La chorégraphe-enseignante de Bharata Natyam et de danses folkloriques indiennes, Tejsree Beharee, a créé un spectacle qui rend hommage à Anjalay Coopen, figure martyre de la lutte ouvrière à Maurice. A Tribute to the Mother of All Mauritian Workers, création de sept minutes, a été présentée au théâtre Dora Stratou à Athènes en Grèce, le 18 juillet. Un spectacle pour ne pas oublier.
La nouvelle création de Tejsree Beharee est inspirée d’un fait historique : Anjalay Coopen, ouvrière agricole d’origine tamoule, trouve la mort sous les balles de la police qui réprime une révolte d’environ 300 laboureurs sur les terres de la sucrerie de Belle-Vue-Harel, le 27 septembre 1943. Âgée de 32 ans et enceinte, Anjalay Coopen est, depuis, devenue une figure symbolique de la lutte ouvrière. A Tribute to the Mother of All Mauritian Workers a, donc, émergé de l’esprit de la chorégraphe mauricienne pour rendre hommage aux femmes, aux mères et aux enfants victimes de violence armée, notamment à l’époque coloniale.
Sur scène, la danseuse et le drapeau mauricien dans un spectacle de Bharata Natyam. Avec son école, la Nritya Tej Dance Academy et l’Association for the Promotion of Indian Classical Arts (APICA) qu’elle a créée pour promouvoir les arts classiques indiens, Tejsree Beharee explore depuis quelques années le monde de la danse indienne. Ses créations sont étayées de recherches en histoire, littérature, mythologie indienne, tentant de répondre par l’art au questionnement du monde. Sa nouvelle création autour de la figure d’Anjalay Coopen mérite un autre regard car elle diffuse une expression de la danse orientale non conformiste.
La genèse de l’histoire, c’est Anjalay, cette femme tamoule dont on honore la mémoire chaque année à Maurice. « In every being resides good and bad. If we must look for divinity, go inside, and we will find it. Just like that, in Mauritius, there was once a Devi known as Soondrum Pavatdan most known as Anjalay Coopen. Anjalay Coopen was a 32-year-old pregnant woman who was shot dead in cold blood and her child never saw the light of day… Almost eight decades later, the martyrdom of Anjalay still remains a strong symbol of the ultimate sacrifice which some brave Mauritian workers were willing to make during the early history of the Mauritian labour movement. The dance I made is a humble attempt to present a dance production of 7 minutes to pay tribute to the Martyrdom of Anjalay Coopen. I presented the life of the late Anjalay Coopen by making a comparison to Devi, the Indian Goddess…», écrit la chorégraphe.
Elle évoque la vie d’Anjalay Coopen en trois phases. D’abord, une jeune femme joyeuse sous la forme de l’invincible, la suprême déesse Shailaputri qui chevauche un taureau avec dans une main un trident et dans l’autre une fleur de lotus. Ensuite, une mère en devenir. Enfin, une femme puissante sous la forme de la déesse Kali, figure légendaire dans l’histoire de Maurice. La chorégraphe et danseuse aura su dire avec force, par la seule vertu des pas du Bharata Natyam, le destin tragique d’Anjalay Coopen. Une proposition très personnelle et sans effets inutiles. Une cohérence artistique aussi par une interprète engagée.
Tejree Beharre a eu l’occasion de faire la rencontre en Grèce du professeur Alkis Raftis, actuellement président du Conseil international de la danse (CID) auprès de l’UNESCO, l’organisation au sommet pour toutes les formes de danse dans tous les pays du monde. M. Raftis parle six langues et a publié plus de vingt livres et un grand nombre d’articles en diverses langues. Il est un spécialiste reconnu dans le domaine de l’histoire de la danse.