L'amour au féminin et une performance de l'actrice Rose Byrne en mère à bout primés à Berlin
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La 75e Berlinale a mis le focus sur les femmes en décernant samedi son Ours d'or à un film norvégien sur les premiers émois amoureux, "Dreams", et récompensé l'actrice australienne Rose Byrne, pour son interprétation d'une mère au bout du rouleau.
A la veille d'élections législatives cruciales en Allemagne, et un mois après le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, la soirée de clôture a été émaillée de plusieurs prises de position politiques.
Mais le président du jury, le réalisateur américain Todd Haynes, s'en est tenu au cinéma: "en compétition, il y avait tellement de films avec des femmes derrière et devant la caméra, racontant des histoires sur des vies de femmes et leurs expériences, que ça a produit une très forte impression sur nous", a-t-il déclaré.
A commencer par l'Ours d'or, qui met en scène trois générations de femmes: "Dreams" suit une jeune étudiante de 17 ans, qui tombe amoureuse de sa professeure, et montre les répercussions de cette passion sur sa mère et sa grand-mère.
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Pour le magazine américain Variety, ce long-métrage livre "une exploration subtile mais nuancée de l'éveil amoureux, du déséquilibre des pouvoirs et de la catharsis créative. The Guardian a salué un film "malin, espiègle et bavard".
"Dreams" est, après "Sex" et "Love", le troisième volet d'une trilogie à Oslo, dont les deux premiers avaient été présentés à Berlin et Venise. Les trois doivent sortir en France le 2 juillet.
L'autre star de la soirée est l'actrice australienne Rose Byrne, prix d'interprétation pour son rôle dans "If I Had Legs I'd Kick You". Ce film coup de poing de l'Américaine Mary Bronstein renouvelle le regard sur la maternité et les injonctions et pressions sociales auxquelles sont soumises les mères.
L'Irlandais Andrew Scott repart avec le prix du meilleur rôle secondaire pour "Blue Moon" de Richard Linklater.
- "Sous pression de toutes parts" -
La Berlinale avait débuté sur une note très politique, rythmée par les prises de position contre Donald Trump de Tilda Swinton, invitée d'honneur, ou de Todd Haynes. La cérémonie de clôture a poursuivi sur ce ton, à la veille d'élections législatives anticipées dimanche en Allemagne, où l'extrême droite de l'AfD espère un score historique.
Le réalisateur roumain Radu Jude, figure du cinéma d'auteur radical, a mis les pieds dans le plat: "Comme il y a des élections ici demain, j'espère que, l'an prochain, le festival n'ouvrira pas avec +Le triomphe de la volonté+ de Leni Riefenstahl", l'un des plus célèbres films de propagande nazie de l'Allemagne hitlérienne.
Celui qui repart avec un prix du meilleur scénario pour "Kontinental'25" a également dit espérer "davantage de solidarité en Europe, en ces temps où nous sommes sous pression de toutes parts".
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L'an dernier, une vive polémique avait éclaté en Allemagne après des déclarations sur scène condamnant la guerre israélienne à Gaza, sans mentionner en même temps l'attaque du Hamas sur Israël qui l'a déclenchée, ni le sort des otages.
Cette année, le prix du documentaire est allé à un film sur la famille d'un otage du Hamas, Liat Beinin Atzili, tourné après son enlèvement le 7 octobre 2023. Filmer "les nuances d'une famille, explorer leurs différences, leur chagrin et leur empathie pour les autres semble quelque chose d'universel et d'urgent, maintenant plus que jamais", a souligné son réalisateur Brandon Kramer.
Membre du jury de l'une des sections parallèles, la réalisatrice canado-tunisienne Meryam Joobeur, montée sur scène pour remettre le prix du meilleur premier film à une œuvre mexicaine, a appelé à "ne pas abandonner notre devoir sacré envers les enfants, quelles que soient leur religion, couleur de peau ou identité". Elle a dénoncé "l'anéantissement de milliers d'enfants, réduit à de simples dommages collatéraux par les politiques et les médias".
Cette 75e Berlinale était aussi un test pour sa nouvelle directrice, l'Américaine Tricia Tuttle. Elle est parvenue à faire venir sur le tapis rouge l'un des favoris des Oscars en mars, Timothée Chalamet, ainsi que l'équipe de "Mickey 17", le nouveau film de Bong Joon-ho avec Robert Pattinson.