Le pape François entame dimanche soir un voyage historique aux Emirats arabes unis, première visite d’un souverain pontife dans la péninsule arabique, où il va chercher à renforcer davantage les liens avec l’islam.
Cette visite « ne pouvait mieux tomber », a déclaré à l’AFP Mgr Paul Hinder, évêque du Vicariat apostolique d’Arabie du sud qui comprend les Emirats arabes unis, Oman et le Yémen.
« Je suis heureux (…) d’écrire sur votre chère terre une nouvelle page d’histoire entre les religions, confirmant que nous sommes des frères tout en étant différents », a déclaré le pape dans un message vidéo jeudi destiné au peuple émirati.
Il est attendu à Abou Dhabi, capitale des Emirats arabes unis, pour un séjour jusqu’à mardi au cours duquel il participera à une rencontre interreligieuse et retrouvera le grand imam sunnite d’Al-Azhar, cheikh Ahmed al-Tayeb, à qui il avait rendu visite en Egypte en 2017.
Le souverain pontife a fait du rapprochement entre l’islam et le catholicisme, deux des plus grandes religions, une pierre angulaire de sa papauté.
Le pape a dit croire que la rencontre interreligieuse prévue lundi reflétera « le courage et la volonté d’affirmer que la foi en Dieu unit et non divise, rapproche malgré les distinctions, éloigne de l’hostilité et de l’aversion ».
Le prince héritier d’Abou Dhabi, Mohammed ben Zayed Al-Nahyane, qui a invité le pape aux Emirats, a salué en lui, dans un tweet jeudi, un « homme de paix et d’amour », espérant que « les générations à venir prospéreront dans la paix et la sécurité ».
Les Emirats ont été régulièrement critiqués ces dernières années par des ONG en Occident pour leur intervention militaire au Yémen aux côtés des Saoudiens.
– Contrôle religieux –
Contrairement à l’Arabie saoudite voisine qui interdit la pratique d’autres religions que l’islam, les Emirats arabes unis, où l’immense majorité de la population est composée de travailleurs étrangers, soignent leur image et cherchent à projeter des valeurs de tolérance religieuse et de diversité culturelle.
Les Emirats, qui s’enorgueillissent d’avoir un ministre de la Tolérance, ont ainsi déclaré 2019 « Année de la Tolérance ».
Des millions d’expatriés vivent dans ce pays du Golfe, dont d’importantes communautés d’Inde et des Philippines. Il y a environ un million de catholiques dans cet Etat, adepte d’un islam plutôt modéré et dont la société est largement ouverte vers le monde extérieur.
Cependant, les autorités contrôlent les pratiques religieuses et répriment toute contestation politique ou exploitation de la religion, y compris par les islamistes.
« Nous ne contrôlons pas les prêches du Vendredi, mais nous les régulons pour le bien-être commun afin d’éviter la dissémination de discours de haine, comme nous l’avons vu dans de nombreux pays, y compris en Europe », a dit à l’AFP un responsable émirati.
Au dernier jour de sa visite mardi, le pape François dirigera une messe à laquelle participeront plus de 130.000 personnes, ce qui devrait être le plus grand rassemblement jamais organisé aux Emirats, selon des médias locaux.
Des catholiques qui assistaient à une messe en plein air mercredi à Dubaï ont fait la queue pendant des heures à l’église catholique St Mary pour récupérer des billets en vue de la messe de mardi au stade Zayed Sports City à Abou Dhabi.
Les paroisses de tout le pays ont reçu un certain nombre de billets et l’église St Mary en a reçu 41.000, selon le prêtre Lennie Connully.
« Nous essayons de satisfaire tout le monde car il pourrait y avoir des places supplémentaires dans d’autres paroisses ».
– « Seconde chance » –
Plus de 2.000 bus transporteront des fidèles de tout le pays jusqu’à Abou Dhabi, selon des médias locaux.
Pour la Philippine Mylene Lao Estipona, 43 ans, survivante d’un cancer qui vit depuis 13 ans aux Emirats, le voyage de Dubaï à Abou Dhabi et les longues files d’attente pour voir le pape sont un petit prix à payer pour le rêve de sa vie.
Elle dit que sa foi lui a donné une « seconde chance » et la force de vaincre la maladie.
Le pape argentin François, qui est entré dans l’Histoire quand il a été nommé premier souverain pontife d’Amérique latine en 2013, est souvent décrit comme le « pape du peuple ».
Les latino-américains « sont des gens très différents, très sympathiques, qui se font facilement des amis. C’est ce qu’on voit chez le pape François », assure pour sa part le prêtre Lennie Connully.
Depuis le début de son pontificat, le pape s’est rendu à plusieurs reprises dans des pays dont la population est majoritairement musulmane, comme l’Egypte, l’Azerbaïdjan, le Bangladesh et la Turquie. En mars, il est attendu au Maroc.
-AFP