Deux publications importantes ont marqué l’actualité du kreol morisien cette semaine. Il s’agit de la publication de la deuxième édition du Diksioner kreol morisien et de l’ébauche du premier curriculum de la langue kreol en vue de son introduction dans les écoles primaires en janvier 2012. Ces deux publications sont d’une importance capitale dans un contexte où l’État mauricien s’engage pleinement dans la reconnaissance de la langue kreol.
Quoiqu’encore au stade expérimental, le National Curriculum Framework Kreol Morisien Std I-VI, préparé par la Mauritian Kreol Unit du Mauritius Institute of Education (MIE), est une première. Ce document technique, daté du 25 juillet dernier, donne un aperçu de ce que les prochains enseignants de la langue kreol morisien — comme matière optionnelle — auront à mettre en pratique en classe. Scindé en cinq parties pour chaque classe, le curriculum préconise le développement de la langue pour faciliter la communication et l’interaction chez les apprenants. Le kourikoulum pou Kreol Morisien pour les élèves de Stds I-II, repose sur les axes suivants : Devlop enn sansibilite pou liniver bann son, Langaz pou sosialize, kominike ek azir, Langaz pou devlop kapasite panse, Langaz pou literesi et enfin Bann konsept e zouti langaz. Le programme est quasiment similaire pour les autres classes. A ce stade, le programme ne fait pas mention du développement de l’aptitude des apprenants en numeracy. Si l’objectif de la langue kreol morisien comme matière optionnelle, au même titre que les langues orientales, n’est pas d’enseigner les mathématiques, les nombres et leurs adjectifs font cependant partie intégrante du vocabulaire kreol.
D’ailleurs, le National Curriculum Framework Kreol Morisien ne fait aucune mention de ses objectifs. Le document de la MIE est appelé à évoluer, dans la mesure où le ministère de l’Education avait, dans un communiqué émis en août dernier, fait appel à des compétences pouvant contribuer au développement du curriculum de la langue kreol morisien. Ceux qui ont démontré leur intérêt ont jusqu’au 23 septembre pour soumettre leurs propositions. La publication du curriculum final arrivera après la formation des enseignants. D’aucuns dans le milieu de l’éducation s’interrogent sur l’ordre des priorités.
D’autre part, le nombre d’enseignants (sept) venant des écoles catholiques et qui enseigneront le kreol morisien en 2012, est jugé insuffisant dans le milieu de l’éducation catholique. Le Bureau de l’Education Catholique (BEC) gère en effet 46 établissements primaires, et celui-ci compte demander la création de 60 nouveaux postes pour les enseignants de la langue kreol.
Dictionnaire : enter lager, kliantel, trantsink…
C’est lundi dernier que la deuxième édition du Diksioner kreol morisien a été officiellement lancée en présence du Premier ministre, Navin Ramgoolam. Tout comme l’a été sa précédente édition, le Diksioner kreol morisien est une initiative du linguiste et fervent militant de la langue kreol, Arnaud Carpooran. Pour ce nouvel ouvrage, il a bénéficié du concours des étudiants de l’Université de Maurice, et de la contribution de plusieurs participants mauriciens et du spécialiste martiniquais sur la question de la langue créole, Jean Bernabé. Arnaud Carpooran explique qu’au cours de la préparation du dictionnaire, il avait invité tous ceux intéressés à renforcer son ouvrage par des mots qui n’étaient pas mentionnés dans la première édition de lui faire parvenir leurs suggestions. C’est ainsi qu’un millier de mots, nouveaux et anciens, proposés par des membres du public, figurent désormais dans le présent Diksioner kreol morisien. Et c’est au total 1 500 mots, comprenant entre autres lager, kliantel, trantsink… qui sont venus enrichir le dictionnaire, qui se retrouve ainsi avec 200 pages de plus que la précédente édition.
Avec la collaboration d’étudiants de l’Université, notamment ceux d’origine rodriguaise, le linguiste a pu inclure des termes qui relèvent du monde professionnel, artisanal et manuel. Il cite surtout des outils, tel le gratwar (utilisé par les bijoutiers). On trouve également le terme gato koko, qui n’est pas uniquement une pâtisserie locale mais aussi une expression courante chez les maçons. Les étudiants de Rodrigues ont répertorié des expressions typiques de leur île. Quant à celles d’origine chagossienne, c’est avec l’aide de la communauté vivant à Maurice que le linguiste a pu recueillir les mots qui sont propres aux natifs de l’archipel.
Dans la prochaine édition, Arnaud Carpooran compte inclure des mots du vocabulaire agaléen. « Dans le cas d’Agalega, cela requiert un travail spécifique », explique Arnaud Carpooran. Ce dernier précise également que la deuxième édition du Diksioner kreol morisien inclut également des lexiques, anglais/kreol et français/kreol, à l’intention des étrangers.
KREOL MORISIEN À L’ÉCOLE — Curriculum national : l’ébauche prête
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