Avec l’acquisition d’un four flambant neuf de la marque italienne, Europa — modèle Galileo —, la boulangerie de la prison de Beau-Bassin sise à la New Wing alimente en pains, depuis mercredi, la Police Training School qui se trouve juste à côté du centre pénitencier des villes-soeurs. Mais l’effectif de cette fabrique de pains un peu particulière placée sous la responsabilité du Prison Officer, Giandev Venkatasamy, sous la supervision directe de M. Ravind Lugun, Assistant Commissioner of Prison responsable de la New Wing, ne compte pas s’arrêter en si bon chemin.
Bientôt, en effet, ce sont les patients internés sous traitement psychiatrique au Brown Sequard Mental Health Care Centre qui se situe, tout aussi, dans le voisinage immédiat de la prison de Beau-Bassin qui mangeront, à leurs repas, du pain particulièrement croquant des prisonniers et dont la recette de fabrication vieille de plus d’un demi-siècle date du tout début des années 50′, à l’époque coloniale britannique. Les officers de prisons pourront, eux aussi, recommencer, comme dans le temps, à manger de ce pain en se le procurant à la boutique de la prison.
Fruit du travail d’une équipe de douze personnes — huit détenus et quatre officiers —, le pain de la prison de Beau-Bassin et, ainsi, le produit final d’une recette jalousement gardée et transmise de génération en génération. M. Lugun explique même que, durant la période coloniale, hormis les prisonniers et les officiers, le gouveneur-général britannique d’alors était parmi les autres rares privilégiés qui consommaient, quotidiennement, ce pain.
Opérationnelle à la New Wing depuis 2006, la boulangerie de la prison qui avait, jusqu’ici, une capacité de production quotidienne de quelque 10 000 pains est, désormais capable de produire, au moins, un milliers de pains additionnels depuis vendredi de la semaine d’avant avec l’installation du nouveau four de fabrication européenne fonctionnant à l’électricité et au gaz. En fait, le nouveau four italien, Europa Galileo, acquis par le service des prisons pour la somme de Rs 1.7 million a, à lui seul, une capacité de production maximale de pas moins de 672 pains en une seule fournée.
Cela se compare très favorablement avec les deux anciens équipements toujours en opération à la boulangerie et qui n’ont, eux, qu’une capacité de ne produire que seulement entre 300 et 360 pains en une fournée chacun. Avec le contrat d’approvisionnement obtenu auprès de la Police Training School, il faut dire que, depuis mercredi, l’horaire de travail à la boulangerie de la prison a été, quelque peu, modifié. Ainsi, c’est, désormais, dès 3h00 du matin que l’on met les mains à la pâte en vue de la livraison de quelque 600 pains aux stagiaires de la police dès 5h30. Jusqu’ici, le travail à la fabrique ne démarrait que vers 5h00.
Mais, pour autant, cela n’est pas pour déplaire aux huit détenus qui y sont actuellement affectés. Ainsi, Jean-Michel explique : « Monn komet enn erer, mo dan prizon. Mo kontan fer sa travay là. Bann ofisié ankouraz nou pou ki nou kapav gagn enn métié kan nou sorti. Avek sa travay dan boulanzri, mo pou kapav, ousi, sorti pli vit. » Ravind Lugun, Assistant Commisioner of Prison confirme, en effet, que décision a été prise par l’administration pénitentiaire dirigée par M. Jean Bruneau de permettre aux détenus qui travaillent à la boulangerie de disposer d’une remise de peine en fonction du temps supplémentaire qu’ils consacrent à ce travail.
En fait, même si pour la tâche accomplie, ces détenus ne bénéficient que d’une allocation plutôt que d’un salaire, à proprement parler, les heures de travail régulier sont comme c’est, généralement, le cas dans la vie civile ; à savoir, huit heures de travail quotidien. Ainsi, c’est le surplus accompli en sus de ces huit heures qui est comptabilisé pour la remise de peine. Chaque fois qu’un détenu atteint 24 heures de travail supplémentaire, un jour de remise lui est, en effet, accordé sur sa peine.
