Si Maurice incarnait l’épicentre de l’intelligence économique et stratégique de l’OI ?

DENIS PATRICE LEBON

- Publicité -

Dans le concert des états-nations insulaires, l’île Maurice se distingue par une résilience économique et une ambition stratégique remarquables, et ce depuis son indépendance en mars 1968. En ce jour, mercredi 12 mars 2025, l’île commémore le 57 anniversaire de son indépendance. Pour marquer cet événement, le Premier ministre indien, Narendra Modi, a été invité en tant qu’hôte d’honneur, gage du renforcement des liens historiques, et maintenant hautement stratégiques – Agaléga oblige – entre les deux nations. Mais au-delà des réjouissances entrecoupées de solennités, ce 12 mars offre l’opportunité de penser la transmutation du pays comme jamais depuis son accession à l’indépendance. Bien sûr que le pays a su se convertir en une nation prospère, diversifiant son économie et consolidant ses institutions démocratiques, au mépris de ses démons coutumiers. Cependant, à l’aube des changements systémiques annoncés dans le « pont vers l’avenir » pour la période 2025-2029 d’un gouvernement de la dernière chance pour le binôme Ramgoolam-Bérenger, une dernière opportunité offerte par les croix des stylos-billes des électeurs, déposées dans les urnes lors des dernières joutes électorales pour écrire en lettres d’or ce tant attendu nouveau chapitre du roman national mauricien, l’auteur de ces lignes est d’autant plus persuadé – compte tenu de la fulgurance de la victoire affichée pour l’Alliance du Changement – que l’intégration d’une cellule d’intelligence économique et stratégique, fondée sur une géopolitique de la lucidité, au sein même des plus hautes sphères de l’État mauricien apparaît aujourd’hui non seulement comme une supplique des plus impérieuses, mais aussi comme un vecteur d’innovation et de prospérité durable. Cette démarche, empreinte d’une sagacité prospective, permettrait de transcender les défis contemporains et de fermement installer l’île Maurice et la présenter comme modèle d’excellence et en même temps de « puissance douce » parmi les îles de l’océan Indien en matière de gouvernance éclairée, qu’elle saurait, à jet sûr, figurer, incarner.

Sans devoir céder à l’inutile penchant doloriste consistant à serrer sa haire avec sa discipline, il ne serait que de coupable légèreté s’il fallait omettre de rappeler que l’année 2024, en dépit de la dette, a été aussi marquée par une croissance économique ‘robuste’, avec un produit intérieur brut (PIB) réel, enregistrant une augmentation de 6,1 %. Cette dynamique étant principalement attribuable à des investissements massifs dans les secteurs de la construction, du tourisme et des infrastructures publiques, où le secteur de la construction a contribué à hauteur de 3,3 points de pourcentage à la croissance de la valeur ajoutée brute (VAB), reflétant l’essor des projets immobiliers et d’infrastructures. Parallèlement, le secteur touristique a accueilli plus de 1,38 million de visiteurs en 2024, représentant une augmentation de 6,7 % par rapport à l’année précédente et générant des recettes équivalant à 13,5 % du PIB national. Cette affluence touristique est le fruit d’une stratégie marketing ciblée et d’une amélioration significative de la connectivité aérienne et maritime. De surcroît, l’investissement privé a atteint 21 % du PIB au deuxième trimestre de 2024, témoignant de la confiance des investisseurs dans le marché mauricien. Mais nous savons que les défis ont la peau dure, notamment des pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs clés tels que le tourisme, la construction et les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), entravant ainsi le potentiel de croissance et de développement non uniquement de ces industries, mais de bien d’autres encore.

L’intelligence économique et stratégique se définit comme l’ensemble des processus coordonnés de collecte, d’analyse et de dissémination de l’information fine et pertinente, visant à éclairer les décisions stratégiques des acteurs publics et privés. Elle englobe la veille concurrentielle (la collecte et l’analyse), la protection des informations sensibles (la défense) et l’influence sur l’environnement économique et politique (l’attaque). Pour une nation insulaire comme Maurice, confrontée à des enjeux géopolitiques spécifiques et à une économie l’on dira ouverte, l’adoption d’une telle approche est plus que cruciale. En effet, elle permettrait d’anticiper les menaces potentielles, d’en saisir les opportunités émergentes et d’orienter les politiques publiques de manière parfaitement informée et même prédictive, nous y reviendrons.

Pourquoi assimiler l’intelligence économique et stratégique (IES) dans le cœur de l’État mauricien ?

