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Regressive Mark-Up sur le prix des médicaments – Les pharmaciens dans l’attente d’une rencontre avec le PM

Si leurs doléances ne sont toujours pas prises en compte, des actions fermes, dont le go-slow ou encore une grève des pharmacies, ne sont pas à écarter

Leur rencontre avec le Premier ministre Pravind Jugnauth sera décisive. Du moins, dans les jours à venir, une décision sera prise quant aux actions – dont la tenue d’un go-slow, voire d’une grève – annoncées par les membres de la Pharmaceutical Association of Mauritius (PAM) qui s’élèvent contre la décision du gouvernement d’introduire le regressive mark-up, soit la marge de profit en baisse sur les prix des médicaments augmentant le plus. Une telle mesure serait un coup de massue pour le secteur, disent les pharmaciens, qui affirment n’être pas responsables si les prix des médicaments augmentent.

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Gardant espoir d’une rencontre avec Pravind Jugnauth dans les jours à venir – cela, suivant l’accusé de réception reçu la semaine dernière après leur requête pour une rencontre avec le chef du gouvernement –, ils espèrent ainsi ramener le PM à la raison.

Pour la PAM, la décision du GM d’appliquer une marge régressive sur une série de médicaments – 8 des 11 types de produits pharmaceutiques incluant plus de 550 articles, dont les inhalateurs, les vaccins et les produits antiacides, les produits biologiques, anticancéreux, cardiovasculaires, antidiabétiques, médicaments contre l’hypertension, et un maximum mark-up de 30% sur les autres produits pharmaceutiques – est une décision prise sur le volet, sans analyse profonde de la part des techniciens du ministère du Commerce. « Ce qu’ils veulent faire, ce n’est pas du regressive mark-up, mais du reduction mark-up », avancent les membres de la PAM.

L’association soutient que le mark-up de 35% évoqué pour appliquer aujourd’hui le regressive mark-up n’est pas un profit individuel de chaque pharmacien. Elle soutient que les profits réalisés sont répartis sur toute la chaîne, entre l’importateur, le grossiste et le distributeur. Soit, 11% de la marge concerne l’importation et la distribution, alors que 21,6% de la marge vont au détaillant. Concédant que le prix des médicaments a augmenté dans le sillage de la pandémie de Covid-19, la PAM soutient que les facteurs à l’origine du phénomène sont en dehors de son contrôle. Il y a également la dépréciation de la roupie à tenir en compte et à laquelle il faut ajouter le coût du fret qui a augmenté de 50 à 60% par rapport à la période pré-Covid, ainsi qu’une hausse de 140% des matières premières sur le marché international. Outre les facteurs internationaux, la PAM avance qu’il faut considérer la hausse des tarifs d’électricité depuis le 1er février, la hausse du coût de la main-d’œuvre, les charges bancaires, les frais de location, le coût du carburant de 50% plus cher par rapport à la période d’avant-Covid. « Les pharmaciens se retrouvent, après les coûts d’opération, avec une marge nette de 1,5 à 2%. Pour survivre et offrir un service de qualité au public, le business doit attirer une marge décente », expliquent les membres de la PAM.

« C’est du reduction mark-up »

Les membres de la PAM se disent, dès lors, « victimes » de la décision du gouvernement qui, selon eux, « a agi sous pression ». Ainsi, pour ces professionnels du secteur pharmaceutique, s’il y a une baisse à appliquer, elle devrait concerner par le prix du carburant. « Si on baisse le prix du carburant, beaucoup de choses baisseront, dont le prix des médicaments», expliquent-ils. Cependant, si le GM va de l’avant avec sa décision d’introduire le regressive mark-up sur les médicaments, ce sera la fin pour beaucoup de pharmacies avec, dans le sillage, des pertes d’emploi, disent ces pharmaciens.

Rencontre décisive

D’où leur requête pour une rencontre avec le Premier ministre, par le biais d’une pétition déposée il y a plus de 15 jours au PMO. Ce n’est que la semaine dernière que la PAM a été notifiée que le bureau du PM a accusé réception de la requête des pharmaciens. Lettre dans laquelle il est aussi question qu’une rencontre aura effectivement lieu au PMO dans les jours à venir.

