Les managers des collèges privés rencontrent les parents — Une éducation gratuite… mais à quel prix?

La Fédération des Managers des collèges privés (FOM) a rassemblé les parents des collèges privés de Curepipe hier, samedi 6 juillet, au collège Saint Joseph à Curepipe, afin de faire état des problèmes auxquels ils font face depuis 2017, qui ne cessent d’empirer, notamment avec la gestion des grants alloués aux collèges privés et les règlements imposés par la PSEA pour la gestion de ces établissements.

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Plus de 500 personnes étaient présentes dans l’assistance pour écouter et interroger les managers sur le point principal de cette conférence : « Le retour de la liberté aux collèges privés de gérer leur établissement comme ils le souhaitent ». La conférence ayant pour modérateur Jimmy Harmon, responsable du service diocésain de l’éducation catholique (SeDEC), comprenait plusieurs intervenants, notamment Diana Amy, présidente de la PTA du collège et membre du comité conjoint des PTA au sein de la FOM ; Ramdass Ellayah, manager du collège Bhujoharry et président de la FOM ; Mike Phanjoo, manager du collège BPS et vice-président de la FOM, et Raffick Soobadar, assisant trésorier de la FOM et manager du Labourdonnais Collège.

D’emblée, le manager du collège hôte, soit… du collège St Joseph, a expliqué aux personnes présentes, surtout aux parents, pourquoi les collèges privés élèvent leur voix face à la manière dont la PSEA gère les grants attribués à leurs collèges. Il déplore que la PSEA qui est l’autorité qui gouverne les collèges confessionnels privés ait commencé des coupures considérées « irrationnelles et contradictoires » depuis 2021. Ces coupures, dit-il, portent préjudice « aux enfants de la République de Maurice ».

Diana Amy, porte-parole de la PTA et parent de collégiens, reprend directement sur le même point, se demandant quel était le but derrière la décision de « serrer la ceinture des écoles privées ». Elle s’est dit choquée en découvrant la réalité à laquelle font face ces collèges. « Est-ce pour nous faire disparaître ou pour faire baisser la qualité de l’éducation dans nos écoles ? », se demande-t-elle.

Jimmy Harmon, de son côté, fait bien comprendre aux parents qu’ils ne cherchent pas à manifester, à inviter à descendre dans les rues, mais qu’ils souhaitent surtout faire entendre le problème sous tous ses aspects, afin de faire comprendre aux parents pourquoi certaines choses ne marchent plus comme auparavant dans ces collèges. Il signale qu’il n’aurait pas été nécessaire de faire ce genre de rencontre, si la communication se passait bien entre eux et les autorités.

“L’époux de la ministre de
l’Éducation n’arrange pas les choses”

Ramdass Ellayah, prenant la parole, explique le rôle de la Private Secondary School Authority (PSSA) d’alors et son fonctionnement de 1977 à 2016. Il souligne que cette institution faisait respecter des normes établies pour les collèges privés avec la collaboration d’un Technical Working group comprenant le ministère de l’Éducation, le ministère des Finances et les fédérations des managers. Les demandes y étaient discutées directement et des solutions travaillées ensemble « dans une entente extraordinaire ». Les écoles avaient des grants en fonction de ce qui leur était dû, si les conditions étaient respectées.

Il dit qu’aujourd’hui, ce n’est plus le cas et « le fait que le directeur de la PSEA, l’instance qui remplace la PSSA, soit l’époux de la ministre de l’Éducation, n’arrange pas les choses. Pensez-vous que s’il fait quelque chose qui n’est pas bon, la ministre fera quelque chose contre son époux ? Li fer seki li anvi », lance-t-il, soupirant.

Jimmy Harmon, reprenant la parole, explique qu’aujourd’hui il n’y a plus de technical working group comme avant 2016. « La ministre de l’Éducation et le directeur de la PSEA dir avoy let, avoy zot demann, nou nou ava gete…», déplore-t-il, avant de préciser qu’« il est important de noter que les collèges privés ne sont pas uniquement des collèges catholiques. Il y a aussi des collèges confessionnels islamiques, des collèges Adventiste, Anglican, le collège Hindu Girls, etc. Il est important de comprendre cela pour montrer la diversité de l’éducation privée, qui fait ainsi la richesse de Maurice. »

« Zot vinn avec enn grant formula kot zot bizin dir ou ki ou pou fer »

Le vice-président de la FOM, Mike Phanjoo, vient plus en détail avec le système actuel du grant formula. Il explique qu’avant 2016, il y avait des inspections des établissements et un système de point. « Ces grades déterminaient le grant que le collège allait avoir droit. Nous avions également la liberté de gérer les écoles et gérer les enfants à problèmes et nécessiteux ».

