Subvention des collèges privés : Les managers voient rouge

Ramdass Ellayah : «Mo finn dir minis ki ti bizin teste dan kolez piblik se ki pe fer ar kolez prive, pou ki zot konpran ki nou pe viv !»

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La menace de fermeture qui pèse sur certains collèges privés est bien réelle, affirme Ramdass Ellayah, président de la fédération des managers des collèges privés. La raison de cette inquiétude, selon lui, réside dans le mécanisme de grant 2024-26 imposé par la Private Secondary Education Authority (PSEA) et dans l’ingérence croissante de cette dernière dans les affaires des collèges. Récemment, la fédération a intensifié sa communication pour alerter sur les contraintes financières qui affectent les opérations des collèges privés, ainsi que sur le manque d’enseignants qui ont quitté pour les établissements d’État. À la sortie d’une rencontre avec la vice-Première ministre et ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun Luchoomun, mercredi dernier, Ramdass Ellayah n’était pas satisfait. «Mo finn dir minis ki ti bizin teste dan kolez piblik se ki pe fer ar kolez prive, pou ki zot konpran ki nou pe viv», nous déclare-t-il. La fédération des managers voit rouge !

Dialogue de sourds entre les collèges privés non-payants et les autorités de l’éducation ? “Oui”, répond Ramdass Ellayah, le président de la fédération des managers des colluèges privés. Bien que les différentes parties échangent et s’écoutent depuis quelque temps, aucun accord conclu en faveur des gestionnaires  n’a été atteint. À titre d’exemple, la dernière rencontre entre la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun Luchoomun, et les membres de la fédération des managers des collèges privés, qui a eu lieu mercredi dernier, n’a finalement rien donné. Même si, après avoir quitté le siège du ministère de l’Éducation, Ramdass Ellayah a exprimé sa satisfaction d’avoir pu rencontrer la ministre, les revendications des managers sont restées sans réponse. “Vu la situation à laquelle nous faisons face, l’ingérence de la PSEA qui veut tout contrôler, j’ai dit à la ministre qu’il n’y a plus de collèges privés!”, dit Ramdass Ellayah. Qui ajoute : “Mo finn dir li ki ti bizin teste dan kolez piblik se ki pe fer ar kolez prive, pou ki zot konpran ki nou pe viv !”
PSEA inflexible
Ce conflit, qui oppose les responsables des collèges privés aux autorités de l’Éducation, s’est intensifié après la présentation du budget 2024-2025. Tandis que les managers continuent de réclamer une révision des modalités concernant le paiement du Per Capita Grant de Rs 1,000 par élève, la PSEA demeure inflexible. En attendant, les managers multiplient leurs stratégies de communication, notamment avec les parents d’élèves, pour exprimer leurs griefs et craintes. Face à une situation qu’ils jugent critique, ils n’hésitent pas à se montrer pessimistes quant à l’avenir de certains établissements. Outre une insuffisance financière, le manque d’enseignants pourrait, selon Ramdass Ellayah, entraîner la fermeture de certains collèges secondaires privés. Et depuis que la Cour a rejeté la demande d’invalidation de la Revised Comprehensive Grant Formula (RCGF) – qui régit la subvention des collèges privés – par le collège Bhujoharry, en juillet dernier, le sentiment que l’avenir des établissements du secteur est aléatoire s’est accentué.
“Tout le mal vient du mécanisme de grant, c’est cela qui rend impossible notre gestion”, n’a cessé d’expliquer Jimmy Harmon, responsable du secondaire au Service diocésain de l’éducation catholique (Sedec) et membre co-opté de la fédération des managers. Il y a une semaine, ces derniers réitéraient le même discours face à des parents de collégiens privés à Flacq. Un appel fort a, d’ailleurs, été lancé en faveur d’une plus grande autonomie pour les établissements privés dans leurs décisions de gestion, leur offrant ainsi plus de liberté dans leurs opérations. De plus, les collèges privés ont appris que le Per Capita Grant leur serait attribué sous le Variable Grant, qui concerne les dépenses courantes. Selon la fédération, cela n’est pas juste, car le Variable Grant fait déjà l’objet de plusieurs déductions par la PSEA. Pour la fédération, l’intervention de cette autorité constitue une ingérence dans la gestion des collèges privés. Peu après la présentation du budget, les managers ont démontré que la PSEA procède effectivement à des déductions de leurs Variable Grants, contrairement à ce que la ministre de l’Éducation avait affirmé dans son discours. En évoquant l’argent des contribuables, Leela Devi Dookun-Luchoomun avait même souligné la nécessité de transparence. La fédération des managers avait alors rétorqué en affirmant avoir toujours appliqué cette pratique et s’était aussi interrogée sur la manière dont l’Éducation et la PSEA, également financées par des fonds publics, géraient la transparence.
