À J-7 du début de septembre, mois annoncé comme étant pregnant with meaning par raport au calendrier menant à la tenue de prochaines élections générales, les premières échéances se mettent déjà en place. D’abord, ce détail qui a filtré des couloirs du QG de la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC) de Moka à l’effet qu’aucune demande de congé de la part des membres du personnel ne sera entretenue à partir du15 octobre. Du côté des Casernes centrales, les membres de la force policière semblent conscients qu’il ne leur sera pas possible d’envisager des congés de détente, sauf de maladie, pour le dernier trimestre de l’année.
Même si à ce jour aucun Operations Order des Police Headquarters n’a été émis à cet effet. Mais il y a encore le fait que l’échec patent de Jean-Michel Lee Shim de donner un nouveau visage aux courses hippiques à Maurice, constat incontestable et que ne peut nullement réfuter Lakwizinn du Prime Minister’s Office (PMO), est un autre élément incontournable dans l’équation des prochaines élections générales.
Au lieu de décembre, comme c’est traditionnellement le cas, la saison Soy de 2024 prendra fin prématurément le dimanche 6 octobre. Cette nouvelle date a été arrêtée une dizaine de jours après celle du 10 novembre, confirmant du même coup l’expression garantie portant sur la glorieuse incertitude du turf. Et il y a encore cette fenêtre laissée ouverte entre le 4 et le 14 octobre par le ministère de l’Éducation en ce qui concerne la tenue des examens de fin d’année dans les classes du primaire. Cette série de dates débouche sur des conjectures quant à la date du scrutin, avec le jeudi 5 décembre ou encore le dimanche 8 décembre comme étant des options possibles dans le collimateur de l’Hôtel du Gouvernement.
Dans la conjoncture constitutionnelle, la certitude demeure que d’ici à la fin de septembre, la dissolution de l’Assemblée nationale devra intervenir irrémédiablement, visant à rendre caduc le Writ of Election de la partielle de Montagne-Blanche/Grande-Rivière-Sud-Est (No 10), dont le scrutin a été fixé au 9 octobre. D’abord, pour éviter des dépenses inutiles pour le compte de la Commission électorale vu qu’au terme des dispositions de la Constitution « the National Assembly stands dissolved » dès le 21 novembre. Même si à ce jour, le pouvoir a pris le pari d’installer un nouveau Speaker, en la personne d’Adrien Duval, pour cinq séances parlementaires jusqu’ici, d’aucuns affirment que ce même pouvoir pourra difficilement rééditer cette performance avec un nouveau Honorable Member du No 10 pour les six séances formelles du mardi.
Il y a encore plus urgent qui attend : la conclusion de l’accord électoral incluant le Parti Mauricien Social Démocrate de Xavier-Luc Duval dans une alliance menée par le Mouvement Socialiste Militant (MSM) de Pravind Jugnauth, avec pour alliés minoritaires le trio comptant Ivan Collendavelloo, Steven Obeegadoo et Alan Ganoo. Le scénario qui est privilégié est que l’adhésion du PMSD au MSM n’est prévue qu’à l’annonce de la dissolution du Parlement, libérant le leader du PMSD de son mandat de parlementaire de l’opposition alloué lors des dernières élections générales du 7 novembre 2019. Il n’empêche que des candidats potentiels issus de la basse-cour des bleus assurent déjà une présence active dans des circonscriptions désignées.
Indépendamment du choix du calendrier, le Premier ministre et leader du MSM, qui est en quête d’un Pravind Jugnauth 3.0 avec la prochaine joute électorale, multiplie les sorties politiques ciblées dans un mode de forcing tout-terrain, si ce n’est pour des opérations Tegn Dife. Que ce soit sur le front officiel ou encore auprès des sociétés socioculturelles. Pas plus tard qu’hier matin, il a voulu être rassurant envers un segment conséquent du secteur public, la force policière, avec un peu plus de 15 000 fonctionnaires concernés, département qui n’est devancé que par la Santé avec ses 16 000 funded posts ou encore les 12 000 fonctionnaires de l’Éducation nationale.
Avant le rendez-vous des Gymkhana Grounds d’hier matin pour la nouvelle série de promotions au sein de la force policière, Pravind Jugnauth était mardi à l’Est pour l’inauguration du Sir Anerood Jugnauth Hospital de Centre de Flacq, appelé également à devenir un centre hospitalier universitaire lors de la deuxième phase. Cette plateforme de la Santé a servi, le temps d’une intervention, pour tenter de tenter de mettre un bémol à la grogne grandissante au sein du secteur public suite à l’annonce du tandem Padayachy-Callichurn, n’offrant aux fonctionnaires et aux employés des corps paraétatiques qu’une révision salariale intérimaire de 5%, payable, certes, dès le mois prochain.
Mécontentement
Prenant la mesure du mécontentement, le Premier ministre s’est permis de prendre à contre-pied deux ministres, dont un Senior Minister, en la personne du ministre des Finances, en prenant l’engagement pour la mise en vigueur des recommandations salariales du prochain rapport du Pay Research Bureau avec effets rétroactifs à partir de janvier prochain. La publication de ce rapport, qui était annoncée en 2026, a été ramenée à la fin de l’année prochaine. Annonce également de Pravind Jugnauth. Depuis, les Top Chefs de Lakwizinn du PMO tentent d’évaluer si cette annonce aura généré les dividendes politiques escomptés auprès de l’ensemble des salariés du secteur public. Le résultat ne sera connu qu’à la proclamation des résultats du prochain scrutin législatif.
Un premier constat est que cette annonce ne contient aucune proposition chiffrée pour la révision salariale devant être payable dès janvier prochain. Le PRB a encore du boulot à compléter avant d’être en mesure d’établir et de soumettre les nouveaux barèmes de salaires dans le secteur public et pour cela, l’incertitude sur le quantum de la révision salariale et du budget nécessaire sera de mise jusqu’à la fin de l’année prochaine. « En contrepartie, les 5% de révision salariale intérimaire proposés par le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, et le ministre du Travail, Soodesh Callichurn, pourront difficilement résister à l’assaut de l’érosion du pouvoir d’achat et de la dépréciation de la roupie », concède-t-on, tout en tentant la parade du traitement accordé aux employés du secteur public sous les précédents gouvernements dirigés par le Parti Travailiste pur calmer les ardeurs de protestation.
Le dernier discours tenu par le ministre du Travail, vendredi, sans la présence du ministre des Finances à ses côtés fois-ci, a voulu être rassurant. « Le prochain rapport du PRB devait être publié en 2026. Vu les distorsions, la publication a été ramenée plus tôt. Le PRB tiendra compte du réajustement de la relativité. Je rassure les fonctionnaires, qui disaient que le réajustement salarial doit les concerner », a déclaré Soodesh Callichurn, en ajoutant qu’« au mois de décembre 2025, un fonctionnaire percevra son salaire avec la révision recommandée par le PRB ». Il est aussi question de back pay pour les douze mois et le boni calculé sur le nouveau salaire.
Toujours en ce qui concerne le front des salaires, la publication en fin de semaine des récents barèmes de salaires dans différents secteurs de l’économie du secteur privé est revenue relancer la controverse, alors qu’une accalmie éphémère avait prévalu après l’annonce de la révision salariale brute de Rs 4 925 du tandem Padaychy-Callichurn. Dès la publication de ces nouveaux barèmes, les syndicalistes d’un secteur extrêmement délicat, soit l’industrie sucrière, sont montés au créneau pour dénoncer de manière virulente les barèmes proposés aux salariés de l’industrie sucrière tout en réclamant des amendements nécessaires dans les meilleurs délais. À cette revendication du Joint Negotiating Panel de l’industrie sucrière de la bouche du négociateur Ashok Subron est venue se greffer une menace de grève en pleine période de récolte sucrière.
Malaise dans le privé
Dans d’autres secteurs de l’économie, avec les Remunerations Orders revus et corrigés, les syndicalistes, aussi bien que les employés, s’interrogent sur la pertinence des nouveaux barèmes promulgués par rapport aux salaires effectifs pratiqués. D’aucuns affirment, comme dit l’anglais, que The proof of the pudding is in the eating et qu’il faudra attendre le paiement de cette augmentation brute de Rs 4 925 annoncée pour confirmer comment la formule savante de Padayachy-Callichurn se traduira sur le take home pay de chaque salarié à la fin de chaque mois.
Et ce sera une autre paire de manches que ce soit pour les salariés ou pour les autorités à la veille de la dissolution de l’Assemblée nationale.
De son côté, Business Mauritius affiche la couleur en annonçant que les employeurs n’agiront que sur la base des Regulations devant être promulguées par le ministère du Travail. Mais déjà, le président en exercice de Business Mauritius, Anil Currimjee, tout en évitant de se prononcer sur les répercussions pour les employeurs de ce réalignement salarial préélectoral, a fait état de réserves à peine voilées. « Ce n’est pas la peine de mettre des charges additionnelles que les entreprises ne peuvent pas absorber, puis les aider. Ce n’est pas un modèle économique pérenne », a-t-il fait comprendre au nom du secteur privé, en indiquant que pour le mois d’août déjà, des paiements additionnels au titre du wage bill ont dû être encourus par les employeurs. Comme pour mieux faire état du malaise dans le privé.
Le fait demeure que le volet des salaires constituera un argument solide de la campagne électorale qui s’apprête à aborder un tournant décisif dans les prochains jours. Face à la réalité du pouvoir d’achat des consommateurs minés par la hausse des prix des denrées alimentaires ou encore des médicaments, l’establishment politique du jour croit pouvoir miser sur la comparaison des salaires en vigueur entre 2014 et 2024. Surtout en reprenant en chœur le paragraphe 538 du dernier budget du Grand Argentier, clamant qu’aucun individu travaillant à plein temps n’aura un revenu inférieur à Rs 20 000 à partir du 1er juillet. Ou même cette récente déclaration du ministre du Travail à l’effet qu’un maçon, qui touchait Rs 11 271 en 2014, peut prétendre aujourd’hui à des salaires de Rs 22 834, soit une augmentation de 102,78%.
L’équation des investitures au sein de la majorité remonte à la surface
Le MSM, locomotive de l’alliance gouvernementale, aborde désormais la passe délicate du choix de ses candidats en vue des prochaines élections. Selon les recoupements d’informations effectués par Week-End auprès des sources avisées, dont le cercle des Top Chefs de Lakwizinn du Prime Minister’s Office (PMO), bon nombre de parlementaires sortants se retrouvent en ballottage défavorable, ou devront encore convaincre le leader du MSM, Pravind Jugnauth, pour se retrouver sur la liste des candidats en vue du Nomination Day. Sont considérés comme étant des « non-ticketables » ceux ayant soit déjà effectué deux mandats consécutifs, soit encore étant devenus des political liabilities pour la majorité gouvernementale.
D’ailleurs, ces milieux avisés n’écartent pas qu’avec cette opération Sanz Vitrinn envisagée par Pravind Jugnauth pour ce troisième mandat, avec un dernier sondage laissant voir qu’une majorité n’est en faveur que pour deux mandats au maximum, un nouveau frontbench de son parti s’impose pour les prochaines législatives avec notamment les deux vice-Premiers ministres, Leela Devi Dookun-Luchoomun et Anwar Husnoo, se faisant remplacer comme il a été le cas aux élections du 7 novembre 2019. Le MSM compte propulser une autre parlementaire-femme sur le frontbench. Les premières informations qui transpirent font également état que le ministère de l’Education pourrait éventuellement être un ministère accordé au PMSD dans le cadre de l’officialisation de l’alliance d’ici à la dissolution du Parlement. D’ailleurs, le leader du PMSD, du temps où il assumait les fonctions de leader de l’opposition, ne lésisait pas sur ses critiques dans le secteur de l’Éducation, surtout le sort réservé aux élèves de l’Extended Programme au secondaire.
L’inner circle de Pravind Jugnauth s’est donné pour mission d’identifier un potentiel remplaçant au frontbench pour le vice-Premier ministre et ministre des Collectivités locales, Anwar Husnoo.
Avoir un nouvel élément avec le même profil ethnique ferait partie des calculs de Lakwizinn après deux mandats consécutifs d’Anwar Husnoo. Déjà des noms circulent, même l’on évite de confier cette démarche, considérée comme trop prématurée. Toujours à Port-Louis, dans la circonscription de Port-Louis Nord/Montagne-Longue (No 4), seul le ministre et président du MSM, Joe Lesjongard, pourrait rester en poste. La Deputy Chief Whip, Joanne Tour, pourrait être relogée probablement à Vacoas/Floreal (No 16) dans une stratégie de contrer Joanna Bérenger du MMM, alors que la Paliamentary Private Secretary (PPS), Subhasnee Luchmun-Roy pourrait ne pas faire partie de la liste des candidats. À Pamplemousses/Triolet (No 5), l’actuel Parliamentary Private Secretary (PPS) Sharvanand Ramkaun, qui a déjà complété deux mandats dans cette circonscription, n’est pas donné sur la ligne de départ pour le prochain Nomination Day.
À Grand-Baie/Poudre-d’Or (No 6), le ministre du Patrimoine culturel et Top Chef de Lakwizinn, Avinash Teeluck, pourrait être écarté de la formule, au profit du ministre Anjiv Ramdhany et du nouveau venu du MSM, celui qui a dû faire prévaloir ses droits à une retraite anticipée du bureau du Directeur des Poursuites Publiques, Me Roshan Santokhee. La circonscription de Piton/Rivière-du-Rempart (No 7) pourrait voir le MSM aligner trois nouvelles têtes pour remplacer Rajanah Dhaliah, coincé avec la charge provisoire retenue contre lui dans le sillage de l’affaire des pots-de-vin qui auraient été versés dans le cade de l’octroi du bail de la chasse de Grand-Bassin à The Eco Deer Park Association par son colistier l’ancien ministre de l’Agro-industrie, Maneesh Gobin. Ce dernier, étant toujours secrétaire général du MSM, en dépit des cicatrices politiques de la Black Label & Stag Party, pourrait migrer de l’ancien fief de feu sir Anerood Jugnauth pour une autre circonscription avec Kalpana Koonjoo-Shah, la ministre de l’Égalité des Genres, posant ses valises dans une autre circonscription.
À Quartier-Militaire/Moka (No 8), le Premier ministre et leader du MSM, Pravind Jugnauth, aura vraisemblablement de nouveaux colistiers, Leela Devi Dookun-Luchoomun, pourrait se voir proposer la présidence de la république, donc le chelin de la State House, alors que Yogida Sawmynaden ne serait pas en bonne posture pour un troisième ticket électoral. À Flacq/Bon Accueil (No 9), le PPS Vikash Nuckcheddy pourrait être muté.
De son côté, Sunil Bholah pourrait quitter Montagne Blanche/Grande-Rivière-Sud-Est (No 10), Avineshwar Dayal prenant la place de Vikram Hurdoyal et possiblement un nouveau candidat à la place du Deputy Speaker Zahid Nazurally. À Vieux Grand-Port/Rose-Belle (No 11), seul le ministre Mahen Seeruttun pourrait y rester avec de nouveaux candidats investis pour ces prochaines élections, la ministre Naveena Ramyad pourrait bouger, alors que la PPS Teena Jutton pourrait être laissée sur la touche. Le ministre de la Jeunesse et des Sports, Stephan Toussaint, pourrait quitter Mahébourg/Plaine Magnien (No 12) pour un come-back politique à Curepipe/Midlands (No 17), faisant de la place pour potentiellement un candidat du PMSD. Le nom d’Aurore Perraud est cité à cet effet. Pas de changement à Rivière des Anguilles/Souillac (No 13), sauf si le PPS Ismaël Rawoo y est remplacé. Les tickets des PPS Sandra Mayotte et Prakash Ramchurrun ne sont pas acquis à Savanne/Rivière Noire (No 14) avec Alan Ganoo en poste.
À La Caverne/Phoenix (No 15), au No 16 (Vacoas/Floréal), de nouveaux candidats brigueront le suffrage pour le compte du MSM, alors que le PPS Kenny Dhunoo pourrait être sacrifié pour accommoder Malini Sewocksingh du PMSD à Curepipe/Midlands (No 17). À Belle-Rose/Quatre Bornes (No 18), le leader du PMSD, Xavier-Luc Duval, est assuré d’une investiture à la place de la PPS Tania Diolle, la protégée politique d’Akan Ganoo.