Après deux années à la tête du bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP), Me Rashid Ahmine, dresse un bilan marqué par des défis majeurs, mais aussi par des progrès significatifs dans la lutte contre les retards judiciaires et la criminalité. Dans sa dernière Newsletter de 2024, il appelle ainsi à des réformes structurelles pour renforcer l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire mauricien.
Depuis sa prise de fonctions, le DPP Ahmine affirme qu’il a dû naviguer dans un contexte difficile, marqué par des tensions avec les institutions policières et des décisions contestées par des acteurs politiques. « Certaines de mes décisions ont été contestées par l’ancien commissaire de police et le gouvernement sortant à travers l’Attorney General Office », rappelle-t-il. « Pour des raisons qui leur sont propres, ils ont décidé d’opposer frontalement mon bureau. En raison de cela, beaucoup de temps a été perdu au préjudice de l’intérêt public. »
Malgré ces obstacles, le DPP Ahmine dit avoir mis en œuvre certaines réformes visant à réduire les arriérés de dossiers et à améliorer la gestion des affaires criminelles. « Une nouvelle structure a été mise en place pour traiter les dossiers de manière plus rapide et efficace », explique-t-il, tout en reconnaissant que le chemin vers une amélioration complète est encore long.
Me Rashid Ahmine plaide ainsi pour la création d’une nouvelle agence exclusivement dédiée à l’investigation des grands cas de corruption et de blanchiment d’argent, laissant l’aspect judiciaire au bureau des poursuites publiques. « C’est au gouvernement de décider du modèle le plus approprié pour remplacer la Financial Crimes Commission (FCC). J’espère que ce ne sera pas qu’un changement d’appellation. »
Il souligne également l’urgence de s’attaquer à la prolifération de trafic de drogue, fléau qui, selon lui, n’est pas traité avec suffisamment de sérieux. « Il est inacceptable qu’après 24 ans d’application de la Dangerous Drugs Act, nous ayons encore tant de mal à cibler les grands barons de la drogue », déplore-t-il.
Entre-temps, le DPP insiste sur l’importance d’améliorer l’expérience des victimes et des témoins dans le système judiciaire en mettant un accent particulier sur les femmes et les enfants. Il appelle de ce fait à des réformes urgentes pour protéger les femmes contre les violences domestiques et à une meilleure prise en charge de la délinquance juvénile.
Il avance que l’un des principaux objectifs pour 2025 sera de renforcer l’indépendance du bureau du DPP. Me Ahmine milite aussi pour une autonomie financière et administrative, ainsi que pour une réforme législative visant à instaurer un cadre clair pour les enquêtes menées par son bureau. « Une enquête dirigée par le DPP est essentielle pour garantir des poursuites réussies dans des affaires complexes », affirme-t-il.
Par ailleurs, il prévoit la mise en place d’un système de gestion électronique des dossiers et une digitalisation accrue des informations, tout en soulignant l’importance de soutenir le bien-être des procureurs, souvent exposés à des cas stressants et traumatisants. Le DPP Rashid Ahmine appelle en outre à une coopération accrue avec les ONG et les autres partenaires du système judiciaire afin d’identifier les problèmes et de proposer des solutions viables.
En conclusion, il réaffirme son engagement à défendre l’état de droit et à moderniser le système judiciaire mauricien, tout en s’attaquant aux défis complexes qui entravent son fonctionnement.