Pour le renforcement de la compétitivité nationale

Dans un contexte mondial caractérisé par des rivalités exacerbées, traduisant des allures plus polémogènes qu’irénologiques, la mise en place d’une structure dédiée à l’intelligence économique et stratégique permettrait à l’île Maurice d’identifier précocement les signaux faibles, les penchants du marché, les innovations technologiques et les mouvements stratégiques des concurrents. Cette proactivité offrirait aux entreprises locales un avantage compétitif accru, leur permettant d’ajuster leurs stratégies en fonction des évolutions régionales et internationales. Par exemple, en surveillant les avancées technologiques mondiales, Maurice pourrait orienter ses investissements vers des secteurs porteurs et à forte valeur ajoutée tels que les exotechnologies vertes ou les agrobiotechnologies du futur, favorisant ainsi une différenciation et une diversification économique intelligente et gagnante.

Pour la protection des intérêts stratégiques et du patrimoine immatériel national

Dans une perspective inverse et bénéfique à l’île Maurice, l’affaire de la vente par l’État français d’un terrain stratégique à La Réunion au profit d’investisseurs mauriciens illustre l’importance de la maîtrise des actifs nationaux. Pour éviter que des intérêts étrangers ne s’emparent de ressources ou d’infrastructures clés, voire d’informations visiblement sensibles, une veille stratégique efficace demeure obligée, indispensable. Elle garantit la souveraineté économique et la sécurité nationale en protégeant lesdites informations stratégiques de ces secteurs sensibles face aux ingérences extérieures. Par ailleurs, la surveillance des investissements étrangers permettrait de prévenir des acquisitions potentiellement préjudiciables aux intérêts nationaux, assurant ainsi une croissance économique harmonieuse et surtout sécurisée, car un pays peut en cacher un autre, voire en plusieurs.

Pour que nos politiques publiques bénéficient d’une optimisation réellement renforcée

L’intelligence économique fournirait aux décideurs des analyses approfondies et des scénarios prospectifs, facilitant ainsi l’élaboration de politiques publiques adaptées aux réalités du terrain. Par exemple, face aux prévisions de croissance économique de 5 % en 2025 et de 4 % en 2026, une analyse stratégique permettrait d’identifier les secteurs réellement productifs à fort potentiel et d’allouer les ressources de manière optimale. Cette approche garantirait une utilisation efficiente des fonds publics, maximisant ainsi les retombées économiques et sociales des investissements étatiques.

Pour une bien meilleure gestion de nos relations régionales et internationales

Les différends territoriaux dans l’océan Indien, tels que les revendications légitimes de l’île Maurice sur l’archipel des Chagos, nécessitent une diplomatie rondement informée et stratégique. Une cellule d’intelligence économique serait en mesure de fournir des informations cruciales pour orienter les négociations et défendre les intérêts nationaux sur la scène internationale aussi bien que régionale. De surcroît, en sondant les dynamiques géopolitiques, régionales et internationales, l’île Maurice pourrait sereinement anticiper les alliances et les tensions, adaptant ainsi sa politique étrangère en toute confiance afin de préserver et promouvoir de manière pérenne ses intérêts souverains.

Comment précisément et efficacement mettre en œuvre l’IES au cœur de l’État mauricien ?

Par la création d’une Agence Nationale d’Intelligence Économique et Stratégique (ANIES)

Cette entité, placée sous l’égide du Bureau du Premier ministre, serait chargée de coordonner les efforts de veille, d’analyse et de protection du patrimoine informationnel. Elle travaillerait en synergie avec les ministères, les entreprises et les institutions académiques pour centraliser et diffuser de manière sécurisée l’information stratégique. L’ANIES serait également responsable de la mise en place de protocoles de sécurité pour protéger les données sensibles et de développer des partenariats internationaux pour l’échange d’informations pertinentes.

Par la formation et la sensibilisation des acteurs clés

Il est essentiel de développer des programmes de formation spécialisés en intelligence économique à destination des fonctionnaires, des chefs d’entreprise et des universitaires. Cette montée en compétence garantirait une culture partagée de la sécurité économique et de la proactivité stratégique, réduisant ainsi les risques d’ingérence et de vulnérabilité informationnelle.

Par le développement d’outils technologiques avancés

L’acquisition et le développement de plateformes technologiques dédiées à la collecte et à l’analyse de données permettraient une veille en temps réel des évolutions économiques, technologiques et géopolitiques. L’exploitation de l’intelligence artificielle et du big data dans l’analyse prospective offrirait une capacité d’anticipation renforcée face aux mutations rapides de l’environnement international. En intégrant des solutions basées sur l’apprentissage automatique, Maurice pourrait affiner ses prévisions économiques et ses décisions stratégiques avec un niveau de précision inégalé.

Par l’établissement de partenariats internationaux

L’île Maurice pourrait ici bénéficier de collaborations avec des pays ayant déjà intégré l’intelligence économique et stratégique dans leur gouvernance, tels que Singapour, le Japon, le Royaume-Uni, les États-Unis ou encore la France. Ces partenariats faciliteraient le partage de bonnes pratiques, l’accès à des informations privilégiées et le renforcement des capacités nationales. L’adhésion à des réseaux internationaux d’intelligence économique permettrait également d’améliorer la capacité de l’État mauricien à se positionner stratégiquement dans les négociations commerciales et diplomatiques.

Par la recherche et la production de connaissances en intelligence économique et stratégique

Encourager les universités et les centres de recherche spécialisés mauriciens à développer des études et des publications sur l’intelligence économique et stratégique contribuerait à la production et l’enrichissement de connaissances locales ainsi qu’à l’adaptation des concepts internationaux aux spécificités mauriciennes. Des programmes de recherche financés par l’État et les entreprises privées pourraient permettre l’émergence de modèles innovants d’analyse stratégique fine et pertinente, ajustés aux caractéristiques particulières au pays.

Par la mise en place d’un cadre juridique adapté

Pour garantir l’efficacité et la pérennité des actions en intelligence économique et stratégique, un cadre législatif rigoureux devrait être instauré. Celui-ci inclurait des dispositions sur la protection des informations stratégiques, la régulation des investissements étrangers et la transparence des données économiques. Une loi sur l’intelligence économique permettrait de façonner et d’harmoniser les initiatives tout en s’assurant qu’elles restent parfaitement alignées avec les intérêts vitaux nationaux.

Par l’intégration de l’intelligence économique et stratégique dans la prise de décision politique

La mise en place de conseils stratégiques réguliers entre les décideurs politiques et les consultants et experts en intelligence économique garantirait une meilleure cohérence des politiques publiques. Une cellule d’analyse prospective au sein même du gouvernement mauricien permettrait d’anticiper les risques et opportunités liés aux évolutions régionales et globales.

Par la création d’un fonds souverain mauricien dédié aux industries stratégiques

Un fonds souverain national, abondé par des surplus budgétaires et des partenariats internationaux, pourrait être utilisé pour financer des investissements dans des secteurs stratégiques d’avenir comme l’économie bleue, les biotechnologies du futur, la blockchain et l’intelligence artificielle. En possédant des parts stratégiques dans des entreprises d’importance nationale, l’État mauricien se doterait d’un levier complémentaire pour protéger ses intérêts économiques tout en stimulant l’innovation locale.

Et pour parachever…

Il apparaît avec une éclatante évidence aux consultants et sommités en intelligence économique et stratégique que l’institutionnalisation d’une entité de cette envergure au sein des plus augustes arcanes de l’appareil étatique mauricien marquerait un point d’inflexion déterminant, érigeant une pierre angulaire d’un progrès substantiel et d’une reconfiguration stratégique d’ampleur pour la nation. Une telle entreprise, relevant d’un dessein politique d’envergure, transcenderait la simple consolidation de la souveraineté nationale pour s’ériger en une refondation paradigmatique des mécanismes de gouvernance. Elle instaurerait un prisme d’optimisation systémique des politiques publiques, affermirait l’assise des intérêts économiques stratégiques et consacrerait l’île en tant que puissance nodale dans l’échiquier géopolitique, tant régional que global. Par une dialectique d’anticipation et d’influence, elle façonnerait proactivement les mutations tectoniques de l’ordre mondial, s’arrogeant ainsi un rôle de prescripteur incontournable dans la reconfiguration des équilibres de puissance et l’orchestration des dynamiques civilisationnelles. Dans un monde en perpétuelle mutation, où l’information précise et d’une valeur stratégique inestimable s’est imposée comme une arme économique et diplomatique sans égal, il est absolument crucial que l’île Maurice se dote d’une architecture organisationnelle d’une agilité inouïe, à la fois réactive, proactive, mais surtout dotée de capacités prédictives exceptionnelles. Cette configuration lui permettrait de maîtriser les clés d’un développement durable et harmonieux, en s’assurant une position en amont de l’anticipation et de la gestion des évolutions futures. L’histoire se fait un devoir de rappeler que les nations qui détiennent la maîtrise de l’intelligence économique et stratégique à ce degré de sophistication façonnent, orientent et dominent les contours de l’avenir. En adoptant cette posture visionnaire, un équilibre subtil entre une vision holistique et une démarche prospectiviste, Maurice ne se contenterait pas de suivre les fluctuations de son époque : elle prendrait les devants avec une aisance souveraine, assurant ainsi sa suprématie stratégique au sein des nations les plus éclairées de son temps. Une telle démarche propulserait l’île au-delà de son statut d’économie émergente pour la catapulter au rang d’un pôle de référence stratégique, un véritable centre névralgique d’intelligence collective dans l’ensemble de la région de l’océan Indien. Cette métamorphose, d’une portée exceptionnelle, exigerait une combinaison d’audace inaltérée, de rigueur impérieuse, d’innovation audacieuse, mais également un courage politique sans faille et, surtout, une volonté politique forte et indéfectible. Une telle transformation serait le prélude d’une ère nouvelle, une ère de prospérité inédite, dans laquelle l’information hautement stratégique deviendrait le levier suprême d’influence et de puissance, comme l’île Maurice n’en a jamais vraiment connu dans le grand récit de son histoire.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour