En dépit des conditions climatiques qui ont obligé les écoles à rester fermées pendant plus d’une semaine, la rentrée scolaire 2018 a eu lieu sans problèmes. Tout au moins si l’on se fie aux déclarations de la ministre de l’Education. Mais au moins un enfant mauricien n’est pas satisfait de cette rentrée. Il s’agit de Preetee Daby dont voici la triste histoire.
Preetee Daby a le malheur d’être née aveugle, ce qui multiple par deux – et parfois par beaucoup plus que ça -, les obstacles auxquels elle doit faire face pour avoir une vie correcte. L’un des principaux obstacles auxquels ont à faire face les enfants handicapés de Maurice est le parcours du combattant pour obtenir ce qui est – théoriquement – leur droit : l’accès à l’éducation. Pendant les premiers cinq ans de sa vie, les parents de Preetee ont dû se battre pour trouver une école pour leur fille. Ce n’est qu’en 2009 qu’elle est admise à l’école du Centre Loïs Lagesse, à Beau-Bassin, alors qu’elle habite Goodlands. A partir de 2009, Preetee commence enfin son parcours dans le système éducatif mauricien. En 2012, elle est admise à la Doorgachurn Hurry Government School de Goodlands où il y a une classe spéciale qui travaille en collaboration avec le Centre Loïs Lagesse et qui accueille les handicapés. En dépit du fait qu’elle ne bénéficie pas de tous les équipements techniques nécessaires à une aveugle, Preetee travaille bien en classe et passe le Primary School Achievement Certificate qui remplace le CPE en obtenant 11 unités. C’est quand Preetee se met à la recherche d’un collège pour poursuivre ses études que le problème surgit.
Selon la logique pédagogique préconisant qu’une élève doive fréquenter le collège le plus proche de son domicile, Preetee Daby devrait aller au JSS Jugdambi de Goodlands. C’est d’ailleurs la demande que son père avait faite, mais qui a été rejetée par le ministère de l’Education, dans un premier temps, parce que Preetee Daby est « overaged », puisqu’elle a dû redoubler une année scolaire. Puis, vendredi dernier, un porte-parole du ministère de l’Education explique que (i) le JSS Jugdambi n’a plus de place et que (ii) les résultats de Preetee Daby sont inférieures à celles des autres élèves acceptées et qu’elle ne pourrait s’adapter au niveau. D’autres sources du ministère justifient le refus par le fait que le JSS Jugdambi n’est pas équipé pour recevoir des élèves handicapés. Mais en fin de semaine le ministère a informé le père de Pretee que sa fille avait été admise au collège Friendship, un collège privé de Goodlands. Mais le problème c’est que, d’une part, ce collège n’est pas équipé pour recevoir des élèves handicapés mais surtout qu’il est beaucoup plus loin du domicile de Preetee que le JSS Jugdambi. En fin de compte et même si on n’ose pas le dire, Preetee Daby ne peut poursuivre son parcours éducatif dans le collège de son choix à cause de son handicap.
La Global Rainbow Foundation, dont le travail en faveur des handicapés n’est plus à démontrer, s’est emparée de l’affaire qui commence à ressembler à un traitement discriminatoire du ministère infligé à une handicapée. Dans une lettre adressée au ministre de l’Education avec copies à plusieurs autres ministres et institutions censés s’occuper des handicapés, Armoogum Parsuramen, directeur de la GRF écrit ce qui suit. « The case of Ms. Daby is a wakeup call on the question of why students with disabilities are not granted age relaxation at all stages of their educational journey. To sum it up, the right to education is the basis to implement all other human rights and is crucial to the overall development and well-being of an individual and society. The positive trend of age relaxation will inspire and invite all stakeholders to explore multiple approaches that can leverage key resources and further improve the quality of education for students with visual impairment
Loin d’être un cas isolé
In this regard, I make an appeal to you and to your Ministry to investigate into the matter for the admission of Ms. Daby at the Mohun Parsad Sharma Jugdambi State Secondary School and to recommend to the concerned authorities that Ms Daby may proceed with her admission at this school. » Est-il nécessaire de dire que cette lettre envoyée au ministre le 10 janvier n’avait pas encore reçu de réponse ou d’accusé de réception à hier ?
Le cas de Preetee Daby est loin d’être l’exception qui confirme la règle. En dépit des déclarations de la ministre selon laquelle tous les enfants handicapés seront intégrés dans le système, beaucoup de parents d’enfants handicaps qui sont allés les faire inscrire ont reçu une réponse négative. « C’est ainsi que les choses se passent à Maurice où les droits des enfants handicapés ne sont pas respectés en dépit des conventions internationales signées par l’Etat », déclare Armoogum Parsuramen. « Dans le passé, la GRF a dû déposer des plaintes à l’Equal Opportunity Commission pour que des enfants handicapés puissent bénéficier de leur droit à l’éducation. » C’est ce qu’il compte faire avec le cas de Preetee Daby, doublement victime de son handicap.