- Dix milliards de robots dans le monde d’ici 2050
L’intelligence artificielle (IA) entraîne des avantages énormes et sans précédent à divers niveaux, mais fera exploser la demande d’électricité dans les années à venir. Et il faut déjà se préparer à relever cet immense défi. Les spécialistes affirment qu’on ne mesure pas encore pleinement les besoins en énergie de cette technologie. Ce que l’on sait déjà , c’est que l’électricité consommée par les centres de données dans le monde devrait doubler d’ici 2026, notamment en raison de l’essor de l’IA et des cryptomonnaies, selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie. L’explosion de la demande d’électricité liée à l’IA a déjà des conséquences locales : aux États-Unis, elle génère des tensions sur les nouveaux projets de centres de données dans la Data Center Alley du Nord de la Virginie.
Julien Guillot-Sestier, fondateur de Turn Off Communications, explique qu’en Virginie, les centres de données consomment trop d’eau et que les choses ne feront qu’empirer avec l’IA. « Cet État abrite le plus grand marché mondial de centres de données. Dominion Energy a temporairement rationné l’alimentation électrique pour certains nouveaux centres de données. Cette mesure est en place jusqu’à l’achèvement de nouvelles lignes de transmission, malgré l’ajout annuel d’environ 15 centres de données. » A Salt Lake City, il y a un moratoire sur les grands projets de centres de données en raison de la saturation du réseau électrique. Les besoins énergétiques des Data Centres dédiés à l’IA pourraient croître de 160% d’ici 2030.
Pour ce qui est de l’impact sur la demande énergétique globale, aux États-Unis, les data centers pourraient représenter 9% de la consommation électrique d’ici 2030.
Julien Guillot-Sestier intervenait à la conférence organisée par FrenchTech Mauritius et la CCI France Maurice vendredi sur le thème AI : Tech for Good ?. Il a aussi expliqué qu’une recherche avec l’IA générative consomme 10 à 30 fois plus d’énergie qu’une recherche classique sur le net. De même, il a abordé l’empreinte carbone d’une session moyenne de ChatGPT qui est de 0,12g de CO2. Il a fait plusieurs comparaisons en termes d’émission de CO2, notamment entre Netflix et Chat GPT.
En matière de consommation d’énergie et d’impact environnemental, Julien Guillot-Sestier parle aussi d’explosion des besoins de la planète, avec une hausse de 17% de la consommation électrique liée à l’utilisation de Google (en 2023) et une hausse de 48% des émissions de carbone depuis 2019. De son côté, Microsoft a entraîné plus de 29,1% d’émissions indirectes entre 2020 et 2023.
Mais si l’IA implique une plus grande consommation énergétique, elle a également des utilisations et effets très positifs sur le développement durable, c’est ce qu’il appelle « le paradoxe de l’IA ». L’IA permet en effet de réduire les gaspillages, d’améliorer les procédures et d’atteindre une efficacité énergétique accrue. Elle a aussi des applications environnementales positives comme la modélisation climatique, la gestion des ressources naturelles, la création de nouvelles molécules pour batteries, le suivi de la biodiversité et l’optimisation des réseaux électriques. Mais il faut faire attention à  « l’effet rebond », celui qui se produit lorsque « les gains d’efficacité générés par une technologie entraînent une augmentation de son usage, annulant une partie des bénéfices écologiques attendus ».
L’intervenant a également abordé le volet des déchets électroniques générés par l’IA, qui atteindront 2,5 millions de tonnes en 2030. « Cette estimation indique la quantité de déchets électroniques que le développement de l’IA pourrait générer d’ici 2030 si aucune mesure n’est prise pour limiter son impact matériel. Ce chiffre reflète les équipements technologiques (serveurs, ordinateurs, puces, etc.) utilisés pour faire fonctionner et entraîner les modèles d’IA, ainsi que les infrastructures de centres de données nécessaires pour soutenir cette technologie. »
En volume, ces 2,5 millions de tonnes de déchets électroniques correspondent approximativement au poids de dix milliards de smartphones jetés, dit-il. Mais il existe certaines solutions pour limiter l’impact de l’IA sur la consommation électrique avec des algorithmes tels que CarbonMin pour réduire de moitié les émissions des centres de données, d’ici 2035.
Charlotte Govin, Non-Executive Director chez Emtel et membre du conseil d’administration de FrenchTech Mauritius, a évoqué les risques liés à l’IA, notamment en termes de déshumanisation de certains secteurs. Elle a parlé des enjeux avec l’élection de Donald Trump aux États-Unis, qui a clairement fait comprendre qu’il souhaite pousser l’essor de l’IA. « L’élection de Trump marque le début d’une nouvelle course qui compte deux principaux acteurs : les États-Unis et la Chine. L’IA est là pour rester, elle va s’accélérer, et il faut absolument participer à cette révolution. »
Il y a déjà de multiples exemples ou l’IA a eu un impact phénoménal. « Les sourds sont capables de réentendre grâce à des dispositifs qui transforment le son; les handicapés sont capables de marcher grâce à des robots. À cet égard l’IA est un vecteur d’inclusion », dit-elle. Il existe aussi des jeux vidéo pour malvoyants qui utilisent l’IA pour recréer des graphiques beaucoup plus simples, et les joueurs peuvent jouer grâce à des vibrations.
L’IA ouvre la voie à des progrès fulgurants, comme on a pu voir récemment un chirurgien de Bordeaux opérer un patient en Chine à distance. L’IA peut détecter certaines pathologies comme le cancer, bien avant l’humain, tout cela alors que le monde n’en est encore qu’aux débuts de l’IA… « Dans pas longtemps, on pourra demander à l’IA de concevoir un médicament adapté à un individu, tenant compte de son histoire génétique, de sa maladie et d’autres facteurs », dit-elle.
Parallèlement, les robots vont envahir le monde dans les prochaines années. Elon Musk a déjà annoncé qu’il y aurait dix milliards de robots d’ici 2050. Pour Charlotte Govin, l’IA et la robotique peuvent apporter une grande aide aux PME et aux entrepreneurs en général. « Si vous avez une idée, vous pouvez accélérer votre processus de création, et ça, c’est très important, si vous avez la capacité de vous projeter. » Dans le futur, les robots accompliront diverses tâches, comme remplacer le personnel médical dans les hôpitaux et aider les personnes isolées dans leurs tâches quotidiennes.