Le Guide - Législatives 2024

Cour suprême : Me Sulakshna Beekarry-
Sunassee devient juge à 46 ans

La benjamine des juges en poste est une ex-lauréate et a fait ses études de droit à la prestigieuse London School of Economics and Political Science

  • Pravin Harrah et Kesnaytee Bissoonauth également nommés juges

La Judicial and Legal Service Commission (JLSC) n’a pas mis longtemps pour remplir les postes vacants de Puisne Judge à la Cour suprême. Conformément à l’article 77(3) de la Constitution, elle a recommandé au président de la République, Prithvirajsing Roopun, de nommer Mes Sulaskshna Beekarry-Sunassee, Pravin Harrah et Kesnaytee Bissoonauth au poste de juge avec effet à partir de mercredi 3 mai dernier.

- Publicité -

Avec ces nominations, le nombre de juges siégeant à la Cour suprême passe à 24 (voir tableau ci-dessous).

Des trois nominations, c’est sans doute celle de Sulakshna Beekarry-Sunassee qui retient l’attention. Née le 3 octobre 1976, Me Beekarry-Sunassee accède au poste de juge à seulement 46 ans. Même si cela ne constitue pas un record de précocité — en 1994 l’ancien chef juge Eddy Balancy et Devianee Beessoondoyal avait été nommés juges à 41 et 44 ans respectivement —, elle est la seule des sitting judges à accéder à ce poste à un aussi jeune âge. Avant elle, les Aruna Devi Narain et Nicolas Oh San-Bellepeau avaient été nommés juges à l’âge de 47 ans.

La benjamine des juges est une ex-lauréate du QEC. Elle a fait ses études de droit à la prestigieuse London School of Economics and Political Science (LSE) et détient une maîtrise en droit commercial du non moins prestigieux King’s College, Cambridge. Mme Beekarry-Sunassee, qui s’est jointe au judiciaire en 2003 en tant que State Counsel, a gravi tous les échelons, jusqu’à occuper, avant sa nomination, le poste d’Assistant Solicitor-General. En tant qu’avocate, elle a travaillé sur de nombreux high profile cases, que ce soit au bureau de l’Attorney General (les récentes pétitions électorales) ou celui du Directeur des Poursuites publiques (l’affaire L’Amicale en appel au Conseil privé ou celle des pirates somaliens en 2015).

Elle a aussi présidé l’Assessment Review Committee (ARC) et l’Equal Opportunities Tribunal (EOT). Très pieuse, la nouvelle juge a publié des ouvrages dans le domaine du droit international et de la piraterie en Inde et aux États-Unis (Case Western University Law Journal) et sur les devoirs du Procureur dans l’Institute for Judicial and Legal Studies (IJLS) Journal sur le plan local. Elle est mariée à l’avocat Avinash Sunassee, qui exerce aux Ravind Chetty Chambers.

Des examens pour la première fois

Si Me Beekarry-Sunassee a été nommée juge à un assez jeune âge, Pravin Harrah ne l’est pas moins. Né le 22 avril 1975, il accède, à 48 ans, à une des fonctions les plus importantes dans le judiciaire, auquel il s’est joint il y a 19 ans en tant que State Counsel. S’il a débuté au bureau de l’Attorney General, c’est essentiellement au bureau du DPP que le nouveau juge a fait sa carrière qu’avocat, où il a occupé tour à tour les postes de State Counsel, Senior State Counsel, Principal State Counsel et Assistant Director of Public Prosecutions.

Récemment, il a été muté à la magistrature, où il a été respectivement président de la Cour intermédiaire (Division Civile), président de la nouvellement créée Children’s Court, et avant sa nomination comme juge, président par intérim de la Cour industrielle. Pravin Harrah a aussi été le Returning Officer de la circonscription N°1 (Grande Rivière Nord-Ouest-Port Louis Ouest) aux dernières élections générales, où les candidats du MMM Arianne Navarre-Marie, Veda Baloomoody et Giovanni Catherine avaient contesté l’élection de Fabrice David (PTr), Dorine Chukowry (MSM) et Patrice Armance (PMSD).

Née le 26 août 1962, Kesnaytee Bissoonauth, 60 ans, accueille sa nomination comme la consécration d’une carrière longue de 23 ans dans le judiciaire. Avant qu’elle ne soit nommée juge, Mme Bissoonauth occupait le poste d’Acting Master & Registrar et juge des Faillites à la Cour suprême. Auparavant, elle a siégé principalement à la Cour intermédiaire et a aussi été Assistant Solicitor General pendant un bref moment.

C’est la première fois que la nomination de juges est faite par sélection (by selection), c’est-à-dire après des examens écrits et oraux. Jusqu’à tout récemment, les juges étaient nommés par promotion (by promotion) sur la base d’ancienneté (seniority) parmi les membres les plus seniors du judiciaire qui comptaient plus de cinq ans de pratique comme avocat au barreau. Cette année, ils sont 18 à avoir postulé aux postes de juges qui étaient à pourvoir — dont seulement trois ont été remplis — suivant un appel à candidatures.

Les examens étaient placés sous l’égide de la JLSC. C’est Me Beekarry-Sunassee qui s’est classée première à l’issue de ces examens, suivie de Me Harrah et Me Bissoonauth. Cet ordre d’arrivée à toute son importance, dans la mesure où elle détermine l’ancienneté des uns et des autres. Ainsi, Mme Beekarry-Sunassee est considérée comme plus ancienne des trois, quand bien même elle s’est jointe au judiciaire bien après Mme Bissoonauth (voir tableau ci-dessous).

Comme toute nomination de juge a un effet domino sur la hiérarchie tant au niveau de la magistrature que du bureau de l’Attorney General et du DPP, il faut s’attendre à des nominations imminentes pour remplir les vacances qui ont été occasionnées par la nomination des nouveaux juges.

Des nominations qui font jaser
Si à ce stade ça ne rue pas dans les brancards, la nomination des trois juges fait quand même jaser dans les couloirs du judiciaire. En effet, dès mardi soir, date du communiqué de la présidence, des voix se sont élevées en privé pour exprimer leur frustration. Loin de mettre en doute les compétences des heureux élus, certains avocats et anciens magistrats qui ont été recalés aux examens et qui revendiquent plus de 25 ans d’expérience fulminent contre le fait qu’on ait changé le scheme of promotion cette année en introduisant une nomination par sélection (c’est-à-dire après examens et interview), alors c’était le critère d’ancienneté qui était appliqué jusqu’à tout récemment. Ils se disent lésés par cette décision et craignent de ne pouvoir jamais accéder aux fonctions de juge malgré leur longue expérience. Il nous revient que la frustration est encore plus grande au bureau du DPP, où aucun officier — et non des moindres — n’est parvenu à passer ces examens.

On the Bench dès aujourd’hui
Pas de lune de miel pour les nouveaux juges. Avec la Cour suprême entamant cette semaine le deuxième trimestre après les vacances d’avril, ils seront on the bench dès demain matin. La juge Beekarry-Sunassee sera aux côtés de la juge Rita Teelock en cour n°6 pour écouter deux affaires : Sookayee v The State et Regnard v Société du Soleil Levant. Le juge Pravin Harrah sera lui aux côtés de la juge Gaitree Jugessur-Manna en cour n°11 pour écouter l’affaire Wong Yuen v Bathfield. Quant à la juge Bissoonauth, elle sera aux côtés de la juge Aruna Devi Narain pour écouter l’affaire AAWM Services Ltd v The Assessment Review Committee en cour n°9.

La Cour suprême telle que présentement composée (en ordre d’ancienneté) avec les noms des trois juges nouvellement nommés en gras

Nom Age Position
1. Bibi Rehana Mungly -Gulbul 63 Cheffe Juge (CJ) 1986 2008
2. Nirmala Devat 62 Senior Puisne Judge (SPJ) 1991 2009
3. David Chan Kan Cheong 60 Puisne Judge 1991 2011
4. Rita Teelock 59 Puisne Judge 1991 2011
5. Mohammad Iqbal Maghooa 61 Puisne Judge 1994 2014
6. Gaitree Jugessur-Manna 59 Puisne Judge 1994 2014
7. Aruna Devi Narain 55 Puisne Judge 1994 2015
8. Nicolas François Oh San-Bellepeau 53 Puisne Judge 1995 2016
9. Véronique Kwok Yin Siong Yen 57 Puisne Judge 1996 2016
10. Shameem Banon Ayyub Hamuth-Laulloo 56 Puisne Judge 1996 2017
11. Karuna Devi Gunesh-Balaghee 52 Puisne Judge 1996 2018
12. Patrick Michel Tat Kon Kam Sing 54 Puisne Judge 1996 2018
13. Renuka Devi Dabee 52 Puisne Judge 1997 2019
14. Raatna Seetohul-Toolsee 54 Puisne Judge 1997 2019
15. Johan Moutou-Leckning 52 Puisne Judge 1997 2019
16. Jane Lau Yuk Poon 55 Puisne Judge 1997 2019
17. Mohanasundary Naidoo 54 Puisne Judge 1998 2020
18. Lutchmeeparsad Aujayeb 54 Puisne Judge 1997 2020
19. Prameeta Devi Rasheela Goordyal-Chittoo 53 Puisne Judge 1998 2020
20. Denis Claude Nelson Mootoo 54 Puisne Judge 1998 2020
21. Carole Green-Jokhoo 52 Puisne Judge 1999 2020
22. Sulakshna Beekarry-Sunassee 46 Puisne Judge 2003 2023
23. Pravin Harrah 48 Puisne Judge 2004 2023
24. Kesnaytee Bissoonauth 60 Puisne Judge 2000 2023
Ndlr : Selon la Constitution, un juge (CJ, SPJ ou Puisne Judge) doit vacate his office à l’âge de 67 ans.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -