En cette période de fin d’année, marquée par la frénésie des achats, bonis de fin d’année aidant, le National Economic and Social Council (NESC), présidé par Me Marc Hein, a accumulé suffisamment d’audace pour jeter un pavé dans la mare. Le dernier rapport en date du NESC, rendu public au cours de la semaine écoulée, porte sur le sournois et grave problème du surendettement qui ronge les ménages mauriciens. Si le document officiel fait l’économie des statistiques au sujet de ce fléau qui touche indistinctement les ménages au bas de l’échelle aussi bien que les familles nanties, il a le mérite de vouloir remettre en question le Conventional Wisdom des banquiers à l’effet que la situation est tolérable vu que « the current level of non-performing loans is as low as 2,4%. »
L’étude socio-économique entreprise par une des instances du NESC sous la présidence de Mahmood Cheeroo, secrétaire général de la Chambre de Commerce et d’Industrie, maintient que « to any casual observer, Mauritian families have, since late, been seen to be living beyond what their means allow. » Le seuil tolérable pour le repaiement des dettes est de l’ordre de 35% des revenus des ménages car, au-delà de cette limite, l’on se retrouve en face du problème du surendettement. Le NESC ne s’est pas aventuré pour quantifier le nombre de foyers mauriciens naviguant dans cette zone rouge et à risques.
L’une des raisons avancées par le NESC pour appuyer ses appréhensions dans la conjoncture s’articule autour du poids des achats effectués par les Mauriciens sur la base du Hire Purchase. La dernière édition du Continuous Multi-Purpose Household Survey entreprise en 1999 par l’ancien Bureau Central des Statistiques, avait établi qu’au moins 2 ménages sur 3, soit 59,6%, sont liés par des engagements financiers sous la formule de ventes à tempérament. Le taux de pénétration du Hire Purchase devrait être plus conséquent aujourd’hui.
Contrairement aux prêts et autres facilités accordés principalement par les différentes banques commerciales et qui sont gérées par le Mauritius Credit Information Bureau (MCIB) à la Banque de Maurice, les achats sous le Hire Purchase ne sont nullement repertoriés. « One can safely assume that, in the absence of the MCIB, over-lending and therefore default could have been observed on a higher scale », soutient le NESC par rapport à la gestion des debt portfolios des emprunteurs.
« This limitation of the MCIB may be considered serious as families’ debt is prominently exposed to hire purchase transactions. Although, the wish of consumer associations is that the MCIB should also cover traders selling on hire-purchase basis, practical problems remain. Opening the database to all categories of hire purchase traders would carry data security risks », note le NESC.
Le rapport du NESC vient confirmer, si besoin est, que les casseurs continuent à sévir dans le circuit exploitant la faiblesse des plus vulnérables de la société. Envrion 12% des ménages sont endettés par rapport aux casseurs vu que le rapport n’hésite pas à affirmer que « loans from friends and relatives, which is a generic definition concealing loans obtained from casseurs, stand at a relatively high level. »
Le NESC rappelle que les intérêts exigés par les casseurs sont exorbitants et que « loans generally advanced by casseurs are totally unregulated and secured against high-value collaterals, including jewelleries or other family possessions. No statistics exist for this type of lending but those who have become victims of these unscrupulous casseurs are known to face tragic experiences. »
Avant de commenter la dernière mode dans le domaine de l’endettement, notamment le recours à des cartes de crédits bancaires, le NESC met en garde contre le crédit-bail, plus particulièrement la formule de purchase to lease pour les voitures et autres véhicules. « The purchase to lease facilities are often so cleverly packaged that they play on the desires of people to satisfy their fancies for obtaining, say, the latest model cars. These views carry weight, when one considers that most of the marketing for leasing facilities are done by companies selling vehicles, which themselves direct their clients to leasing companies of their choice », regrette encore le NESC.
L’utilisation de plus en plus prononcée des cartes de crédits bancaires par les ménages suscite des inquiétudes au niveau du NESC, qui soutient que « its use has become so widespread that it has started to cause pain. » Plus loin, les auteurs de cette étude, qui mettent l’accent sur les intérêts imposés sur ces facilités bancaires, avancent que « credit cards have become such an accepted mode of payment that users often forget that they represent a permanently revolving debt. »
Toutefois, l’accès à des cartes de crédits bancaires n’est pas donné à Monsieur-Tout-Le-Monde. Ainsi, moins d’un ménage sur dix avec des revenus inférieurs à Rs 10,000 par mois peut se prévaloir de cette possibilité, alors que dans les catégories de plus de Rs 40,000 par mois, le pourcentage de ménages utilisateurs monte jusqu’à 60% même si les « credit card lendings are perceived by many to be a means by keeping families permanently indebted to banks. »
Le profil socio-économique de l’endettement à Maurice indique qu’au cours de ces trois dernières années, le Family Debt Burden Ratio a connu une détérioration passant d’un peu moins de 17% pour se rapprocher de la barre de 19%. D’aucuns affirment qu’avec l’évolution de la situation économique, cette tendance devrait se consolider dans les mois à venir. « The higher the Family Debt Burden Ratio is, the more evident are the risks associated with borrowing. Incidentally, for the whole population, this ratio has been moving up over the recent years », souligne le rapport du NESC intitulé Managing Indebtedness and Household Budgets for Better Living.
D’autre part, le NESC, avec son étude, est venu détruire un autre mythe par rapport au problème du surendettement en affirmant que « contrary to common belief, indebtedness is higher the more families fall within richer groups. » En effet, la dette en pourcentage de revenus des différentes catégories de ménage confirme que le plus fort taux, soit 58%, est enregistré dans des ménages avec des revenus de plus de Rs 30,000 par mois alors qu’il n’est que 19% pour ceux à revenus très faibles, soit moins de Rs 10,000 par mois. Ceux avec des rentrées d’argent entre Rs 10,000 et Rs 30,000 se retrouvent avec un taux d’endettement de 23%.
Qualitativement, le NESC souligne que « the debt situation becomes more complex when the nature of debts of the different income groups is analysed. The debts of families with low income are more exposed to hire purchase expenditure as opposed to high-income families, whose indebtedness is inclined more towards mortgage loans. »
Les appréhensions du NESC deviennent encore plus sonores quand l’analyse déborde sur le plan macro-économique avec une mise en perspective du Gross National Savings par rapport au PIB de 2001 à 2010. Cet indicateur économique n’a cessé de se dégrader au cours de ces dix dernières années, soit une bausse d’au moins 13 points, passant de 28% en 2001 à 15,6% en 2010. « However, at national level, if the picture is seen on a time scale, other signs become visible. If less saving is considered as an indicator for more reliance on borrowing, the overall debt level may be interpreted to be on the rise », ajoute le rapport.
BUDGET DES MÉNAGES:Le piège sournois du surendettement
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