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PAUVRETÉ: Faire face à l’hiver quand on n’a rien… ou presque

Le mauvais temps de la semaine dernière a fait chuter la température et corsé l’hiver. Dans les familles vivant dans des maisons précaires, sans aménités et électricité, enfants et adultes doivent faire face au froid avec peu de moyens, parfois des plus basiques. Faute de couverture, Marie-Claire, mère qui élève seule ses deux enfants, a cousu du goni entre deux draps pour que ces derniers puissent se couvrir le soir quand ils dorment sur leur lit de fortune. Sonia, une autre maman, demande à ses cinq enfants de remettre les chaussettes qu’ils ont portées pour aller à l’école avant de se coucher pour ne pas avoir froid aux pieds. Il y a encore quelques jours, cette mère n’avait pas de couverture en laine pour protéger ses enfants du froid. Et quand elle n’a rien à leur donner à manger, elle se rend à une grotte pour ramasser les pains qui ont été déposés en offrande à Saint Antoine…
Ce soir-là, comme la plupart des autres d’ailleurs, le foyer en bois qui est à l’extérieur de leur maison, est la seule source de chaleur que connaissent Marie-Claire et ses deux enfants. L’humidité, le froid, l’obscurité et la pluie… la mère de famille, 46 ans, et ses petits en sont habitués. Par obligation. Les enfants, eux, ont toujours vécu dans la précarité. Mais, ce soir-là, le temps est particulièrement venteux. La température a baissé et il fait très froid. Sur le feu, une marmite a pression découverte laisse entrevoir le repas du soir. De temps en temps, à l’aide d’une bougie, Marie-Claire va remuer le contenu pour qu’il ne brûle pas. Sa fille cadette, Valencia, 12 ans, prend le relai. « Zordi monn kwi enn kari dal ek papay… », dit Marie-Claire. « Nou ti al kass papay dan simityer. Nou abityé kass papay laba », dit sa fille. Une fois à l’intérieur de la maison, l’on se rend compte que Marie-Claire et ses enfants  — qui ne portent pas de vêtements chauds — ne sont pas pour autant à l’abri du froid. Comme quasiment toutes les maisons de la cité, où vit Marie-Claire, la sienne est en dur, mais en très mauvais état. Composée de deux pièces, la maison — qu’elle ne loue pas—, ne dispose pas de salle de bains, ni de toilettes attenantes. Les sanitaires sont à l’extérieur et ne sont que partiellement couverts. Matériellement, la mère de famille est complètement démunie. Le strict minimum : fauteuils, lit, sur lequel le benjamin de 6 ans est sur le point de s’effondrer. Quand on n’a rien, il n’est pas évident d’affronter l’hiver dans de telles conditions. 
« Mo pa ti éna molton pou donn zot »
« La vie est un peu moins dure en été », dit Sonia Rousselin, 30 ans. Toutefois, pour cette mère de cinq enfants, qu’importe la saison, la misère a toujours le même goût, celui de l’amertume. « Omwin lété fer in pé pli kler. Pa servi mem kantité labouzi ki an iver. Sirtou pa fer oussi fré », explique-t-elle. L’achat des bougies représente, pour les Rousselin, un budget mensuel de Rs 600. Avec son mari et ses enfants, Sonia vit dans une maison en bois et en tôle, à quelques minutes d’un centre-ville. Ce toit qu’ils ont trouvé il y a cinq mois, après avoir connu des problèmes de logement, le couple le loue à Rs 2 000 mensuellement. La maison, prête à céder au moindre souffle, n’est pas connectée à l’électricité. A la tombée de la nuit, chaque coin de la maison laisse passer le froid. Le sol glacial est humide. Dehors, il ne cesse de pleuvoir. Et ceux de la famille qui ont envie de se rendre aux toilettes, auront à attendre l’accalmie, car celles-ci se trouvent à l’extérieur de la maison. Comme chez Marie-Claire, le confort est sommaire chez les Rousselin. « On se débrouille comme on peut », confie la mère de famille. « Pour nous réchauffer le soir… nous n’avons pas grand-chose », dit-elle. Grâce aux couvertures qu’elle a reçues un peu plus tôt dans l’après-midi, ses enfants peuvent, désormais, dormir un peu plus au chaud. « Mo pa ti éna molton pou donn zot. Aswar sakenn ti pé kouver ek enn dra », confie Sonia Rousselin en nous montrant la chambre où dorment ses cinq enfants. Deux lits occupent la pièce froide. « Zot kosté ensam pou zot pa gayn fré« , explique-t-elle. « Comme nous n’avons pas d’électricité, la télévision ne sert à rien. Les enfants sont au lit à 19 heures et nous, un peu plus tard. Avant dormi nou bwar dité pir byen so. Sa mem kapav sof nou in pé », poursuit Sonia Rousselin.
