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Naufrage du MV WAKASHIO | Un an après – Les habitants du Sud-Est peinent à se remettre de la marée noire

– Aucun rapport officiel sur la qualité de l’eau dans la région

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– Les familles impactées attendent en vain la compensation

Le 25 juillet prochain, cela fera un an depuis que le MV Wakashio, vraquier japonais battant pavillon panaméen, s’est échoué au large de Pointe-d’Esny. L’épisode de Victoria, navire se trouvant en difficultés au large de Pointe d’Esny, jeudi après-midi, a ravivé le mauvais souvenir de la marée noire d’août de l’année dernière. Car douze jours après cette sinistre soirée du 25 juillet 2020, c’est une véritable marée noire qui s’est répandue sur toute la côte Sud-Est. Si l’odeur de pétrole s’est estompée, en revanche, la vie des résidents de cette région côtière reste marquée à jamais. Avec les traces de ce cauchemar environnemental et socio-économique nullement cicatrisées jusqu’ici. Pêcheurs, skippers, restaurateurs et petits opérateurs touristiques peinent encore à reprendre leurs activités. À bout de souffle, ils attendent en vain la compensation qui leur est due en pareille situation.

Les volets du restaurant La Belle Créole sont baissés depuis un an. La réouverture annoncée des frontières le 15 juillet ne réjouit pas pour autant Chris Vayavery, le propriétaire. Ancien extracteur de sable, il s’était reconverti dans le tourisme et avait embarqué toute sa famille dans l’aventure. Aujourd’hui, après deux confinements et la marée noire, il ne peut s’empêcher de se poser cette question : quel touriste va revenir à Mahébourg après ce qui s’est passé ici ? Surtout que toute l’affaire a été très médiatisée à l’étranger. Pour soutenir ses propos, il cite l’exemple de l’hôtel Preskil, converti en centre de quarantaine. « S’il n’y a pas de touriste qui vient dans l’hôtel, situé à deux pas de chez nous, qui va venir goûter à notre menu au restaurant ? »

Ce père de quatre enfants a été contraint de réinventer sa vie. Mais pas facile quand on a des engagements à honorer et que toute la famille est dans le même business, pour ne pas dire le même bateau « Je dois dire que la situation est chaotique. Bien sûr, nous avons bénéficié de l’allocation du gouvernement, mais après ? Que va-t-il se passer pour Mahébourg ? Je ne vois pas de reprise malgré l’ouverture annoncée des frontières. Ici, les gens n’ont pas de travail, les commerces tournent au ralenti, à part sans doute la vente d’alcool… » regrette-t-il d’emblée.

Chris Vayavery lance un appel au Premier ministre, Pravind Jugnauth, l’enjoignant de s’intéresser aux résidents du Sud-Est, pour savoir comment ils s’en sortent après ce désastre qui a bouleversé leur quotidien en mettant en péril leur pain quotidien. « Personne n’est venu nous voir pour savoir dans quelles conditions nous vivons. Selon moi, l’économie ne va pas reprendre dans la région avant deux à trois ans peut-être », dit-il. Entre-temps, le poids des dettes se fait sentir, et une année de moratoire ne suffit. De plus, il affirme avoir été surpris d’apprendre que l’amnistie pour le paiement du bail de l’Etat prenait fin en juin 2021. « On avait dit que ce serait étendu à 2022, mais je me suis rendu au ministère des Terres et du Logement et c’est là qu’un officier m’a informé de la situation », lâche-t-il avec amertume.

Ce dernier comptait sur la compensation qui devait être payée par l’assureur du MV Wakashio pour au moins rembourser ses dettes, mais cela se fait toujours attendre. « En revanche, j’ai vu que la compagnie maritime qui avait affrété le Wakashio a mis un fonds de Rs 304 millions pour soutenir les projets environnementaux et sociaux. J’espère que ce sont les vraies victimes qui vont en profiter et non des gens extérieurs, comme cela s’est passé avec le nettoyage des plages lors de l’épisode de la marée noire. J’espère également qu’on ne va pas prendre l’argent du Wakashio pour financer des travaux d’infrastructure, » dit-il.

Chris Vayavery se dit d’autant plus inquiet que des boulettes d’hydrocarbure sont apparues sur la plage de Pointe-d’Esny dans le courant de la semaine. « Nous sommes très inquiets. Nous ne savons plus si nous sommes en sécurité ici, si nos enfants peuvent nager dans cette mer. Je peux dire que les Mahébourgeois ne sont pas contents. Il faut jouer franc-jeu avec nous, » fait-il comprendre.

Impact sur la santé

Ce point de vue est partagé par Natasha Magrajah, dont la vie a également été bouleversée par les événements de l’année dernière. Si elle garde de bons souvenirs de l’élan de solidarité qui s’est mis en place suite à la marée noire, en revanche, ce n’est pas facile pour elle d’affronter le quotidien en tant que veuve avec deux enfants sur les bras. « Un an après la marée noire, la mer a été nettoyée, le lagon est à nouveau ouvert, mais notre vie n’a pas changé. On avait mis sur pied une Wakashio Support Cell pour régler nos problèmes, mais personnellement, je n’ai rien reçu en dépit de nombreuses démarches, » affirme-t-elle.

Face à cette situation, la jeune maman a dû baisser les volets de son magasin de souvenirs et prendre de l’emploi dans un centre commercial. Auparavant, elle avait été engagée dans un spa, mais cela n’a duré que… 15 jours. « Comme il n’y avait pas un seul client, le propriétaire n’a eu d’autre choix que de mettre un terme à mon emploi. » Ce qui l’attriste le plus, c’est que personne n’est venu se rendre compte de la situation des habitants de Mahébourg principalement. « Nous avons tous aidé à nettoyer la mer, nous avons tous respiré cette odeur de pétrole pendant plusieurs jours, nous ne savons pas ce que cela a fait sur notre santé. On a autorisé la pêche à nouveau dans le lagon, mais où est le rapport d’analyse rendu pour dire qu’on peut manger ces poissons dans le lagon du Sud-Est. C’est dire vraiment à quel point on ne se soucie pas de nous », proteste-t-elle.

Les résidents du Sud-Est regrettent que les autorités n’aient pas songé à faire des Screenings réguliers dans la région afin de s’assurer que les résidents n’aient pas été affectés par la pollution. « On ne sait jamais quels pourraient être les effets à long terme. Si au moins, on nous avait montré un rapport disant que la mer est Safe, on aurait pu être rassurés. »

Natasha Magrajah est d’avis qu’il faut un coup de pouce pour que les activités économiques puissent reprendre dans la région. « Il y a beaucoup d’activités qu’on peut faire ici pour que Mahébourg revive. Par exemple, la valorisation de nos sites historiques. Nous avons un musée qui tombe en ruine », indique-t-elle encore.  En attendant, dans le sud-est, on ne dort plus sur ses deux oreilles. Surtout que la poupe du Wakashio est toujours enclavée dans les récifs de Pointe-d’Esny, comme pour rappeler les mauvais souvenirs ou encore que le Sud-Est n’est pas encore sorti de l’auberge…

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