La perspective de retrouvailles familiales autour d’un repas de fête provoque souvent un mélange de joie, de stress et de tensions. Aussi, avant de déboucher le champagne et de « sonner » les traditionnels pétards, il convient de faire en sorte que ce repas de famille « se passe bien ». Quelques conseils…
C’est décidé, vous avez décidé de recevoir toute votre famille autour d’un bon repas. Une belle initiative, qui à l’approche du jour J, vous stresse. Vous n’avez pas revu certains de vos proches depuis longtemps, vous avez eu des différends avec d’autres… Bref, comment faire pour réussir ce repas de famille ?
Faire le point avec soi-même
« Les repas de famille sont surinvestis émotionnellement, dit Aurélie Crétin, psychologue. Faire le point avec soi-même, plusieurs jours à l’avance, permet d’arriver plus détendu le jour J. »
On s’isole une heure ou deux, pour prendre le temps de se poser les bonnes questions : Pourquoi suis-je dans cet état de stress ? Qu’est-ce que je crains, et ces craintes sont-elles justifiées ? Il s’agit parfois de tensions et de rancœurs qui datent de l’enfance : en y réfléchissant, on peut s’apercevoir que l’on est aujourd’hui capable de les relativiser. Par exemple, les raisons d’un comportement qui nous avait blessés nous apparaissent plus claires à l’âge adulte.
Un mauvais souvenir
Autre cause possible à notre angoisse : un mauvais souvenir. « Le cerveau garde tout particulièrement en mémoire les expériences négatives, analyse Aurélie Crétin. On peut se sentir mal à cause d’un seul repas de Noël qui se serait mal terminé, même si tout se passe bien la plupart du temps. » En prendre conscience contribue à nous “déprogrammer”.
Répartir les tâches pour le repas de fête
Le stress des préparatifs peut représenter une réelle cause de tensions. On a l’impression que l’on réussira à tout faire toute seule, mais des ambitions démesurées risquent fort de nous stresser. Épuisé, irritable, on n’aura peut-être plus la tête à faire la fête le moment venu. Il est plus sage de faire appel aux autres.
« Apprendre à déléguer permet de se libérer de l’anxiété de performance, et de prendre de la distance par rapport au repas », explique Anne Dumont. Bien sûr, on a envie que cela soit bon, mais l’ambiance est plus importante que la cuisson du dessert. Qui plus est, il y a de fortes chances que les membres de la famille sollicités soient heureux de donner un coup de main pour s’occuper de la décoration, apporter une partie du repas ou faire les courses de dernière minute.
Si l’on est seulement invité au repas, on propose son aide plusieurs semaines à l’avance, pour ne pas arriver quand tout est déjà organisé. On partage également ses propres préparatifs avec son conjoint, comme l’achat des cadeaux.
Accepter sa famille comme elle est
« Lorsqu’on ne s’est pas vu depuis longtemps, on peut nourrir des attentes trop importantes par rapport à nos proches et à la réunion de famille », constate Aurélie Crétin. Selon la psychologue, ce phénomène est encore plus vrai à Noël, une période où le mythe de la famille unie et aimante est très présent. C’est une importante source de déception.
La seule façon de s’en prémunir est la lucidité : les membres d’une famille ne changent pas d’une année sur l’autre, et les comportements qui nous déplaisent seront très probablement toujours présents. La seule chose que l’on peut modifier, c’est notre façon d’y réagir. Par exemple, si l’on redoute une remarque en particulier, on peut y penser à l’avance. « Préparer une réponse permet de ne pas être pris au dépourvu et de ne pas se laisser envahir par l’émotion », indique Aurélie Crétin.
Une bonne stratégie consiste à déplacer la conversation. On nous demande si notre fils a toujours autant de difficultés à l’école ? On peut répondre : « Oh, justement, en parlant de Paul, je ne vous ai pas raconté : il a été sélectionné dans son équipe de football, on était tellement fier de lui… »
Parmi les choses qui nous déplaisent aussi dans ces retrouvailles, il y a le décalage entre l’image que les autres membres de la famille ont de nous et ce que nous sommes. Mieux vaut s’y attendre et le prendre avec patience, voire avec humour. « La famille est un système où chacun a un rôle précis à jouer, décidé depuis longtemps, décrypte Aurélie Crétin. Il faut accepter sa place si on veut préserver la convivialité. »
Les grandes réunions sont précisément faites pour réaffirmer le groupe. Même si on se sent déstabilisé ou incompris, ce n’est surtout pas le moment d’essayer de changer les choses, au risque de provoquer seulement de l’incompréhension et des disputes. Il faut accepter de “faire famille” l’espace de quelques heures !
Remettre à plus tard les explications
À table, on cultive plutôt les sujets susceptibles de réunir le plus grand nombre, comme les voyages ou la gastronomie. Si quelqu’un aborde une discussion potentiellement dangereuse, on rebondit sur autre chose en racontant une anecdote, le dernier livre que l’on a lu ou un concert que l’on est allé voir… On reste ouvert en écoutant chacun, et en faisant l’effort de ne pas interpréter les propos. Si on perçoit une allusion ou une attaque directe, on ne mord pas à l’hameçon. « Il est normal de ressentir une émotion négative, mais elle ne doit pas prendre toute la place », rappelle Anne Dumont.
La psychologue recommande de prendre note de la sensation désagréable, puis de faire l’effort de se reconcentrer sur ce qui va bien, en se rappelant pourquoi on est là. Difficile ? On peut sortir de table pour s’isoler quelques instants, sous prétexte d’aller aux toilettes. Une fois seul, on respire très profondément au moins trois fois d’affilée. « Cela ne signifie pas que l’on doive tout accepter, signale Aurélie Crétin. Si on se sent blessé par une remarque, on peut prévoir un moment pour en discuter plus tard avec la personne. À froid, on sera plus à même de formuler les choses calmement afin de régler le problème. »