde de Lakwizinn de Pravind Jugnauth & Co, il convient de le souligner. Qu’à cela ne tienne, cette semaine, le Champ-de-Mars a repris des couleurs et retrouvé son cachet symbolique. Une jolie foule bigarrée, résolument mauricienne, a souhaité y être présente, bravant pluies et intempéries.
Exprimer son patriotisme, c’est aussi accrocher son quadricolore sur la grille d’entrée de sa maison, ou à une fenêtre, une antenne TV… Sans compter ceux qui ne ratent pas cette occasion pour parer leurs véhicules de gadgets divers, aux quatre couleurs de notre arc-en-ciel. Cette année, davantage de compatriotes ont ressenti cet urgent besoin de s’exhiber (dans le bon sens). Très certainement en réponse directe et réflexe spontané aux multiples tentatives du régime asphyxiant de Jugnauth fils et ses complices, qui dérivait dangereusement vers une autocratie bien calculée !
Ce 12 mars 2025 restera donc longtemps gravé dans les cœurs et les mémoires. Tel un retour aux sources, une deuxième chance, et surtout un bel hymne à notre liberté. Un sentiment de pur bonheur qui ne gommait en rien les soucis inhérents comme la cherté de la vie, le manque crucial d’eau, c’est vrai. Mais le sourire est revenu sur plus d’un visage, libre et sincère.
Ne dit-on pas que ce sont dans les pires moments de notre vie que l’on réalise l’importance de ce qu’on a failli perdre ? Ne s’accroche-t-on pas à la branche tendue, aussi fragile soit-elle, pour ne pas perdre pied ou s’enliser ? Cet anniversaire d’indépendance a ramené les spectres des écoutes téléphoniques, des disparitions énigmatiques comme celles de Soopramanien “Kaya” Kistnen ou de Pravin Kanakiah, et tant d’autres moments noirs de ces dix dernières années sous le joug de Jugnauth Jr et ses apparatchiks. Ce 12 mars marque, souhaitons-le, une nouvelle ère, sous le signe des valeurs qui nous sont chères : honnêteté, transparence, redevabilité, intégrité, vérité… C’est avec tout cela dans nos cœurs que nous avons vécu ce 57e anniversaire de l’indépendance.
L’invité d’honneur étant une personnalité (très) controversée, il aura évidemment marqué chacun, et de diverses façons. Stratégie diplomatique, tactique politique, l’on ne sait. Son passage se veut, pour le gouvernement en place, porteur de projets et d’entreprises. Le Premier ministre indien, Narendra Modi, a son parcours; Navin Ramgoolam, le sien. Le débat est ouvert et chacun peut émettre ses opinions librement. Ainsi vit-on dans une démocratie qui se respecte.
Car la vraie priorité était bel et bien la célébration de l’identité mauricienne. Peut-être, et prions d’ailleurs, que nous assistons à l’émergence, même (très) timide, du mauricianisme tant souhaité et encouragé. Les mois et années qui viennent le diront. Et surtout, les actions et positions du gouvernement de Sanzman 60- 0 en décideront.
Ces espaces d’expressions et d’échanges ne sont pas sans faire résonner, et très fortement d’ailleurs, la situation toujours aussi pénible et étouffante des Palestiniens de Gaza. Le régime (impitoyable) de Benjamin Netanyahou n’en finit pas avec ses actes d’oppression, malgré le cessez-le-feu. Dimanche dernier, 9 mars, Israël a annoncé couper la dernière ligne à haute tension qui fonctionnait dans la bande de Gaza. Elle servait notamment à alimenter la principale usine de dessalement de l’eau de l’enclave. Un nouveau coup dur pour la population, alors que l’aide humanitaire est bloquée depuis le 2 mars.
De réaliser qu’en 2025, il existe un endroit sur Terre où des humains vivent sans électricité ni eau potable, avec très peu de sources d’alimentation et de médicaments, est révoltant. Pourtant, cette réalité est celle de milliers de Palestiniens. Au nom d’un certain extrémisme, l’on affame enfants et vieux. Où est l’humanité dans de telles prises de décisions ?
Husna Ramjanally