Avec la mise en œuvre de la formule de grant 2024-26, le mécanisme d’application par la PSEA a entraîné de nombreux « disallowed items ». La liste est extensive : elle comprend les rideaux dans les salles de classe, la réparation et l’entretien de la logistique dans les bureaux administratifs, le thé ou le café pour les visiteurs, le nombre de médailles et de prix imposés par la PSEA, le coût du transport limité à Rs 2,600 pour les activités scolaires, la réparation des équipements, le service de sécurité et la formation du personnel dans des domaines non académiques. La fédération déplore également l’exigence de « prior endorsment » pour tout projet, ce qui, selon elle, constitue un « frein au progrès » dans les collèges du secteur privé.
“Même des collèges du Sedec ne pourront pas tenir”
Toutefois, mercredi dernier, lorsque la fédération des managers a expliqué à la ministre de l’Éducation ses difficultés financières surtout relatives aux réparations et à l’entretien des bâtiments, cette dernière aurait évoqué la Landlord and Tenant Act, loi stipulant qu’il revient au propriétaire d’une structure d’encourir tout frais de réparation. Mais pour la fédération des managers, même étant subventionnés, les collèges ne sont pas en mesure d’encourir d’importants frais pour la rénovation et l’entretien de leur structure respective. “Il y a des collèges qui opèrent dans des bâtiments loués. Comment font-ils ? Ils n’auront pas d’autres choix que d’aller vers une fermeture certaine. C’est du sérieux. Il y a des collèges dans les Plaines-Wilhems et à Port-Louis qui à coup sûr vont devoir fermer. Même des collèges du Sedec ne pourront pas tenir dans quelque temps”, prévient Ramdass Ellayah
Érosion d’enseignants
Lors de leurs différentes interventions, les membres de la fédération des managers ont attiré l’attention sur une autre problématique : l’érosion des enseignants dans le secteur privé. Ces derniers sont recrutés par les collèges d’État. “Nous sommes au troisième trimestre et à la veille des examens les plus importants, ils trouvent le moyen de nous prendre nos enseignants”, déplore Ramdass Ellayah. Bien que la fédération soit très préoccupée par le départ du personnel enseignant dans son secteur, elle a recueilli une proposition de membres de la PTA de l’Est pour remédier à ce problème. Il s’agit de permettre aux établissements privés de recruter des enseignants, même s’ils ne possèdent pas de Postgraduate Certificate in Education (PGCE), une flexibilité déjà accordée aux « enseignants suppléants » dans le secteur public.
Si les interlocuteurs des collèges privés restent insensibles à leurs revendications, des parents de l’Est ont suggéré deux actions possibles : lancer une pétition nationale ou organiser une manifestation de grande envergure pour défendre leur cause. Cependant, demain, la fédération tentera un nouvel appel auprès de la PSEA. Elle a rendez-vous avec son directeur, Shiv Luchoomun. “Je n’attends pas grand-chose de cette réunion”, annonce déjà Ramdass Ellayah. Néanmoins, la fédération espère tout de même “comprendre comment la PSEA conçoit les dépenses auxquelles ont droit les collèges privés.” À la veille des élections générales, la fédération des managers espère de meilleurs jours sous le gouvernement à venir. “Même lorsqu’il était Premier ministre, sir Anerood Jugnauth avait compris comment nous fonctionnons et voyait en nous des partenaires de l’éducation gratuite. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas ! Quant à l’opposition PTr/MMM, qui a affirmé qu’elle réexaminerait le système de grant dans sa forme actuelle si elle forme le prochain gouvernement, je ne peux qu’espérer qu’elle tiendra sa promesse”, conclut Ramdass Ellayah.

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