La dernière Private Notice Question avant les vacances du Parlement du leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, a porté sur certains aspects qu’il considère comme les plus urgents du processus électoral, et qui préoccupent le plus l’opposition. C’est la raison sans doute pour laquelle il s’est contenté de parler de la nécessité que l’enregistrement se fasse de manière continue jusqu’à au moins une semaine après le Writ électoral, sur le dépouillement des bulletins le jour des élections et l’utilisation d’encre indélébile pour éviter les cas d’usurpation d’identité.
Des échanges entre le Premier ministre et lui découlent le fait que Pravind Jugnauth a pris l’engagement qu’il y aura définitivement un projet de réforme, aussi bien du processus que du système électoral, avant les prochaines élections générales. Il a refusé toutefois la proposition d’instituer un comité parlementaire, qui se serait apparenté à une All Party Committee, et qui, de l’avis du leader de l’opposition, aurait permis d’éviter toutes les aspérités qui auraient pu braquer l’opposition et bloquer la mise en œuvre du projet, lequel nécessite consensus.
Il semble donc que le Premier ministre veuille garder toutes ses cartes en main. D’autant qu’il est le seul à savoir quand les législatives seront organisées. C’est là que réside la clé de l’équation. La tentative du leader de l’opposition de tâter le pouls du Premier ministre n’est pas fortuite. Ce dernier a évité le piège habilement en affirmant qu’il a tout le temps devant lui pour présenter le texte de loi avant les élections. Il reste cependant ouvert aux consultations avec tous les partis parlementaires et extraparlementaires, mais tient à garder la paternité de toute réforme, si réforme il y a, tout comme il a pris la paternité de l’organisation du décompte des voix le jour des élections et de l’avoir implémenté pour les villageoises et les élections à Rodrigues.
Il ne serait pas étonnant qu’il fasse de la réforme électorale son cheval de bataille pour les prochaines élections, en demandant aux électeurs de la valider en soutenant que son adversaire n’appliquera aucune réforme, et en reprenant la déclaration de Navin Ramgoolam, qu’il a citée au Parlement hier. Il n’est pas impossible non plus qu’il utilise la réforme électorale pour tenter de séduire ses adversaires.
Paul Bérenger a déclaré mercredi qu’il avait accepté de conclure une alliance électorale en raison du système électoral archaïque. Comment réagira-t-il s’il se trouve que la réforme proposée est à sa convenance ? Par ailleurs, le timing de la reprise des travaux parlementaires, soit le 17 octobre prochain, plus tôt que d’habitude, devrait contribuer aux spéculations quant à la possibilité que les élections puissent avoir lieu à la fin de l’année, après l’adoption de quelques législations.
Les yeux de tous les démocrates mauriciens et étrangers qui suivent l’évolution du système électoral à Maurice reconnaissent que notre système a des failles. Vincent Degert, ambassadeur de l’Union européenne, rappelle dans une interview accordée au Mauricien que même les Nations Unies ne sont pas d’accord avec le système de best losers, qui repose sur des données ethniques datant de 1972. Il recommande une réflexion sur un système électoral plus équilibré.
Cependant, la réforme électorale ne doit pas être une astuce pour détourner l’attention du pays des vrais défis auxquels nous sommes confrontés. La démocratie, telle que le préconise la Constitution, repose sur une séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire. La persistance du commissaire de police d’essayer d’empiéter sur les pouvoirs du DPP est un mauvais signal envoyé au monde.
La répression pratiquée par un Speaker non élu sur les parlementaires, élus, est également considérée comme un mauvais signal envoyé par Maurice. Pour ne citer que ces exemples. Quid de la réforme constitutionnelle ? Il y a aussi toute la question de la gouvernance, de la corruption, de la perception de népotisme et de l’arrogance du pouvoir. Tout cela mérite autant l’attention des citoyens que la réforme du système électoral.