Projet de raffinerie de graphite à Mer-Rouge: Vers le rétropédalage…

Malgré l’assurance donnée par le promoteur qu’il respectera les normes environnementales et de sécurité

Le projet de création d’une raffinerie de graphite par la société canadienne NextSource Materials (NSM), dans la région portuaire à Mer-Rouge, n’a pas fini de faire couler de l’encre compte tenu des risques et périls qu’il pose à notre environnement et à la santé des riverains notamment. « Une bombe à retardement », martèle l’opposition. Après les révélations faites au Parlement par le Premier ministre à l’effet que « le projet est suspendu à la seule décision du ministre de l’Environement, Kavy Ramano, qui devra approuver ou rejeter la demande de certificat d’Environment Impact Assessment (EIA) de NSM », La société canadienne est sortie de son mutisme, jeudi, par le truchement d’un communiqué dans lequel elle fait valoir que, « au cas où elle obtient le feu vert des autorités locales, le Battery Anode Facilities (BAF) sera situé dans une zone industrielle et respectera les normes environnementales et de sécurité internationale les plus strictes. »

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C’est en février dernier que les premières bribes d’informations sont apparues au grand jour, suscitant un branle-bas du côté des membres de l’opposition parlementaire et des habitants des zones concernées. La société NSM, qui exploite notamment une mine de graphite dans le sud de Madagascar, a clairement affiché ses ambitions de construire une usine de fabrication de batteries lithium sur le site actuellement utilisé pour l’entreposage de toutes sortes de marchandises à Mer-Rouge, et embaucher, à terme, une centaine de personnes. On évoque alors de futures batteries «  made in Maurice  » devant être ensuite exportées. Le graphite est utilisé dans les batteries lithium des voitures électriques. Il y a environ 1,2 kg de graphite en paillettes dans chacune de ces batteries.

Là où le bât blesse demeure le fait que cet endroit est situé à 344 m du Rivulet Terre-Rouge Estuary Bird Sanctuary, soit bien plus que la zone tampon de plus de 30 m exigé par les lois environnementales. On commence à y voir plus clair sur les contours de ce projet pharaonique estimé à 50 millions dollars à la lumière de la PNQ du leader de l’opposition, Arvin Boolell, à l’Assemblée nationale, mardi. Le Premier ministre a déclaré qu’il y a un comité qui est chargé d’étudier les différents points de vue avant de donner le feu vert à ce genre de projets. « Ce projet comprend la purification de 8 000 tonnes de graphite par an afin d’obtenir 3 600 tonnes de graphite sphérique purifié. La zone de développement, qui s’étend sur 33 840 mètres carrés, a été louée à bail au promoteur par Mauritius Freeport Development Ltd. Un accord de bail a été signé en novembre 2023, mais ne sera effectif que lorsque le promoteur aura obtenu tous les permis nécessaires, incluant une licence EIA », a soutenu Pravind Jugnauth.

“Not in line with the recommended land use plan”
Le PM va plus loin dans son analyse qui laisse planer le doute sur l’éventualité que le projet devienne une réalité. La MPA a jugé les conditions du bail concernant les mesures de protection contre les risques à l’environnement de cette usine inadéquates, tout en informant le ministère de l’Environnement que « that the siting of the proposed undertaking of such complex chemical and industrial project within the Freeport Zone is not in line with the recommended land use plan of the area ». En réponse à une question supplémentaire d’Arvin Boolell, selon laquelle dans l’annexe du budget le gouvernement a proposé ce projet comme une nouvelle activité, Pravind Jugnauth a été encore plus loquace en maintenant que « cela ne veut pas dire qu’une autorisation a été donnée. Toute activité proposée, que ce soit dans la zone portuaire ou la zone du port franc, devra passer par une série d’autorisations. L’une des autorisations principales – du point de vue de l’environnement – est l’EIA. C’est ce qui est en train de se faire. J’espère que vous n’allez pas nous faire un procès d’intention alors que je vous ai clairement énoncé toutes les informations quant à cette application. »

Il est important de noter que face aux préoccupations des habitants de Baie-du-Tombeau l’année dernière, à l’effet que l’aménagement de la raffinerie de graphite allait se faire à Jin Fei, les promoteurs avaient demandé de déplacer le projet à Mer-Rouge. Face à la levée de boucliers des membres de l’opposition mardi, NSM n’a eu d’autres choix que d’émettre un communiqué pour jouer son va-tout dans une tentative, semblant a priori désespérée, de convaincre les autorités mauriciennes sur le bien-fondé de ce projet. La société réaffirme son engagement à respecter des normes de durabilité élevées au motif qu’elle est cotée à la Bourse de Toronto et que « le Battery Anode Facilities (BAF) sera situé dans une zone industrielle et respectera les normes environnementales et de sécurité internationale les plus strictes. » NSM souligne avoir « fourni aux autorités toutes les informations requises, y compris les réponses aux commentaires et avis, dans le cadre du processus continu de demande d’évaluation d’impact environnemental. »

Pour appuyer ses dires, la société canadienne souligne que « graphite is nothing more than a pure natural form of carbon. It is commonly known as a pencil lead and has been used by almost every student in every school across the world. » NSM conclut son analyse en mettant en avant le fait que « le BAF générera d’importants bénéfices économiques à long terme pour Maurice, créant des emplois et rapportant des revenus fiscaux, tout en permettant au pays de jouer un rôle de premier plan dans la transition mondiale vers une énergie propre. » Reste à savoir si Kavy Ramano, qui tente actuellement de redorer son blason…, prendra le risque de donner carte blanche au promoteur pour réaliser un tel projet controversé.

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