Mike Phanjoo explique qu’aujourd’hui, le système est très différent. « Zot vinn avec enn grant formula kot zot bizin dir ou ki ou pou fer », dit-il, déplorant à son tour que plusieurs dépenses de l’école n’entrent plus dans le critère de la PSEA. Il cite ainsi l’exclusion de la formation des enseignants, les licences nécessaires à certains élèves, les besoins de “caring attitude” de certains élèves nécessiteux, tout ce qui touche aux bâtiments, soit la sécurité, les réparations, les rideaux, etc. À titre d’exemple, il indique que si un collège a dix ordinateurs datant de 10 ans à changer pour être à jour avec les cours dispensés aux élèves avec le système actuel, « li dir be li alime, b kifer ou bizin sanze ? ».

Il se dit, comme d’autres, étonné et dénonce le fait qu’aujourd’hui, même si la PSEA vous donne une certaine somme d’argent, il peut décider de reprendre l’argent qu’il considère que vous n’avez pas utilisé. « À titre d’exemple, lorsque nous faisons une demande en novembre, ce n’est qu’en mai de l’année suivante qu’ils envoient un évaluateur de l’état pour vérifier si nous avons vraiment besoin de l’argent et lorsque c’est accepté, bien que nous n’ayant parfois même pas 1/5 de la somme que nous avons demandées, la PSEA nous impose 30 jours pour dépenser l’argent. Passé ce délai, la somme sera considérée comme unitilised et reprise. Le plus drôle, c’est que nous n’aurons même pas le droit de connaître les retombées de l’évaluation de cet évaluateur de l’État, car on nous dit que cela ne peut être disclosed, car confidentiel. »

Le vice-président de la FOM explique qu’aujourd’hui, il faut réduire le nombre d’achats d’équipements contre leur gré. « Nous sommes tous en overdraft avec les banques. Aujourd’hui, nous devons faire appel à la PTA et aux enfants eux-mêmes ou aux old-boys pour financer la qualité d’éducation que nous voulons continuer à donner à nos enfants. Aujourd’hui, on vous dit que l’éducation n’est plus gratuite. »

Jimmy Harmon a tenu à préciser que des collèges à Rodrigues sont également dans la même situation. Il explique que les dépenses sont plus élevées pour eux qui doivent prendre des cotations et passer des commandes de Maurice.

Raffick Soobadar s’est également attardé sur les nouvelles réglementations imposées aux enseignants pour enseigner dans des collèges privés, notamment l’obligation d’avoir un PGCE ou de s’enregistrer pour les cours. Il explique, de plus, qu’annoncer cela en milieu d’année pose problème, car cela crée un énorme manque d’enregistrements dans les collèges privés. Les enregistrements sont déjà fermés en milieu d’année et il faut attendre le début de la prochaine année pour le faire. « Nous ne savons plus quoi faire et nous pénalisons nos élèves. Des classes deviennent sans surveillance ni professeur, ce qui empire le problème de la discipline. »

Il évoquera également le manque d’autobus dans certaines régions, créant des absences assez souvent où les enfants préfèrent ne pas venir à l’école s’ils n’ont pas eu de place en autobus, au lieu d’arriver en retard.

Un lock timetable est aussi évoqué. Cet emploi du temps imposé par la PSEA est uniquement sept minutes pour l’assemblée du matin. « Comment croyez-vous que l’on peut ranger 1000 étudiants dans un amphithéâtre et leur transmettre des valeurs, des règlements et les messages importants en sept minutes ? Nou bizin enn lot lapros. Nou pena lespas pou amenn nou bann zenfan dans la bonne direction avec bann moral values. Time table-la inn fer pou pa kapav bouz nanie ladan », explique-t-il.

« Laisser nos collèges privés tranquilles »

Diana Amy demande de « laisser nos collèges privés tranquilles. Les écoles travaillent dans la transparence. Se pa zot ki bizin dir komie letan pou lassamble, ki zenfan bizin gagn meday, ki chaise bizin sanze. Que la ministre et le directeur entendent nos voix! »

Le président de la FOM conclura avec : « Nous ne voulons pas que nos écoles ferment. Nou bizin gard sak lekol avek so spesifisite, li importan pou nou pei. »

Un parent, qui est aussi enseignant dans un collège privé, prenant la parole à son tour lors de la tranche des questions, a déclaré « que ce n’est pas à nos enfants de faire des collectes de fonds. Oui, nous avons des activités, mais on ne doit pas oublier l’essentiel qui est de perpétuer l’éducation de qualité qu’offre chaque collège privé à sa manière. C’est important que l’on se batte pour ne pas laisser baisser le niveau ».

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