C’est un combat qui ne date pas d’hier. Les plaisanciers ne savent toujours pas à quel saint se vouer. Alors que les autorités ont rouvert, en début d’année, les licences commerciales pour les bateaux, prônant une industrie inclusive, les opérateurs de bateaux, eux, se sentent menacés avec l’arrivée d’un nouveau type de plaisanciers haut de gamme.
Depuis le début de l’année, c’est la cacophonie chez les plaisanciers, soit les opérateurs historiques. Alors que certains se disent satisfaits de la décision de la Tourism Authority de rouvrir les permis commerciaux, d’autres trouvent qu’ils sont dans le flou. En effet, depuis plusieurs années, les plaisanciers occupent l’actualité. Si ce n’est pas pour des permis de vente de barbecue, c’est pour des permis d’opération des “Pleasure Craft Boats” que les plaisanciers des régions de Trou-d’Eau-Douce au Morne lèvent la voix. Déplorant le manque de dialogue de la part des autorités, les plaisanciers demandent une petite mise au point.
“Les autorités avaient déjà détecté les zones déjà saturées et avaient déclaré qu’ils n’y livreraient pas de permis, mais il semble que tel n’est pas le cas. Des permis seront apparemment donnés à des plaisanciers de ces zones engorgées”, soutient Karl Lamarque de la Federation of Pleasure Craft Operators (FOPCO). Il confie ne pas comprendre la démarche“contradictoire” des autorités. “Prenons l’exemple du Morne, les bateaux n’opèrent plus là-bas. Il n’y a plus de place pour les petits opérateurs et si vous y mettez d’autres bateaux, la situation va empirer”, dit-il.
“Une industrie inclusive”
Il déplore aussi les nouvelles conditions de la Tourism Authority pour l’obtention d’un permis de plaisancier, notamment le nombre de passagers à bord, entre autres. “Les conditions ne sont pas à la portée des ‘ti dimounn’. Elles ne sont pas adaptées aux pêcheurs. ‘Ou bizin enn milyoner pou ou gagn ou permi lapes asterla’”, ajoute-t-il. Il regrette aussi qu’il n’y ait pas eu de consultation avec les pêcheurs pour essayer de résoudre ce problème qui existe depuis des années. “On entend dire qu’ils sont en train de délivrer des permis. C’est dommage, les pêcheurs méritent mieux. Leur métier est en péril et se reconvertir en plaisancier aurait pu être, pour bon nombre d’entre eux, un moyen de refaire surface.”
Même son de cloche du côté de l’île aux Cerfs Based Pleasure Craft Association : “Il faut faire davantage d’études sur nos mers, nos côtes. Sinon que vont dire les touristes ? Il y a déjà trop de bateaux dans nos rades, ce n’est pas logique. Cela va faire beaucoup de tort à notre industrie.” Néanmoins, pour la Tourism Authority, les choses semblent être moins compliquées.“L’industrie est en pleine croissance. C’est pour cela que nous avons rouvert les permis commerciaux pour répondre aux demandes du marché, mais cela, selon certaines conditions”, soutient la directrice de la Tourism Authority, Khoudijah Boodoo. “Il y a plus d’un an, nous avions pris la décision de ne pas accorder de licences commerciales pour les bateaux parce que, d’une part, il y avait trop de bateaux dans le lagon et, d’autre part parce, il y avait des gens qui détenaient un permis, mais qui ne l’utilisaient pas. Il y avait un gros désordre et cela avait un impact sur le secteur du tourisme”, explique Khoudijah Boodoo.
Cependant, après plusieurs réunions et études menées sur les zones concernées, les autorités régulatrices ont décidé de rouvrir les permis commerciaux. “L’an dernier, avec la mise en place du Pleasure Craft Management System, l’on a revu les standards et on ne donnait plus de licences, sauf pour deux exceptions : la première concernait uniquement les projets innovateurs, car on ne voulait pas fermer la porte aux activités innovatrices pour les touristes; et la seconde concernait les authentic crafts, soit les bateaux en bois et à voile d’une certaine dimension. On voulait encourager la conversion des bateaux en fibres en bateaux plus plaisants”,explique-t-elle.
Elle ajoute que suite à cette décision, ils ont observé une sorte de rationalisation des licences, car ceux qui avaient besoin de permis les racheter à ceux qui n’utilisaient pas le leur. “Le bateau et le permis ont alors pris de la valeur”, dit-elle. “Il y a un type ‘of self regulation in the sector’. On a mis de l’ordre dans notre base de données et des ‘surveys’ ont été faits. Et suite à ces analyses bathymétriques dans certaines zones, on a su qu’il y avait encore de l’espace pour d’autres bateaux, d’autant qu’il y avait plusieurs opérateurs dont les licences ont été annulées, ou qui n’étaient plus intéressés”, soutient la directrice de la Tourism Authority.
Par ailleurs, contrairement à ce disent certains plaisanciers, la Tourism Authority privilégiera “ceux qui n’ont pas de permis de bateaux”. Elle avance que le but du ministère du tourisme est d’ouvrir le secteur, mais précise qu’il existe bel et bien des zones saturées et que de nouveaux permis à ce égard ne seront pas délivrés. “De Mon-Roche à Bois-des-Amourettes, la zone reste fermée”, dit-elle. “Nous devons aussi sauvegarder le cachet naturel de nos lagons et ne pas les polluer et les encombrer davantage.”
Si les permis commerciaux restent ouverts, donnant l’occasion aux nouveaux opérateurs de commencer leur business, les anciens, eux, broient du noir et attendent une énième rencontre avec les autorités.