Jean-Pierre Charles est potier. Il est l’un des rares héritiers d’un métier pratiqué depuis des millénaires. De ses mains, il modèle la terre pour en faire des ustensiles et des objets de décoration. Dans son atelier à Ste-Croix, l’artisan expose ses créations et celles de son fils Kevin.
Jean-Pierre Charles démarre son tour. De ses mains humides, il commence à façonner la boule de terre blanche placée au centre du plateau métallique, qu’un moteur caché fait tourner à vive allure. Les gestes sont précis et rapides. Un cylindre commence à s’élever, que l’artisan mouille constamment de terre. La petite boule se transforme en vase, qu’il détache du tour à l’aide d’un fil. La nouvelle création est rangée sur une étagère à côté d’autres bols, qui attendent à l’état brut. Après une nuit à l’air libre, le vase sera remplacé sur le tour pour que le potier lui apporte les corrections nécessaires et lui ajouter éventuellement des motifs.
Cette toute première étape réalisée dans l’atelier du potier à Ste-Croix aura à peine duré cinq minutes. Une rapidité d’exécution qui pourrait faire croire qu’il est donné au premier venu d’en faire autant. Mais Jean-Pierre Charles a une trentaine d’années d’expérience derrière lui et des milliers de créations portent l’empreinte de ses mains.
Chaque pièce est unique.
Les étagères de son atelier et sa table principale offrent un aperçu de son travail : tagines, vases, bols, brûle-parfum, théières, cendriers, tasses et autres y ont été rangés avec soin, en attendant d’être récupérés par des clients qui les utiliseront ou en feront des objets de décoration. Dans les deux cas, ils ne seront pas déçus par l’esthétisme et la solidité des créations en céramique de l’atelier JP Charles. La qualité y tient une place importante, et c’est l’un des principaux arguments sur lequel mise le potier pour faire face à la concurrence du Made in China qui envahit le marché.
Ici, chaque pièce est unique. Chacune a été fabriquée à la main selon les méthodes traditionnelles apprises par l’artisan dans les années 80. Il avait alors rejoint une entreprise privée qui avait fait venir des professionnels sud-africains pour former son personnel. Les principes de base acquis, Jean-Pierre Charles s’est perfectionné dans les différentes étapes. “Pour un potier, il est important d’avoir une bonne maîtrise de chacune de ces étapes et de connaître les différentes techniques existantes.” Certaines créations sont coulées dans des moules, qu’il fabrique lui-même dans du plâtre.
Précision et inspiration.
La première cuisson requiert 1,000°C. Une fois la peinture posée, le four est poussé à 1,150°C, nous précise le potier. Un travail d’une grande précision car la chaleur détermine la qualité du produit final. “Quand on commence un travail, il faut avoir une vision et être précis. Il faut aussi de l’inspiration”, ajoute-t-il.
Ces règles, il les a apprises à son fils Kevin, 22 ans. Depuis qu’il a six ans, ce dernier suit son père à l’atelier. Avant, il fabriquait des petites voitures et des figurines. Aujourd’hui, lui aussi se distingue comme potier et travaille avec son père. “Pour faire ce travail, il faut savoir observer et constamment pratiquer”, affirme Jean-Pierre Charles. Ce dernier a animé des ateliers de travail dans le passé et travaille désormais à son propre compte.
Les fouilles archéologiques démontrent que la poterie a toujours accompagné l’humanité. Au fil du temps, les outils se sont modernisés, mais la technique de base est restée la même. Père et fils s’estiment ainsi les héritiers d’un savoir-faire qui remonte à la nuit des temps. “Parfois ça va, mais il y a des moments où la situation est assez difficile”, confie le potier. Mais il ne se décourage pas. Ce ne sont pas les idées qui lui manquent quand il s’agit de surprendre la clientèle.