Du riz grillé avec du sucre, pour remplacer le thé
Le couple Rousselin éprouve des difficultés à subvenir aux besoins de ses  cinq enfants. Maçon, le salaire du mari, Désiré, est aléatoire. Quant à sa femme, elle vient de trouver de l’emploi: deux fois par semaine, dans une ferme. « Je toucherai Rs 2 000 par mois », explique cette dernière. Mais le budget du couple ne sera pas suffisant pour améliorer la vie de ses enfants — tous scolarisés — et l’achat de vêtements presque impossible. Actuellement, faute de pull-overs, les enfants portent les sur-vêtements d’école à la maison et les mêmes chaussettes pour dormir. « Mo péna lot soset  pou donn zot. Les jours de grosses pluies, lorsque leurs effets sont mouillés, comme je n’ai pas de vêtements et chaussures de rechange, je ne peux pas les envoyer à l’école. Je ne peux faire autrement », affirme Sonia Rousselin. Marie-Claire Garnette, elle, n’a qu’un lit, qu’elle partage avec ses deux enfants. Son lit n’est en fait qu’un amas de bois, qui a du mal à supporter le poids des trois. « Lili inn déza kassé létan nou pé dormi aswar », raconte Valencia. Une éponge usée sert de matelas. Faute de couverture épaisse, Marie-Claire avait trouvé un moyen pour garder ses enfants au chaud pendant leur sommeil. « Monn koud enn goni ant dé drap », explique la maman. A contarie de chez les Rousselin, même le thé « pur » est rare chez Marie-Claire. Pour remplacer le lait ou toute boisson chaude, elle fait griller des grains de riz qu’elle mélange avec du sucre. Une fois cette préparation torréfiée et caramélisée, elle ajoute de l’eau et obtient une boisson sucrée qui lui rappelle vaguement le café. 
Après l’école, elle va travailler pour Rs 15
Marie-Claire Garnette n’a pas d’emploi fixe. « Le père de mes enfants est parti il y a deux ans. J’ai des soucis de santé. Regardez ma cheville », dit-elle en montrant son pied enflé. Pour habiller et nourrir ses enfants, elle fait le ménage chez des particuliers et compte sur l’aide de gens de bonnes volontés. « Mwa osi mo al travay parfwa », nous glisse la petite Valencia. Elle confie: « éna vandredi kan mo sorti lékol mo al kot dimoun mo nétwayé, mo ras lerb… Mo gayn dis, kenz roupi. Mo donn mo mama larzan pou asté dipen. » Sa mère, qui n’a pas les moyens pour acheter de la nourriture, explique qu’elle doit se débrouiller comme elle peut. « Parfwa mo gayn latet diri, mo ramasé pou mo kwi. Kan mo péna nanié, mo al rod papay ek bred dan simitier. Si péna dipen, mo al lagrot Saint Antoine la mo koné mo pou gayné », confie Marie-Claire Garnette. Comme elle, Sonia Rousselin compte sur l’aide d’une organisation non-gouvernementale pour donner du lait, chaque matin, à ses enfants. Malgré ce soutien, ce n’est pas tous les jours qu’elle peut remplir leur tasse. 
Quand le temps est mauvais et qu’elle ne peut préparer le repas, sur le foyer en bois, à l’extérieur, Marie-Claire Garnette, improvise un four dans sa pièce principale. La gazinière de la petite cuisine, pauvre en ustensiles, n’a plus servi depuis très longtemps. Chez le couple Rousselin, ce sont les bougies qui éclairent sa maison dès la tombée de la nuit. Y compris la chambre des enfants et ce jusqu’au petit jour. « Je sais que c’est dangereux, mais nous habitons dans une cour qui n’est pas éclairée. Ici, nous sommes plongés dans l’obscurité », explique Sonia Rousselin. Une maison, en dur, dotée d’électricité, c’est ce que rêve Désiré Rousselin pour ses enfants. De son côté, Marie-Claire Garnette, elle, voudrait travailler. « Quand mon mari vivait encore chez moi, nous avions une petite économie qui nous a permis d’acheter un tricycle. Celui-ci est toujours là. Si je pouvais, j’en utiliserai pour vendre des snacks devant ma cour. L’argent servirait à consolider ma maison et pour mes enfants. Mo ti a kontan éna enn lakaz ki éna enn kou dey », confie Marie-Claire Garnette. 
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