Rencontre qui devrait être décisive, indiquent les membres de la PAM, avec l’objectif de trouver ensemble une solution globale, car l’introduction du regressive mark-up, martèlent-ils, représente un danger pour la survie du secteur pharmaceutique. Toutefois, si cette rencontre attendue se solde par un échec des discussions et qu’aucune table ronde, comme ils le souhaitent, n’est organisée, les membres de la PAM entameront une opération go-slow à travers l’île pour se faire entendre. Une grève des pharmacies, avec seulement deux ou trois jours d’opération par semaine, n’est également pas à écarter en cas de sourde oreille des autorités dit la PAM.

Tengur (APEC) s’élève contre la menace de « go-slow » des propriétaires de pharmacies : 

L’Association pour la Protection de l’Environnement et des Consommateurs (APEC) s’élève vivement contre la menace de go-slow brandie par un front commun du secteur pharmaceutique pour protester contre l’adoption prochaine d’un système de Regressive Mark-Up pour le calcul de la marge de profits des pharmacies. Suttyadeo Tengur, animateur de cette association de défense des consommateurs, en appelle ainsi le GM à résister fermement aux manœuvres de ces propriétaires de pharmacies.

Comme dans le cas des prix des produits alimentaires et ceux des produits pétroliers, les prix des médicaments vendus dans le privé ont connu des hausses vertigineuses ces derniers mois par rapport à leurs niveaux d’avant la pandémie du Covid-19. Ainsi, selon certaines estimations, ces hausses ont atteint, dans beaucoup de cas, un pourcentage variant entre 40% et 75%.

S’il est vrai que comme pour d’autres produits importés, les prix des médicaments ont augmenté en raison de la faible parité de la roupie par rapport aux devises d’importation telles le dollar ou l’auro, ainsi qu’en raison de la hausse des coûts du fret, ces facteurs n’expliquent pas tout. C’est ainsi qu’une étude de marché de la Competition Commission of Mauritius (CCM), dont le rapport a été publié en juin 2021, a établi que la cause principale de ces hausses astronomiques se trouve dans le mode de calcul de la marge de profits des pharmacies.

Il a été, ainsi, révélé que depuis plus de 40 ans, le système existant de Fixed Maximum Mark-Up a permis aux wholesale et retail pharmacies de se partager une coquette marge de 35% de profits sur la vente de chaque médicament. Ce système désuet et injuste pour les consommateurs encourageait jusqu’ici les pharmacies à vendre des produits pharmaceutiques à leurs prix les plus forts. Et à, surtout, vendre les médicaments les plus chers en vue de se faire plus d’argent.

C’est ainsi que parmi ses recommandations pour assainir le commerce des produits pharmaceutiques, l’autorité de la concurrence a, dans son rapport, recommandé le remplacement de l’injuste Fixed Maximun Mark-Up par un système de marge progressive, le Regressive Mark-Up. Avec ce nouveau système qui a été, récemment, approuvé par le Conseil des ministres, plus le prix d’un médicament sera élevé, plus la marge de profit de la pharmacie sera moindre.

Parallèlement, plus le prix d’un médicament sera abordable pour le consommateur, plus la marge de profit de la pharmacie sera grande. À vrai dire, la Competition Commission n’a rien inventé puisque l’adoption d’un système de Regressive Mark-Up pour le calcul des marges de profits des pharmacies est l’une des directives de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à ses États-membres.

« Come with clean hands ! » est la demande de M. Tengur aux propriétaires de pharmacies. « Qu’ils aient, au moins, le courage de publier leurs structures de prix. L’on verra, alors, si les prix des médicaments ont baissé quand le coût du fret a baissé par le passé ou quand la valeur de la roupie s’est stabilisée par rapport aux devises d’importation ! ».

Pour l’animateur de l’APEC, cette menace de go-slow brandie est « scandaleuse ». Il appelle, conséquemment, le gouvernement à tenir tête aux protestataires. Et va même plus loin : « Pour stimuler la concurrence, l’État devrait envisager d’importer, lui aussi, des médicaments à travers la State Trading Corporation (STC) ou à travers une société d’État spécialisée ».

Et si, déclare Suttyadeo Tengur, les protestataires mettent en pratique leur menace, il faudrait aussi envisager d’accorder de nouveaux permis d’opération et de Retail Pharmacies à des « new players ». « L’on saura, alors, si le commerce des médicaments est à ce point un commerce non rentable!». De même, le responsable de l’APEC pense que le gouvernement peut aussi envisager de conclure des accords de gouvernement à gouvernement (government to government agreement) pour l’importation de médicaments comme, dit-il, cela avait été le cas par les vaccins anti-Covid durant la pandémie.

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