De même, l’allocation accordé est en fonction des aptitudes des uns et des autres. Elle varie selon que le détenu soit un « unskilled », « semi-skilled » ou un « skilled worker ». La formation se fait surtout sur le tas par les Prison Officers encadreurs qui ont, eux, été formés dans les métiers de la boulange auprès du Mauritius Institute of Training and Development (MITD). Et puisqu’il est question de la préparation de la nourriture, il faut dire que tous ceux qui sont affectés à la boulangerie de la prison passent, préalablement, un examen médical.
Un suivi est aussi assuré quant à la Santé de ce personnel, soutient M. Lugun. M. Ventatasamy cite, notamment, pour sa part, les exemples d’Adriano et de Afzal, deux anciens détenus ayant été affectés à la boulangerie de la prison et qui, depuis qu’il ont retrouvé la liberté, se sont réinsérés, professionnellement, en trouvant de l’emploi dans deux boulangeries, l’une située dans un village du Nord, l’autre dans un de l’Est.
Pour revenir aux produits fabriqués à la boulangerie selon la vielle recette léguée d’une génération à l’autre, le responsable de la fabrique explique que ce sont le pain au beurre et la baguette outre le pain dit « ordinaire ».
Ceux qui auront goûté aux pains produits à la prison dans le temps se rappellent, pour leur part, du moule collé. Au départ, en 1951, le pain de la fabrique était, essentiellement, destiné aux seuls détenus. A partir de septembre 1956, la décision fut prise par l’administration de vendre le surplus produit au personnel d’encadrement de la prison.
Avec l’accroissement, au fil des ans, de la population carcérale, l’ambassade de France fit don, en 1988, d’un four électrique capable de produire du pain pour être fourni à l’ensemble du département des prisons. C’est en 2004, avec l’ouverture de la New Wing à Beau-Bassin, qu’une nouvelle boulangerie dotée de deux fours entra en opération. Toutefois, les équipements de cette nouvelle boulangerie devait subir d’importants dégâts lors d’un incendie en 2009.
A partir de cette année, la production de pain à la prison de Beau-Bassin s’en retrouva réduite et une partie des besoins devait être achetée auprès d’une boulangerie privée. Jusqu’à ce qu’en janvier 2011, la boulangerie de la New Wing retrouve sa pleine opération et une production correspondant à la demande. Pour le Commissaire des Prisons, M. Jean Bruneau, et comme expliqué, précédemment, le projet en cours vise à donner aux détenus l’opportunité d’acquérir les aptitudes nécessaires dans la fabrication de pains susceptibles, plus tard, de leur être utiles une fois libérés.
M. Bruneau explique aussi qu’avec l’ouverture de la nouvelle prison de Melrose, le département des prisons compte augmenter encore sa production de pains. Il assure que la qualité du produit fabriqué est bonne. « Notre pain a une saveur particulière », s’exclame-t-il. Ce qu’attestent, en effet, tous ceux qui ont eu la chance de manger de ce pain autant croquant que goûteux.
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LA NEW WING PRISON: Une unité carcérale de transition
Ouverte en 2003, la New Wing Prison de Beau-Bassin est, en fait, l’unité carcérale de transition qui accueille, notamment, les First Offenders au moment où les condamnés et autres prévenus sont conduits en prison sur un ordre de Justice. Il s’est donné pour vocation de répondre aux besoins du détenu en matière psychologique, familiale, de réinsertion, de Santé et de councelling, entre autres. Cette prison, explique son responsable, M. Ravind Lugun, dispose, à cette fin, d’une équipe de professionnels, dont un Welfare Officer.
A l’origine, c’est là aussi qu’il avait été convenu d’incarcérer les détenus malades du VIH/sida. Elle compte une population d’entre 300 à 325 détenus. C’est cette prison qui fournit aussi la main-d’oeuvre dont a besoin le service pénitentiaire. C’est après avoir, un certain temps, transité par ce centre pénitencier que l’administration décide dans quelle autre prison transférer chacun des prisonniers qui lui est référé.
MONDE CARCÉRAL: Du pain sur la planche
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