Parmi les nombreux collectifs qui se mobilisent, l’on retrouve Platform Moris Lanvironnman (PML), qui a depuis le début des discussions attiré l’attention sur la fragilité de ce site et sur l’éclosion de Smart Cities de part et d’autre. Adi Teelock, un des porte-parole de l’ONG, répond à nos questions.
Depuis quelque temps, le dossier Roches-Noires refait surface. Quelle est la position de PML ?
Maurice croule sous les projets immobiliers, surtout les grands qui bénéficient de divers statuts incitatifs tels le Smart City Scheme et l’ancien IRS Scheme. Tout récemment, le Cabinet ministériel a pris note d’une regulation que l’Economic Development Board (EDB) va faire promulguer. Cette regulation vise à permettre aux promoteurs de IRS et de PDS de continuer à vendre des biens tout en rendant les conditions de vente plus attractives aux acheteurs — parmi, l’accroissement de la superficie limite du bâti qui passe de 25% du lot à 33%. 11 certificats Smart City ont été donnés à ce jour, et cinq autres smart cities sont en attente — dont celle de Roches-Noires. Plus de 80 autres projets immobiliers d’envergure ont vu ou verront le jour dans quelque temps. Tout cela sans qu’il y ait eu d’évaluation des impacts environnementaux et sociaux — et même économiques — cumulés de cette stratégie de développement. Tout est évalué dans le court terme, et uniquement du point de vue de l’investissement direct étranger (IDE) et de points de PIB où la destruction du capital naturel est comptabilité comme positif.
Le promoteur de ce projet hôtelier a récemment soumis une demande d’EIA aux autorités. Quels sont, selon vous, les points qui pourraient jouer contre lui ?
Le projet Smart City de Roches-Noires a ceci de particulier qu’il se fait dans une zone extrêmement sensible écologiquement, possiblement bien davantage encore que les projets immobiliers de Beau Vallon dans le sud-est et de NMH dans le sud-ouest où des wetlands sont aussi présents. À Roches-Noires, ce sont des centaines d’arpents d’un bois très riche en faune et en flore diverses qui sont menacés. Qui plus est, le terrain lui-même est miné, si je puis m’exprimer ainsi. Tous les projets envisagés ont capoté, pour des raisons diverses sur lesquelles je préfère ne pas m’étendre pour l’instant.
Concrètement, est-il possible de stopper un tel projet d’envergure, sachant que par le passé, malgré les failles notées dans les EIA, les constructions ont tout de même continué ?
Soit parce que les dés sont légalement “pipés” ou parce que les dossiers des contestataires ne sont pas assez bien ficelés, ou les deux. Cependant, il est très important de rappeler que la contestation dans le cas de Growfish a été couronnée de succès ! Et cela en dépit du fait que les promoteurs et le gouvernement avaient des longueurs d’avance. Depuis 2016, la législation a été constamment amendée pour rendre toute contestation légale de plus en plus difficile, alors qu’en démocratie, le recours légal des citoyens devrait être protégé, car c’est un droit fondamental. Le temps accordé pour envoyer des commentaires techniques est infime (trois semaines) en comparaison aux mois — et aux moyens — que les promoteurs ont eus pour préparer leurs projets. Ensuite, une fois le permis EIA accordé, il n’y a que trois semaines pour faire appel de la décision devant le Tribunal de l’Environnement. C’est extrêmement court comme délai. C’est pour cela que la société civile doit mobiliser des experts et une équipe légale dès maintenant.